Pour l’heure, même si l’élection du 4 juillet suggérée par le régime en place est maintenue, il n’y a aucun candidat visible à quatre jours du délai réglementaire de dépôt des candidatures.
Si l’on en croit les décomptes du gouvernement, il y aurait un peu plus de 70 candidats à l’élection présidentielle du 4 juillet. Un listing qui ne tient pas compte, bien évidemment, du consentement du Conseil constitutionnel qui sera appelé à tamiser les échantillons. On n’en est pas encore là, même si la date butoir pour le dépôt des dossiers de candidature est, du point de vue réglementaire, fixée pour le dimanche 19 mai, soit 45 jours avant la date prévue pour les élections. Exception faite du parti El-Moustaqbel d’Abdelaziz Belaïd, qui a pris option ouvertement en faveur de la tenue des élections, aucune autre formation politique n’a pris franchement position en faveur du processus suggéré par le régime.
Du moins officiellement. Il pourrait, néanmoins, y avoir un candidat FLN, RND, TAJ et/ou MSP qui pourrait s’être déclaré “clandestinement” auprès des services du ministère de l’Intérieur. Ces partis, traditionnellement acquis aux initiatives du pouvoir, n’hésitaient pourtant pas à mener leur campagne, tambour battant, avant même que la saison des candidatures ne soit ouverte. Ils ne peuvent ignorer désormais qu’ils vont sur un terrain hostile, étant donné que le mouvement populaire de grande ampleur amorcé depuis le 22 février dernier rejette dans le fond et dans la forme toutes les initiatives de sortie de crise proposées par le régime. L’élection du 4 juillet en est une. Elle serait l’unique issue à l’impasse politique, selon ses promoteurs, de surcroît tous issus du régime bâti par les Bouteflika pendant les vingt dernières années.
Tous les partis de l’opposition évoquent la difficulté de mener une transition dans le strict respect de ce qui est prévu par la Constitution. Pour eux, la solution est plus politique que constitutionnelle, mais les décideurs semblent n’entendre que leur propre voix. Et, dans cette dernière ligne droite avant la publication par le Conseil constitutionnel de la short list des candidats admis au prochain scrutin, les grands partis à la fois de l’opposition et de l’allégeance sont soit carrément absents, étant donné que ces joutes sont contraires à la volonté populaire, soit passés dans la clandestinité en attendant le coup de sifflet du maître.
L’ambition présidentielle, bien qu’elle soit nourrie par plus d’un, a été réduite à sa plus simple expression par le mouvement du 22 février qui pose, comme condition sine qua non à l’amorce d’une véritable transition, le départ des figures de l’ancien régime. Mais pour l’heure, même si l’élection du 4 juillet suggérée par le régime en place est maintenue, il n’y a aucun candidat visible à quatre jours du délai réglementaire du dépôt des candidatures. Les deux piliers du régime finissant, le FLN et le RND en l’occurrence, sont en proie à des luttes intestines, alors que les deux autres formations de l’Alliance sont dans l’expectative et dans l’attente des suites que connaîtra cette série d’attaques judiciaires enclenchée au nom de la lutte contre la corruption et la mauvaise gestion des deniers publics.
C’est dire que politiquement et techniquement, les conditions de l’organisation d’une élection présidentielle ne sont pas réunies. Outre l’absence de candidats officiellement déclarés, le puzzle électoral ne peut être reconstitué faute d’un électorat dont la position est clairement affichée chaque vendredi à travers les manifestations de rue rejetant à la fois le scrutin du 4 juillet et ses promoteurs. Même avec un Noureddine Bedoui qui connaît par cœur le secret d’une organisation électorale sur mesure, il est pour le moins difficile d’administrer ce scrutin après la défection ouvertement assumée des magistrats et des maires. Ces derniers, malgré les menaces et les pressions de leur tutelle, ont dit soutenir la révolution populaire qui réclame sans relâche une transition en dehors des circuits délimités par le pouvoir. L’élection est ainsi comme définitivement compromise. Et dans cette dernière partie la plus intense de l’épreuve constitutionnelle, un quelconque passage en force pourrait mener à des dérives plutôt périlleuses.
Ali Titouche