«Les ruptures ne datent pas d’aujourd’hui, ça fait au moins trois à quatre ans qu’on les signale et qu’on les vit…», a déclaré, hier, Messaoud Belamri président du syndicat des pharmaciens.
La filière du médicament évolue en plein marasme. Il va falloir mettre de l’ordre dans la maison. Les moyens existent pourtant. Ils sont indéniables. A commencer par l’enveloppe financière qui lui est allouée: quelque 2 milliards d’euros.
Ce qui n’a pas empêché l’insatisfaction de la demande. Les pharmaciens ont tout le mal du monde pour mettre la main sur certains produits. La disparité dans la production des médicaments est flagrante. Certains sont plus fabriqués que d’autres et c’est apparemment ceux qui concernent les maladies qui nécessitent des traitements particuliers et rigoureux qui sont les plus affectés. La question de la crise du médicament en Algérie est récurrente. L’indisponibilité, les pénuries minent cette filière.
Une situation d’une extrême sensibilité, d’une gravité criante. La santé des Algériens en général et de certains malades en particulier étant en jeu. Près de 200 médicaments sont en rupture de stocks ou sous tension. «Entre 170 et 200 médicaments sont sous tension ou en rupture, dont pas moins de 70 sont de production nationale», a annoncé, hier, le président du Syndicat des pharmaciens, Messaoud Belamri, sur les ondes de la Chaîne 3. «Les ruptures ne datent pas d’aujourd’hui, ça fait au moins trois à quatre ans qu’on les signale et qu’on les vit.
La situation perdure», a enchainé l’invité de la rédaction avant de pointer du doigt les différents opérateurs qui ont contribué à mener le secteur à un tel niveau de situation. Quels sont les motifs qui ont généré le manque de certains médicaments? «Il y a un cumul durant trois ans par rapport à la perturbation et les retards observés pour la signature des programmes d’importation. Les avenants n’ont pas été signés pendant deux ans.
Cette année, ils ont été signés, mais de manière tardive. D’ailleurs, la plupart des opérateurs ne les ont pas récupérés car les délais ne leur permettaient pas de réaliser ces importations. Ils avaient à peine deux mois pour le faire», a confié le président du Syndicat national des pharmaciens d’officines (Snapo). La fabrication locale n’a pas été non plus épargnée malgré tous les moyens dont elle dispose. Les entreprises autant publiques que privées sont pointées du doigt. «La crise a touché aussi plusieurs produits fabriqués localement, par abandon de production de ces produits aussi bien par les entreprises publiques que privées, ou par la production de quantités totalement insuffisantes à l’exemple des anti-inflammatoires injectables, de certaines vitamines injectables indispensables, mais aussi des antibiotiques injectables», révèle le patron du Snapo.
Un comportement inadmissible pour ne pas dire «criminel» étant donné la catégorie des produits ciblés. Pas moins de 70 produits fabriqués à travers le territoire et 80 achetés à l’étranger sont introuvables ou presque sur le marché. Les fournisseurs ne manquent pourtant pas. Ils sont en pléthore. Il existe «quelque 600 grossistes-distributeurs du médicament en Algérie, contre seulement quatre à 10 dans des pays développés», indique Messaoud Belamri qui souligne toute la difficulté pour les pharmaciens de travailler dans une telle profusion.
Le président du Snapo, qui s’est demandé si l’enveloppe de 2 milliards d’euros allouée à la filière du médicament est suffisante, n’a pas manqué d’incriminer les principaux acteurs du secteur de la santé.
L’Agence nationale du médicament, notamment et la cellule de veille, doublée d’un comité de concertation. S’il s’est demandé si l’Agence disposait réellement de moyens suffisants «pour fonctionner de manière efficace» dans la crise du médicament, il a par contre épinglé la cellule de veille, qui est censée être un organe d’urgence qui devait se réunir plusieurs fois de manière rapprochée, et qui ne l’a fait que cinq fois en 2018. «Je pense que ce n’est pas suffisant et nous pensons aussi que cette cellule n’a pas travaillé de la manière dont il fallait», a estimé Messaoud Belamri. Que deviennent les pouvoirs publics dans cette affaire? «Ce n’est pas uniquement le ministère de la santé qui est concerné ou interpellé, le gouvernement doit aussi s’impliquer» a souligné le président du syndicat des pharmaciens.
Il faut revoir les outils de suivi. Les solutions sont là, a affirmé le patron du Snapo