5é Mandat: Bedoui aux premières lignes

5é Mandat:  Bedoui aux premières lignes

Il ne se passe pratiquement pas une seule semaine, depuis des mois, sans que le ministre de l’Intérieur, des Collectivités locales et de l’Aménagement du territoire, Noureddine Bedoui, ne préside à une grande activité politique ou à une visite à l’intérieur du pays. Des visites qui, en tous points de vue, rappellent celles qu’effectuait, entre 2012 et 2014, l’ancien Premier ministre Abdelmalek Sellal.

Kamel Amarni – Alger (Le Soir) – Sellal, pour rappel, avait, à l’époque, outre la mission de diriger le gouvernement, avec de larges prérogatives, celle de préparer et de mener la précampagne puis la campagne électorale pour le quatrième mandat de Abdelaziz Bouteflika. Exactement comme ce dernier procédait, en s’investissant lui-même, occupant et saturant le terrain politique et médiatique, par des visites incessantes à travers toutes les wilayas, des mois durant, et ce, à l’approche des présidentielles de 2004 et 2009.

La promotion du programme et de l’image présidentiels, rien que cela, est le point commun à ces sorties, d’abord de Bouteflika lui-même, puis de Sellal et, enfin, de Noureddine Bedoui. Ce nouveau rôle dévolu à Bedoui qui n’est, pourtant, «que» ministre de l’Intérieur, est d’autant plus flagrant qu’en même temps, celui qui est, naturellement, appelé à effectuer une telle mission, en l’occurrence le Premier ministre Ahmed Ouyahia, est de moins en moins « visible».

A peine deux petites visites, l’une à Arzew, l’autre au Sud pour Ouyahia depuis son retour à la chefferie du gouvernement, il y a de cela presque une année. Pas de grandes apparitions publiques, pas de grandes déclarations politiques non plus pour celui qui, pourtant, est au cœur du pouvoir depuis le début de la décennie quatre-vingt-dix. Un homme qui est censé, de par cette longue expérience, la maîtrise des dossiers et la proximité avec le sommet du pouvoir et, enfin, de par la fonction, faire office de vrai porte-voix du pouvoir, celui qui compléterait les apparitions occasionnelles de Bouteflika.

Au contraire, Ouyahia est, volontairement, réduit depuis des mois à des apparitions protocolaires alors que «son» ministre de l’Intérieur occupe tout l’espace médiatique et politique, effectuant des visites officielles, au nom du gouvernement, parfois même à la tête de délégations de membres du gouvernement, touchant à tous les secteurs et parlant toujours au nom de l’Etat. C’est en véritable Premier ministre bis qu’il apparaît lors de ces visites à l’intérieur du pays ou même en présidant à des activités dans la capitale.

Ce nouveau statut de Bedoui, qui incarne depuis quelque temps la voix officielle du pouvoir, s’en trouve d’ailleurs considérablement renforcé depuis la disparition de l’encombrant directeur général de la Sûreté nationale, le général-major Abdelghani Hamel qui faisait souvent de l’ombre ou entrait en conflits ouverts avec les ministres de l’Intérieur, à l’exception de Zerhouni.

Durant l’année 2017, un autre «modeste ministre», celui de l’Habitat qu’était Abdelmadjid Tebboune, connaissait une ascension fulgurante, au point de faire de l’ombre, lui aussi, à son Premier ministre d’alors, Abdelmalek Sellal, parlant au nom du gouvernement et de l’Etat et ne rendant compte qu’au patron d’El-Mouradia ! C’est d’ailleurs le cas actuellement de Noureddine Bedoui.

A l’évidence, Bouteflika, qui hésitait, en août 2017, à nommer ce sobre ancien wali comme Premier ministre, l’a toutefois, d’ores et déjà, chargé de mener la précampagne de l’Etat, pour le cinquième mandat.

Comme en 2004, en 2009 et en 2014, le choix pour une telle mission se porte sur un «fonctionnaire», ancien wali comme Sellal et, surtout pas un politique, un chef de parti de surcroît comme Ahmed Ouyahia. Cela s’explique par la méfiance légendaire de Bouteflika qui ne laisse aucune tête émerger de l’intérieur du pouvoir. Chez lui, est considérée comme faute grave toute ambition présidentielle, avouée ou cachée, de tous ceux qui l’entourent au sein du pouvoir. C’est ce qui avait valu d’ailleurs leurs postes à Tebboune, Sellal, Belkhadem et bien d’autres…

K. A.