La loi de finances 2022 a été signée par le président Tebboune, donnant ainsi le feu vert à une rupture avec la politique socialiste que l’état a mené depuis l’indépendance. Mais avant de s’attarder sur ce qui attend l’Algérie en 2022, il est important de faire le bilan de l’année 2021.
Ce fut une année, comme disait Louiza Hanoune, « de tous les sinistres », ce qui n’est pas loin d’être vrai. Saïd Sadi quant à lui a déjà affirmé l’été dernier, que l’Algérie a frôlé une guerre civile.
En dehors de la mort de l’ancien président Abdelaziz Bouteflika, qui a été l’un des événements les plus notables de cette année, les Algériens ont vu leurs attentes reportées à des dates ultérieures, notamment celles s’inscrivant dans le cadre du développement de leur qualité de vie.
Sur un plan social, les douze mois de l’année 2021 n’ont pas fait preuve de clémence vis-à-vis du pouvoir d’achat du citoyen algérien. Les prix ont flambé, de même pour le taux de chômage et le phénomène des Harragas, tous alimentés par une crise économique et sanitaire qui ne veulent pas en finir.
Les événements les plus marquants de 2021
Cette année qui s’achève a marqué les esprits des Algériens par bien des événements. Alger est devenue à deux reprises, cette année, capitale des inondations, après qu’elle fut la capitale des marches hebdomadaires colorées et joviales. Ce phénomène, dû au réchauffement climatique, mais aussi au manque de prévention et à l’absence de civisme, a causé plusieurs décès, que l’on pouvait facilement éviter.
Après les inondations, les incendies, pour rester dans le contexte des catastrophes naturelles. Ces feux de forêts qui ont touché plusieurs wilayas, ont particulièrement, et doublement, endeuillé la Kabylie.
forêts qui ont décimé des milliers d’hectares, et qui ont ôté la vie à des dizaines de personnes.Aux phénomènes naturels s’est ajoutée la crise sanitaire, qui a semé la terreur plus que jamais lors de cette année. La troisième vague de la covid-19 a été la plus meurtrière depuis le début de la pandémie en mars 2020. Les hôpitaux débordaient de malades, et les patients, en quête d’une bouteille d’oxygène ou d’un concentrateur, jonchaient les rues et les pages des réseaux sociaux.
2021, une comète qui a frôlé la planète Algérie
Les incendies qui ont ravagé la Kabylie, et au-delà du désastre qu’ils ont causé à la population, sur le plan psychologique, économique et environnemental, ont également entaché à jamais le récit national. Alors que des gens se battaient contre les flammes, un jeune citoyen innocent s’est fait lyncher en public par une horde déchainée.
L’assassinat de Djamel Bensmail restera à jamais une plaie ouverte qui s’ajoute au malheur de la région de la Kabylie et à celui de tout le pays. Suite à ce crime abject, la situation a failli dériver après que le pays ait fait preuve de son unité et de sa solidarité avec la région sinistrée.
Les messages haineux et ouvertement racistes inondaient la toile. En 2021, on pouvait écrire et dire, à visage découvert « mort aux kabyles ». Une atteinte à l’unité nationale qui a été, heureusement, vite calmée par la sagesse du père de la victime, un exemple de nationalisme, de patriotisme et de paix comme on en voit de moins en moins.
« La grandeur d’âme et la générosité du cœur ont probablement sauvé le pays d’une guerre civile », a déclaré Saïd Saidi, au moment des faits.
Algérie, Maroc, MAK, Rachad, Israël : la recette de la lutte contre le terrorisme
Les relations diplomatiques entre l’Algérie et le Maroc, ont été (une fois encore) rompues. Cette fois ci, c’est la bonne, diront certains, car il l’a bien cherché en normalisant avec Israël, tandis que d’autres vont déplorer le rêve d’un Maghreb uni, qui part (une fois encore) en fumée.
C’est le ministre des affaires étrangères et de la communauté algérienne à l’étranger, Ramtane Lamamra, qui a déclaré, le 24 août 2021, la rupture des relations diplomatiques entre les deux pays. un mois plus tard, Alger surenchéri et annonce la fermeture immédiate de son espace aérien à tous les avions civils et militaires marocains et à tous ceux immatriculés dans le royaume chérifien.
Le Maroc qui normalise avec Israël, est accusé par Alger d’avoir une main dans les incendies qui ont ravagé la Kabylie, et d’être de mèche avec le MAK. Le Maroc lourdement pointé du doigt a toutefois permis à un ministre israélien de menacer Alger à partir de Rabat.
Cette escalade avec le Maroc a été précédé par la préparation de toute une panoplie de lois redéfinissant et criminalisant « le terrorisme » en Algérie. Ces loi ont notamment permis de classer comme organisations terroristes, Rachad et le MAK. Des mandats d’arrêt internationaux ont été lancés contre Farhat Mhenni et certains activistes du mouvement Rachad.
La France, le dérapage de Macron
On sait toujours pas ce qui a pris Macron de s’en prendre à l’histoire de l’Algérie, à ses dirigeants, et à son système qu’il a qualifié de « politico-militaire », avant de lancer toute une campagne diplomatique pour renouer les relations « amicales » avec Alger.
Le fait est que toute la classe politique en Algérie et en France s’est saisie de cette affaire, et chacun l’avait instrumentalisé à sa guise. En Algérie, les islamistes, ainsi que les arabisants, se sont fait une joie de déclarer la guerre contre la langue Française, tandis qu’en France, dans un contexte de campagne électorale, l’extrême droite s’en est pris comme jamais aux immigrés.
Le Drian, plus d’un mois après, a atterri à Alger. Il a eu un accueil discret, mais son opération, rapide, bien préparée, semble avoir eu le résultat escompté, vu que le dérapage de Macron fait déjà partie des oubliettes.
