Adlène Badis
Ce premier vendredi du mois de Ramadhan sera incontestablement important pour le mouvement populaire et la revendication du changement.
Entamé depuis un certain 22 février, le Hirak a surpris par son ampleur et sa vigueur. Durant onze vendredis consécutifs, le mouvement populaire a exprimé la volonté du peuple algérien de voir le départ de ceux qui représentent un système politique et économique viscéralement rejeté. L’avortement du projet insensé du cinquième mandat aura été une grande victoire du Hirak qui ne voudrait pas s’arrêter en si bon chemin.
A l’approche du Ramadhan, certains s’inquiétaient de ses effets sur la ferveur du mouvement. Une appréhension accentuée par un contexte marqué par un sérieux blocage sur les possibles sorties de crise. Il faut dire que les étudiants ont constitué un premier test concluant, mardi dernier, en sortant en masse exprimer leur volonté de changement et d’exigence de voir partir les hommes symboles de « l’ancien système ». Les étudiants ont scandé les slogans habituels hostiles au pouvoir et demandé une véritable transition démocratique. C’est une première réponse au dernier discours prononcé, dimanche, par Abdelkader Bensalah. Le président par intérim a réaffirmé le maintien de l’élection présidentielle du 4 juillet et appelé au « dialogue ». Un appel immédiatement rejeté par l’opposition.
Après la sortie des étudiants, les appels à manifester vendredi se sont multipliés, notamment sur les réseaux sociaux devenus la plateforme la plus importante pour la mobilisation. Les différentes initiatives se sont multipliées également, comme celles consistant à organiser un méga iftar qui clôturera les marches. Garder la ferveur du mouvement populaire de contestation sera à l’évidence un défi d’une importance capitale pour la suite des évènements durant ce Ramadhan. La poursuite du mouvement populaire durant ce mois béni, particulièrement peu propice à l’activité politique, devrait avoir pour objectif de garder la flamme de la revendication allumée. Et surtout de décevoir ceux qui parient sur cette période pour voir le Hirak s’essouffler et, partant, s’affaiblir. Le départ des « 3 B » Bensalah, Bedoui, et Bouchareb reste, inlassablement, une revendication populaire ressassée.
Transition problématique
Il semble pour l’heure inimaginable l’organisation d’une élection présidentielle tant que ces personnalités demeurent en poste et ne sont pas remplacées. Certains, d’ailleurs, qui ont également le souci de rester dans le cadre de la Constitution, estiment qu’il y a une certaine marge, celle de « sacrifier » ces noms tout en restant dans le cadre de l’article 102. Après coup, le pays pourrait entamer une transition dans les meilleures conditions qui pourraient déboucher sur un scrutin avec le maximum de garantie. Pour l’heure, la situation politique brille toujours par un blocage qui n’augure rien de bon.
La transition vers laquelle tendent tous les acteurs demeure toujours problématique. Le dernier discours du chef d’Etat par intérim Abdelkader Bensalah, qui a insinué que le cap du 4 juillet est toujours maintenu, malgré le refus global des Algériens et en dépit d’une impossibilité pratique à organiser un scrutin dans la situation actuelle, a particulièrement désappointé. L’opposition a d’ailleurs exprimé un rejet franc de cette feuille de route considérée comme obstinée. L’institution militaire semble, de son côté, toujours réfractaire à une possibilité d’ouvrir une nouvelle voie de sortie qui pourrait susciter l’adhésion populaire et partant ramener un minimum de calme afin de passer à une étape qualitative. En attendant un consensus toujours introuvable, il reste pour le moins clair qu’une solution à la crise est un passage inévitable vers une période de transition calme qui acterait le passage à une Algérie nouvelle.