En pleine tempête de neige, les derniers habitants de la partie est d’Alep quittent au compte-gouttes la ville assiégée. Les opérations, qui devaient se terminer ce mercredi, pourraient être prolongées en raison de la météo.
Plus d’un millier d’habitants du réduit rebelle d’Alep ont été évacués au compte-gouttes ce mercredi en raison d’une tempête de neige qui a ralenti la sortie des convois de la deuxième ville de Syrie, en passe de tomber totalement aux mains du régime. Depuis le début des évacuations, le 15 décembre, des civils et des insurgés souhaitant quitter la ville, les opérations se font à un rythme irrégulier et plusieurs milliers de personnes attendent toujours de sortir de la dernière poche rebelle.
La fin des évacuations d’Alep permettra au régime de Bachar el-Assad de signer sa plus grande victoire depuis le début d’une guerre dévastatrice qui a fait, depuis 2011, plus de 310.000 morts et poussé plus de la moitié de la population à la fuite. Après un arrêt de 24 heures, «20 bus transportant des hommes armés et leurs familles» ont quitté la ville en direction des territoires sous contrôle rebelle à l’ouest de la métropole, a annoncé la télévision d’État. Ce convoi transportait au moins 1500 personnes dont 20 blessés, selon Ahmad al-Dbis, chef d’une unité de médecins et de volontaires qui coordonnent les évacuations à Khan al-Assal, point d’accueil en zone rebelle. Le nombre de personnes qui restent à l’intérieur de la poche rebelle n’est pas clair pour l’instant.
21/12. 1er jour d'hiver. La neige tombe sur les champs d'oliviers. Frontière turco-syrienne. Fin d'année glaçante pour les réfugiés syriens. pic.twitter.com/yTspnZpku1
— Delphine Minoui (@DelphineMinoui) 21 décembre 2016
De nombreux retards
Dans le même temps, une source militaire syrienne a dit s’attendre à ce que l’évacuation des derniers habitants d’Alep s’achève ce mercredi, mais les retards répétés et la météo laissent planer le doute sur ce scénario. Sous une neige qui tombait en abondance, plusieurs bus ont traversé Ramoussa, un quartier périphérique gouvernemental par lequel transitent les évacués. «Les bus ne sont pas chauffés. Les passagers, femmes, enfants et personnes âgées souffrent du froid. Ils n’ont ni nourriture ni eau», a mis en garde
Ahmad al-Dbis. Le directeur pour le Moyen-Orient du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) Robert Mardini a tweeté que «les conditions climatiques sont difficiles et les gens sont épuisés». «Tous les blessés et les malades dans un état critique ont été évacués d’Alep ces derniers jours», a précisé une porte-parole du CICR, Ingy Sedky.
I – Alep: selon une source humanitaire sur place, les dernières évacuations, celles des combattants, devraient se terminer d'ici demain.
— Georges Malbrunot (@Malbrunot) 21 décembre 2016
Les habitants démunis avaient attendu dans le froid leur évacuation après avoir vécu des mois de siège et de bombardements du régime qui ont réduit en ruines le réduit rebelle. Plus de 25.000 personnes, rebelles et civils, ont déjà pu quitter la métropole septentrionale d’Alep, avait indiqué mardi le CICR, précisant que «des milliers» d’autres attendaient encore d’être évacués. Une source militaire a par ailleurs expliqué que le retard dans les évacuations ces dernières 24 heures était une nouvelle fois dû à la nécessité de «synchroniser» les sorties d’Alep avec celles des villages chiites de Foua et Kafraya, assiégés par les rebelles dans la province d’Idleb, voisine de celle d’Alep.
Des observateurs attendus en Syrie
Les bus destinés à évacuer les civils d’Alep.
Après un vote à l’unanimité du Conseil de sécurité de l’ONU, le régime syrien et d’autres parties sur le terrain ont accepté le déploiement de 20 observateurs «nationaux et internationaux» pour superviser les évacuations, selon un porte-parole de l’ONU. Avec cette résolution, l’objectif de la France est «d’éviter un nouveau Srebrenica», ville de Bosnie où fut commis en 1995 le pire massacre en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale, a dit l’ambassadeur français François Delattre, alors que l’ONU et des ONG internationales avaient fait état d’atrocités qu’aurait commises le régime dans les secteurs reconquis à Alep. L’accord d’évacuation a été parrainé par la Russie et l’Iran, alliés indéfectibles du régime Assad, ainsi que par la Turquie, soutien de la rébellion.
Ces trois pays semblent avoir pris la main dans le dossier syrien, après avoir écarté les États-Unis et les Occidentaux de leurs efforts et de leur réunion la veille à Moscou. Ils se sont ainsi dits, après leur rencontre, favorables à un cessez-le-feu «élargi» en Syrie et prêts à être les «garants» de pourparlers de paix que l’ONU a dit préparer pour février à Genève.