Adoptée par le Sénat, une nouvelle loi pourrait interdire aux sans-papiers de se marier en France

Adoptée par le Sénat, une nouvelle loi pourrait interdire aux sans-papiers de se marier en France

Le Sénat français a voté, ce jeudi 20 février, une proposition de loi visant à interdire le mariage lorsque l’un des époux est en situation irrégulière sur le territoire. Soutenu par le gouvernement, ce texte controversé doit encore être examiné par l’Assemblée nationale et risque une censure du Conseil constitutionnel.

Portée par le sénateur centriste Stéphane Demilly, cette proposition de loi a pour objectif affiché de lutter contre les mariages de complaisance permettant à un étranger en situation irrégulière d’obtenir un titre de séjour ou la nationalité française. 

Initialement formulé en une seule phrase – « le mariage ne peut être contracté par une personne séjournant de manière irrégulière sur le territoire national » – le texte a été modifié par les sénateurs pour éviter une éventuelle censure du Conseil constitutionnel.

Désormais, les futurs époux de nationalité étrangère devront fournir à l’officier d’état civil tous les documents nécessaires permettant d’évaluer leur situation administrative.

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De plus, le procureur de la République disposera d’un délai allongé pour examiner les dossiers suspects : deux mois renouvelables au lieu d’un seul. 

Autre changement majeur, l’absence de réponse du procureur signifiera un refus implicite, alors qu’auparavant, elle équivalait à une validation du mariage.

Un risque d’inconstitutionnalité

Si cette mesure a été largement soutenue par la droite et le centre, ainsi que par le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, elle suscite de vives critiques à gauche. 

Les écologistes et certains socialistes dénoncent « une aberration juridique », rappelant que la liberté du mariage est un droit fondamental.

Le Conseil constitutionnel avait d’ailleurs rendu un avis en 2023 affirmant que le simple fait d’être en situation irrégulière ne pouvait, à lui seul, justifier une interdiction de mariage. Pourtant, le ministre de la Justice estime qu’il est légitime de « reposer la question » à la lumière de l’évolution de la société.

Une efficacité contestée

À Mayotte, où les unions entre citoyens français et étrangers sont fréquentes, certains habitants doutent de l’efficacité de cette loi. 

« Je ne pense pas que ça marchera ici », confie une Mahoraise, comparant la situation à la polygamie, interdite par la loi, mais encore pratiquée dans les faits.

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Le texte doit désormais être examiné par l’Assemblée nationale, où il pourrait faire l’objet d’âpres débats. 

Son adoption définitive pourrait aussi être suspendue à un recours devant le Conseil constitutionnel, qui devra trancher sur sa conformité avec les principes fondamentaux du droit français.