Si certains étudiants se plaignent du manque d’encadrement, les enseignants, mal rémunérés et surtout mal considérés, se disent également délaissés et mal considérés par la société.
Qu’est devenu l’étudiant aujourd’hui ? Quelle est sa place dans la société ? Autant de questions qui méritent d’être posées à l’occasion de la Journée nationale de l’étudiant.
Si à l’époque, cette date mémorable signifiait l’entrée des étudiants algériens dans l’action révolutionnaire, aujourd’hui elle signe, malheureusement, le divorce entre l’étudiant et son environnement. Enseignants et étudiants sombrent dans la passivité et l’inaction. Fini le temps où l’université algérienne était un fleuron, une source productrice de cadres pour les besoins de la société.
Tout le monde le reconnaît, l’étudiant en premier lieu, le niveau de l’universitaire est en dégringolade : manque de connaissances scientifiques, déficit de culture générale, lacunes linguistiques. L’étudiant est plus intéressé par l’obtention d’un diplôme pour accéder au marché du travail que par la qualité de la formation.
Comment est-on arrivé à cette situation ? Faut-il incriminer l’étudiant ou l’enseignant ? La réponse est certainement les deux. De nombreux spécialistes et cadres dans l’enseignement supérieur assurent que la dégradation du niveau de l’université algérienne est due aux mauvaises conditions sociopédagogiques mises en place pour l’enseignement supérieur.
A commencer par le volet pédagogique. Malgré les sommes colossales dépensées dans la construction d’universités et de résidences, tout le monde s’accorde à dire que les moyens humains et matériels mis en place par l’Etat sont insuffisants.
L’université n’est plus un terrain propice pour la récolte des connaissances et du savoir-faire. Insécurité, amphithéâtres surchargés, des années universitaires bâclées, bureaucratie, enseignement de mauvaise qualité, c’est dans ce triste milieu qu’évoluent des milliers d’étudiant et d’enseignants.
«On n’a plus de motivation à étudier ou à faire des recherches. Quand on met les pieds à la fac, on a l’impression qu’on est est dans un douar. Il nous arrive de nous entasser à 40 étudiants dans une salle de cours de fortune. L’administration ne se soucie guère du calvaire qu’endurent les étudiants.
Quant aux enseignants, ils font tout pour bâcler le programme sans prendre en compte la qualité de la formation qu’ils assurent aux étudiants», se désole une étudiante en quatrième année de journalisme. «Heureusement que c’est ma dernière année d’études.
Je ne peux supporter plus que ça. Je sais que finir les études n’est pas le bout de tunnel puisque le chômage nous guette au virage, mais mieux vaut le stress et l’ennui du chômage que cette misère», enchaîne-t-elle.
Les enseignants partagent aussi le même avis que leurs étudiants. «De plus en plus on a des étudiants qui n’ont plus envie de briller ou au moins étudier. L’étudiant d’aujourd’hui ne cherche que le diplôme et ne pense qu’à quitter l’université sans les acquis nécessaires lui permettant d’avoir une chance d’insertion. Le diplôme est devenu un but en soi au détriment de la qualité de la formation.
A la correction des sujets d’examen, des étudiants viennent de partout pour demander qu’on leur augmente leurs notes, alors qu’ils ne font aucun effort pour améliorer leur niveau», atteste un enseignant de littérature arabe à la Faculté centrale.
Désorientés et sans repères, les étudiants passent les pires années de leur vie à l’université. Si certains étudiants se plaignent du manque d’encadrement, les enseignants, mal rémunérés et surtout mal considérés, se disent également délaissés et mal considérés par la société.
Ces derniers, en raison de la dégradation de leur niveau de vie, préfèrent mettre leurs compétences au profit d’autres pays. Le problème de transport, d’hébergement ou de restauration n’est toujours pas résolu.
Il suffit juste de faire un tour aux cités universitaires pour confirmer ce constat. Entassés dans des chambres étroites, les étudiants sont confrontés à de nombreuses difficultés dans les résidences universitaires. La restauration est d’ailleurs le point noir de ces structures. Relevée récemment à 4 050 DA par trimestre la «petite» bourse, offerte trimestriellement, ne suffit plus aux étudiants pour subvenir à leurs besoins élémentaires.
H. L.