Le procès a tenu en haleine les responsables locaux et la population
Dans tous ses questionnements, le juge a, à plusieurs reprises, mis les accusés au pied du mur en leur posant des questions les engageant.
Deux années de prison ferme suivies d’une amende de 200.000 DA. Tel a été le réquisitoire formulé en fin de journée de dimanche dernier par le procureur près le tribunal d’Es Senia à l’encontre du maire, trois élus locaux, le secrétaire général et le responsable du suivi technique des projets de la commune de Mers El Kebir, localité rattachée administrativement à la daïra d’Aïn El Türck.
Les mis en cause, jugés tout le long de la journée de dimanche, sont accusés d’avoir conclu des transactions douteuses en violation du Code des marchés, malversations, mauvaise gestion des affaires de la commune et dilapidation des deniers publics.
La même sentence a été recommandée par le représentant du ministère public à l’encontre d’un entrepreneur cité, lui aussi, dans la même affaire. Celle-ci est mise en délibéré.
Le verdict sera rendu le 24 du mois en cours. Le procès qui a tenu en haleine les responsables locaux de la commune de Mers El Kebir et plusieurs autres élus locaux ainsi que des curieux venus assister au procès, a été riche en informations. En effet, le juge, ayant pris le dossier en main, s’est ingénié dans ses interrogations en recherchant la vérité. Ayant cerné la problématique sous tous ses angles, le juge est apparu, contre toute attente, un féru de la lutte contre la corruption et les malversations, notamment lorsqu’il s’agit de la dilapidation des biens et deniers publics. Il a donc abordé son sujet en douceur faisant croire que l’affaire était toute simple à traiter avant de passer aux questions qui fâchent. Ceux qui le connaissent, notamment les robes noires, savaient à l’avance que le juge était loin de bâcler le procès qu’il présidait. Dans tous ses questionnements, il a, à plusieurs reprises, mis les accusés au pied du mur en leur posant des questions les engageant. Ces derniers ne trouvaient souvent rien à répondre que de se résigner à des réponses tantôt évasives et souvent se référant à des répliques toutes «farfelues, anachroniques et désuètes». Dans la majeure partie des situations, les mis en cause résumaient leur situation en plaidant leur innocence. Ils présentaient dans leurs «remords» des visages crispés. Etant convaincus qu’ils ne s’étaient pas retrouvés devant le juge suite à un simple fait du hasard, ils tentaient eux aussi de fuir les «griffes» du juge. Mais, leur cas constituait un fait accompli étant donné qu’ils avaient été accablés aussi bien par les rapports et les enquêtes des services de sécurité que par les rapports de la chambre d’instruction.
Le juge ne s’empressa pas d’ailleurs dans la procédure, sachant fort probablement qu’il arriverait à la conclusion qu’il recherchait après avoir emprunté plusieurs voies dans sa quête de vérité. Les accusés, défilant l’un après l’autre devant la barre, ont tenté tant bien que mal de se démener. Sans grand résultat dès lors que le juge reformulait son intervention sous un autre angle avant d’atteindre son objectif.
Cette affaire repose sur des malversations constatées et confirmées par les services de sécurité de la daïra d’Aïn El Turck. Ces derniers avaient enquêté sur plusieurs dépassements orchestrés par des représentants locaux de Mers El Kebir dans le cadre des projets de développement local, à commencer par l’émargement porté par le maire sur le procès-verbal de livraison d’un projet alors que le Code des marchés interdit une telle action avant que le contrat ne passe par plusieurs étapes. Plus loin encore, le maire a conclu la transaction de plusieurs millions de dinars en accordant le marché à l’entrepreneur accusé sans pour autant juger utile de consulter les membres de la commission des marchés.