La nuit du 17 octobre 1961, la communauté algérienne établie à Paris avait connu une terrible répression des autorités françaises. Tout a commencé par une manifestation organisée en réponse au couvre-feu nouvellement appliqué à la communauté magrébine, notamment aux Algériens.
En effet, le 5 octobre de cette année, le préfet de la police de Paris Maurice Papon avait imposé aux Algériens un couvre-feu à partir de 20 heures jusqu’à 5 heures du matin. À la suite de quoi, la Fédération du FLN en France décide alors de riposter.
Dans un témoignage livré dans un entretien accordé au quotidien national, l’Expression, l’un des architectes des manifestations du 17 octobre 1961, Mohamed Ghafir, dit « Moh Clichy », renvient sur les origines du massacre du 17 octobre 1961.
Par-delà ce couvre-feu imposé aux Algériens, les autorités françaises avaient pour objectif « d’étouffer les activités des militants ». « Le ton était plus ferme et la plage horaire annoncée par la préfecture avait pour objectif d’étouffer les activités des militants », a déclaré l’intervenant.
Du coup, « il devenait, dès le 5 octobre, impossible de circuler en métropole », d’autant que « la préfecture de Paris avait la ferme intention de faire respecter strictement la mesure de Papon ».
Une action parmi une série d’autres actions prévues par le GPRA
Selon Mohamed Ghafir, la direction de la 7e wilaya avait transmis « des rapports au Gouvernement provisoire les informant de la situation ». En réponse, les activistes et militants établis à Paris ont reçu « la directive en date du 12 octobre ».
Il s’agit d’une action divisée en trois phases. « La première devait débuter le 17 octobre avec appel aux Algériens d’investir les grands boulevards de la capitale française à partir de 20 heures », précise encore le rescapé des massacres du 17 octobre 1961.
Comme seconde phase, énumère encore le témoin, le gouvernement provisoire préconisait une grève générale dans toute la France, et ce, le 18 octobre, soit le lendemain. « La troisième phase consistait en une manifestation de toutes les femmes algériennes devant les commissariats et les casernes de la gendarmerie », ajoute-t-il.
Concernant la manifestation du 17 octobre, le GPRA avait été ferme, selon lui : « les armes, les couteaux et même les bâtons ont été proscrits par l’organisation. Les manifestants ne devaient en aucun cas répondre aux provocations ». Il s’agit de mesures à même d’éviter tout acte violent.
Une manifestation pacifique qui débouche sur un effroyable massacre
L’objectif étant « de faire une démonstration de force pacifique de la détermination des Algériens », Mohamed Ghafir affirme qu’ils étaient « très loin de penser que les policiers allaient faire montre d’une sauvagerie, aujourd’hui encore, innommable ».
Ce jour-là, entre 20 000 et 30 000 Algériens participent à cette manifestation. Pas moins de 10 000 policiers ont été mobilisés afin d’empêcher les manifestants. Les manifestants ont été violemment réprimés faisant des dizaines de morts.
Selon le bilan officiel avancé le lendemain, les autorités françaises ont fait état de trois morts, puis de sept quelques jours plus tard. En 1991, ce chiffre avait été corrigé, pour la première fois, par l’historien Jean-Luc Enaudi. Il parle d’au moins 200 morts et 193 disparus.
Lors de cette journée, les manifestants ont été réprimés, frappés et même tués par balle, puis jetés dans la Seine. « Ici, on noie les Algériens », peut-on lire dans la célèbre photo prise sur les quais de la Seine quelques semaines après le massacre du 17 octobre 1961.