Une année aux multiples enjeux politiques
Cette année 2021 a été le théâtre de deux élections. Alors que les législatives ont presque été unanimement boycottées, les élections locales, des APC et APW, ont été pour le moins sujet à débat. Ce qui a été en soi une bonne chose, c’est que de parts et d’autres, il y a avait des gens qui ont affiché du respect aux opinions contraires aux leurs.
L’exemple le plus frappant est peut-être celui du FFS, qui malgré le refus catégorique de sa base militante, a choisi d’aller au bout du processus électoral de ce scrutin du 27 novembre dernier. Le parti, malgré la crise qu’il a traversée, reste debout. Son éternel rival, le RCD, qui a choisi lui de boycotter, a fait preuve de respect envers son adversaire historique. Aucune insulte ni accusation déplacée n’ont été émises.
Il faut aussi citer le cas du PT, de Louiza Hanoune, qui a choisi de laisser libre choix à ses militants. Le Parti Travailliste a « décidé de faire descendre la discussion autour de la question des élections dans les rangs du Parti et avec les citoyens, à la lumière des développements dans le pays ».
L’année de tous les périls sociaux ?
On ne peut parler du PT sans parler du péril social contre lequel Louiza Hanoune met en garde à chaque sortie médiatique. 2021 a été l’année ou le chômage a atteint des taux inquiétants, et ou le phénomène de la Harga a pulvérisé tous les records.
Autre manifestation du péril et de la dislocation du tissu social, les féminicides ; le pays en a recensé 55 en 2021. Il y’en a sûrement plus, tout comme les vols, les meurtres, les agressions, ainsi que les accidents de voitures, qui témoignent tous d’un civisme en berne.
D’énormes quantités de drogues ont été également saisies. Pilules par centenaires, poudre blanche flottant en mer, et herbe passant les frontières. La drogue range la jeunesse algérienne de l’intérieur. Une jeunesse qui reporte, d’une année à l’autre sa délivrance.
2021 : le combat continue
Il ne faut pas oublier qu’outre ceux qui se réfugient dans la drogue, il y a aussi ceux qui se battent pour leurs acquis sociaux. Cette année a été marquée par les marches organisées par les agents de la protection civile. Des dizaines de pompiers ont été licenciés suite à ces manifestations, mais leurs voix a été entendue, et leur combat renaitra ailleurs.
L’année 2021 a été par ailleurs marquée par la détermination des travailleurs de Numilog, de ceux de l’ETRHB, mais aussi de ceux de l’ENIEM et surement de plusieurs autres travailleurs qui ne demandent rien de plus que leurs droits, parfois les plus élémentaires.
Il est à noter que le pouvoir d’achat du travailleur algérien moyen menace de plus en plus de ne pas lui permettre de boucler sa fin du mois. Une situation grave qui porte atteinte à la valeur du travail au sein du pays, base de tout développement économique.
On ne peut parler de combat sans évoquer ceux démocratiques que mènent des partis tels que le PST et UCP qui sont menacés de dissolution, et des associations qui ont œuvré pour un développement politique et culturel pendant de longues années, comme c’est le cas de RAJ et de SOS Bab El Oued qui ont été dissoutes.
Économie : dans l’attende de la relance
Cette année, il y a eu un nouveau ministre à la tête du gouvernement. Aymen Benabderahme a remplacé Abdelaziz Djerad, qui a été nommé ambassadeur en Suéde. Ce qui est notable, c’est que le premier ministre actuel a pu garder sa valise de ministre des Finances.
Aymen Benabderrahmane, premier ministre et ministre des Finances, a dès le début affirmé qu’il voulait miser sur une relance économique. Une mini-révolution industrielle et financière serait en marche. Des grandes promesses ont été faites, et des chiffres de croissance économique ont été agités par le gouvernement puis confirmés par des instances monétaires internationales telles que le FMI et la Banque Mondiale.
C’est une croissance de 4.1 % à la fin de cette année 2021 que va connaître, l’économie algérienne selon le premier ministre qui affirme que l’Algérie est « une exception », vu le contexte sanitaire, dans la région, mais aussi au niveau mondial.
Toutefois, cette relance économique n’a pas encore donné ses fruits pour la classe populaire qui est de plus en plus en souffrance, et à qui se voir couper les subventions à partir de 2022. Le « ruisselement » se fait donc attendre.
Car au-delà des promesses de relances, il y a la certitude de la fin des subventions et des transferts sociaux, qui risque, dans l’absence de statistiques fiables et précises, de reléguer le citoyen algérien sous le seuil de la pauvreté.
2021, le foot comme anesthésiant ?
Le meilleur pour la fin. Mais s’agit-il vraiment d’une bonne chose que le football soit la seule chose qui puisse faire plaisir au citoyen algérien ?
Ce qu’a fait Belmadi d’une sélection nationale qui était au bord du gouffre mérite amplement des applaudissements, mais pas qu’on ferme les yeux sur la situation du football professionnel au niveau local, et d’un point de vue plus global, de la situation générale du pays.
Le football, et plus précisément les matchs de l’équipe nationale sont devenus une sorte d’anesthésiant qui confirme la douleur à laquelle est livrée la société algérienne.
Ceci dit, le parcours sans défaite de l’équipe nationale, dont le record d’invincibilité côtoie ceux du Brésil et de l’Italie, ne peut être qu’une source de fierté pour l’ensemble du peuple.
Après la Coupe Arabe, c’est une véritable compétition qui attend les Fennecs cette fois. Il s’agit de la Coupe d’Afrique des Nations. La plus prestigieuse compétition au niveau du continent noir, et une des meilleures au niveau mondial, ce qui va permettre aux algériens de renouer avec leurs racines africaines que l’on a tendance à négliger.