2019: Une année compliquée s’annonce

2019: Une année compliquée s’annonce

L’Algérie a clôturé une année 2018 sur une situation politique franchement chaotique. Jamais, en effet, la situation n’a été si complexe depuis l’avènement du Haut Comité de l’Etat, en janvier 1992, qui suppléait la vacance du pouvoir après le départ de Chadli Bendjedid et l’arrêt salutaire du processus électoral suicidaire du 26 décembre 1991. Il ne s’agit, certes, pas de comparer ces deux étapes de l’histoire du pays, mais le fait est que les deux derniers mois de l’année qui vient de s’écouler auront complètement chamboulé les plans du pouvoir.

Kamel Amarni – Alger (Le Soir) – Non pas sur l’essentiel, mais sur la méthode. Autrement dit, sur la manière de maintenir Abdelaziz Bouteflika au pouvoir, lui dont le quatrième mandat arrivera à sa fin en avril prochain. Bien sûr, un seul paramètre aura tout déterminé : l’état de santé du concerné. Bouteflika, qui avait dû annuler les audiences prévues avec tous ses invités étrangers depuis octobre dernier, n’aura fait, en cette fin 2018, que deux apparitions publiques. L’une à l’occasion du 1er Novembre et l’autre, le 27 décembre dernier. Deux sorties à travers lesquelles il apparaissait fortement diminué. C’est ce qui explique les derniers développements survenus subitement sur la scène politique.

En l’occurrence, la cessation «brutale» de la campagne engagée par les partis et les organisations du pouvoir en faveur du cinquième mandat et du rendez-vous électoral présidentiel tout court. A l’unisson, tout ce beau monde ne parle plus que de «continuité» et élude, paradoxalement, d’évoquer publiquement ce qui, pourtant, devait être un rendez-vous censé mobiliser toute l’armada du pouvoir : l’élection présidentielle ! C’est même devenu un sujet tabou que même des partis du pouvoir évitent d’aborder. Comme par enchantement, tout le monde parle, en place et lieu de la présidentielle, des vertus «du dialogue», de «la concertation» et surtout, du «consensus». Un parti d’opposition, le MSP, propose le report de la présidentielle ! «Nous sommes prêts à discuter de toute initiative politique», affirment, à l’unisson et à la surprise générale, les partis de la coalition présidentielle.

L’un d’eux, le TAJ de Amar Ghoul, ira même plus loin en faisant une proposition identique : «Une conférence pour un consensus national sous le haut patronage du président de la République». En réalité, tous ces chamboulements ont été provoqués par l’entourage de Abdelaziz Bouteflika. Pour contourner l’épreuve, physique et non pas politique, d’une élection présidentielle, la nouvelle feuille de route du pouvoir consiste, en gros, à permettre à Bouteflika de se maintenir au pouvoir via une révision de la Constitution et «une conférence pour un consensus national» qui constituera un socle sur lequel sera assise la légitimité du processus.

De source sûre, nous apprenons, en effet, qu’une commission spéciale est installée, de manière confidentielle, au niveau du cabinet du Premier ministre, Ahmed Ouyahia, et dont la mission est de se pencher sur le projet de cette révision de la Constitution. Notamment, sur un point bien particulier, celui de la création et du statut d’un nouveau poste : le vice-président. Un poste qui, avant même sa création officielle, fait l’objet de féroces convoitises au niveau du sérail. C’est dans cette ambiance-là, pour le moins inédite, que l’Algérie aborde la nouvelle année 2019 dont le premier trimestre s’annonce, d’ores et déjà, comme la période la plus cruciale de l’année.

Pour le pouvoir, l’enjeu est très simple : permettre à Bouteflika de demeurer à la tête de l’Etat, sans pour autant faire basculer le pays dans une situation de crise politique avec, comme seul souci, la réaction de la communauté internationale. Dans tous les cas de figure, les formes seront minutieusement «soignées». C’est d’autant plus primordial comme préalable à la concrétisation de ce projet politique du pouvoir pour l’année 2019, que tout cela devrait être accompli dans une conjoncture financière très difficile.

Déjà que sérieusement entamées par le choc pétrolier persistant de juin 2014, les capacités financières du pays subissent une nouvelle épreuve depuis quelques semaines avec cette tendance baissière persistante du prix du baril du pétrole. Cela, au moment où, il ne faut jamais l’oublier, le pays vit, déjà, à crédit depuis l’automne 2017 avec le recours, contraint, au «financement non conventionnel» de l’économie nationale.

K. A.