Des révélations qui mettent fin à la cavale contre l’Algérie
Dans son dernier numéro, l’hebdomadaire français Marianne a rapporté en exclusivité les aveux des terroristes du GIA qui ont assassiné les moines de Tibhirine.
Dix-sept ans durant, les autorités algériennes étaient formelles sur l’assassinat des sept moines français de Tibhirine, enlevés, puis exécutés par des terroristes du GIA. Cependant, et malgré le fait que les terroristes du GIA revendiquaient ces crimes, de nombreux doutes nourris par des témoignages contradictoires d’acteurs qui accablent l’enquête des services de sécurité algériens, provoquaient, parfois, des divergences diplomatiques entre la France et l’Algérie! Mais la vérité a fini par remonter à la surface.
Aujourd’hui, l’hebdomadaire français Marianne revient sur ce dossier avec de nouveaux témoignages et pas des moindres. Ils confirment la thèse concluante des autorités algériennes. Dans son dernier numéro, Marianne a rapporté les aveux des terroristes du GIA qui ont assassiné les moines français de Tibhirine.
L’hebdomadaire confirme l’implication directe de ces terroristes dans l’enlèvement au monastère de Notre-Dame-de-l’Atlas, des sept moines et leur assassinat, deux mois après. L’hebdomadaire qui consacre sa rubrique «Evénement» à cette tragédie, sous le titre La vérité sur l’assassinat des moines de Tibhirine, tient ses sources d’un documentaire dont la diffusion est prévue le 23 mai sur France 3. Désormais, l’assassinat des sept moines imputé à une bavure de l’Armée algérienne pour absoudre les extrémistes, est une manoeuvre devenue vaine. Les témoignages exclusifs de deux journalistes l’illustrent parfaitement dans le documentaire qui établit une vérité longtemps éludée et démontre la culpabilité du Groupe islamique armé dans cette tragédie. Les preuves du représentant de l’hebdomadaire Marianne en Algérie et sa consoeur, chercheuse au Centre national de recherche scientifique, sont «irréfutables». C’est dire tout simplement que c’est la fin d’un dossier qui n’avait pas manqué, durant 17 ans, de nourrir une profonde agitation diplomatique entre Alger et Paris. Dans leur réalisation, les deux journalistes font parler des ex-responsables du GIA, des officiers supérieurs de l’Armée nationale populaire, des agents de renseignements et des membres des gouvernements des deux pays. Les témoignages de ces acteurs influents, discréditent totalement la thèse selon laquelle l’ANP serait impliquée, de près ou de loin dans cette affaire. «C’est dans les journaux, voire devant les tribunaux qu’on s’est affronté. Marianne aussi s’est retrouvé dans les prétoires pour rappeler les faits, les forfaits, la sauvagerie du GIA… qui ne doute pas que cette fois encore, 17 ans après les meurtres, la polémique va faire rage et que cette fois plus que jamais, l’idéologie qui décrète coupable par nature l’armée et le pouvoir algériens, voudra ferrailler contre la force et la vérité du témoignage», rapporte une dépêche de l’APS. Selon Marianne, «il a fallu des années de patience, de rigueur, mais aussi de passion pour les réalisateurs Malik Aït Aoudia et Séverine Labat pour retrouver les témoins directs dans cette affaire, qui a fait couler un fleuve d’encre et apporter des preuves irréfutables sur l’implication des terroristes du GIA dans l’assassinat des moines de Tibhirine». C’est dire que le magazine Marianne revient sur une tragédie qui avait fait couler beaucoup d’encre et de salive durant plus d’une dizaine d’années.
La publication française déterre un dossier qui a longtemps envenimé les relations diplomatiques entre la France et l’Algérie en raison de l’implication des partisans de la question «qui tue qui», et apporte de nouveaux témoignages confortant la thèse de l’assassinat des moines par les terroristes du GIA. Ayant constitué pendant une décennie un fonds de commerce utilisé à des fins plus ou moins avouées par des «transfuges» de toutes sortes, l’affaire des trappistes de Tibhirine avait mis en scène de nombreux cercles politiques et médiatiques qui ont tout fait pour mettre l’armée et les services de renseignements algériens sur le banc des accusés. Enlevés dans la nuit du 26 mars 1996, les sept moines furent séquestrés durant deux mois avant que leur assassinat ne soit annoncé le 21 mai dans un communiqué signé par le GIA.
Pour rappel, des négociations séparées entreprises avec les ravisseurs par la Dgse, d’un côté, et la DST de l’autre, n’avaient fait qu’exacerber la rivalité entre les deux services de sécurité français. C’est dans ce contexte marqué par des manipulations et des tentatives d’infiltration étrangères que le GIA sort son communiqué n°44 annonçant: «Nous avons tranché la gorge des sept moines conformément à nos promesses.» D’ailleurs, c’est cet aveu qui est aujourd’hui mis en relief par le magazine Marianne dont les intentions demeurent cependant identifiables. A vrai dire, la publication d’un tel dossier en ce moment précis soulève de nombreuses questions. Tout en confortant la thèse de l’assassinat des moines par des terroristes du GIA, la publication française a trouvé le moyen de mettre en première ligne les services de sécurité algériens, car il est certain aujourd’hui que les amis du général François Buchwalter, celui-là même qui avait déclaré que les trappistes auraient été tués par erreur lors d’une opération menée par l’Armée algérienne, ne vont pas se taire. Des juges, des avocats et des journalistes ne vont pas manquer d’intervenir pour apporter leurs versions. Le but de cette médiatisation ne serait-il pas similaire à une tentative d’internationalisation d’une triste affaire que les Algériens ont vécue dans la douleur? Comment et quand les deux journalistes ont rencontré, selon leur témoignage, Hassen Hattab? Pour quelle raison le dossier refait surface en ce moment? En effet, la réalisation de ce documentaire et les révélations de Marianne appellent à plusieurs interrogations, par ailleurs légitimes.