Ahmed Ali Salah, directeur des affaires civiles au ministère de la Justice, explique dans cet entretien qu’un dispositif accompagnant la mesure consistant à présenter à la justice des documents en arabe a été mis en place.
Liberté : L’obligation de présenter à la justice des documents en arabe ou accompagnés d’une traduction va, selon certains avocats, ralentir le rythme du traitement des affaires en justice. Le ministère de la Justice envisage-t-il de geler cette mesure ?
Ahmed Ali Salah : Non. L’article 8 du code de procédures civiles et administratives traite de la question des plaidoiries et des documents présentés devant les juridictions. Ce texte, qui prévoit que les documents, les pièces, les procédures et actes judiciaires tels que les requêtes et mémoires doivent être présentés en langue arabe ou accompagnés d’une traduction officielle, sous peine d’irrecevabilité, découle de la Constitution qui stipule que la langue arabe est la langue nationale.
Cette mesure bien que contenue dans le code de procédure civiles et administratives, objet d’une campagne de vulgarisation depuis une année, n’a été rendue publique que récemment. Est-il envisagé une période de transition ?
Il n’est pas facile de passer d’un régime à un autre, mais je peux vous assurer que la transition se déroulera de la manière la plus satisfaisante et la plus sereine. Je dois vous signaler que cette disposition n’existait pas dans l’ancien code de procédures civiles et administratives, mais toutes les juridictions ont toujours appliqué ce principe. La question d’utilisation de la langue arabe dans les tribunaux est une question de souveraineté. Tous les juges et avocats maîtrisent la langue arabe. Le gros des documents versés actuellement à la justice est rédigé en langue arabe. Le texte prévoit une traduction officielle. Maintenant, s’il y a des documents non rédigés en langue officielle, nous avons des bureaux de traduction. M. le ministre de la Justice vient de nommer 80 traducteurs officiels nouveaux qui viennent renforcer la corporation après avoir passé un concours et bénéficier d’un stage pratique de deux mois au niveau des bureaux déjà existants. Le ministre de la Justice vient de promulguer un arrêté portant ouverture d’un sixième concours pour le recrutement de traducteurs officiels.
Ce concours se déroulera à la fin juin. Quant au problème de frais de traduction, il y a la possibilité de recourir à l’assistance judiciaire prévue par la loi
09-02 du 25 février 2009 qui a non seulement élargi le bénéfice de l’assistance à certaines catégories de personnes, mais aussi à certains actes de procédures tels le recours au service des huissiers de justice, des traducteurs officiels, notaires en plus des avocats. En dernier lieu, je tiens à souligner qu’aucun pays n’admet l’utilisation d’une langue autre que la langue officielle devant ses juridictions.
Quels sont les critères à réunir pour bénéficier de l’aide judiciaire ?
Une nouvelle loi a été adoptée et publiée dans le JO n°15. Cette loi vient concrétiser le principe de l’égalité de l’accès à la justice en faisant bénéficier les personnes dont les ressources sont insuffisantes de l’assistance judiciaire. Cette assistance garantit le droit à la défense prévu par la Constitution et les différents textes nationaux dont le code de procédures civile et administrative qui est entré en application le 25 de ce mois. La liste de cette catégorie de bénéficiaires de l’aide judiciaire vient d’être élargie et complétée pour comprendre les handicapés, les victimes du terrorisme, les victimes de la traite des personnes et du trafic d’organes, les victimes du trafic illicite des migrants et du terrorisme. Cette loi vise, en outre, à dynamiser l’assistance judiciaire en matière d’exécution des décisions de justice. C’est-à-dire, elle ne se contente pas de garantir le droit à la défense, mais également elle s’étend à l’exécution des décisions de justice et à l’établissement des actes judiciaires.
La prise en charge par l’État des frais de l’avocat et de la traduction officielle sera partielle ou totale ?
Elle peut être totale ou partielle selon les pièces jointes telles qu’un extrait de rôle de contribution ou certificat de non-imposition, un relevé de salaire des trois derniers mois, une déclaration sur l’honneur attestant des ressources du concerné. La demande de l’assistance est adressée au bureau de l’assistant judiciaire de la juridiction concernée. Dès que la loi a été publiée au Journal officiel, il a été procédé à l’installation des membres de bureau et ont mis à leur disposition un endroit pour recevoir les demandes des citoyens. L’installation de ces bureaux a été effectuée la semaine dernière. Ces bureaux sont opérationnels. Tous les citoyens intéressés par cette aide peuvent se rapprocher de ces bureaux où ils seront renseignés sur tout ce qui a rapport à cette assistance.