Affaire autoroute Est-Ouest , Suspicion sur l’Organe de lutte contre la corruption

Affaire  autoroute Est-Ouest , Suspicion sur l’Organe de lutte contre la corruption

L’Organe national de prévention et de lutte contre la corruption qui vient tout juste d’être installé suscite déjà de multiples interrogations. Si la question de ses prérogatives a déjà été largement évoquée par la presse, c’est aujourd’hui sa composante même qui laisse les observateurs avertis pour le moins circonspects.

Et c’est le scandale de l’autoroute Est-Ouest qui vient s’inviter au cœur même de l’organe destiné à prévenir et à combattre la corruption. En effet, il se trouve que l’un des membres désignés par Abdelaziz Bouteflika a dans sa famille la plus proche des éléments directement impliqués dans le dossier de justice relatif au scandale de l’autoroute.



Ainsi, l’ex-directeur de la planification et de la coordination au ministère des Transports, Salim Rachid Hamdine, actuellement incarcéré, se trouve être le gendre d’un membre important de l’organe anti-corruption, en l’occurrence M. Abdelkrim Gheraïeb. Le gendre de M. Gheraïeb, qui est en prison à Serkadji depuis plusieurs mois, est accusé de «malversation et de corruption». Il lui est reproché d’avoir joué un rôle central dans cette affaire en fournissant des informations de premier plan à l’homme d’affaires Sid Ahmed Addou.

Ce dernier lui versait en contrepartie des commissions conséquentes. C’est ce même Addou qui s’est chargé de dénoncer Salim Rachid Hamdine aux enquêteurs. D’ailleurs, Addou ne s’est pas contenté de «balancer» son ancien complice puisqu’il a également déclaré avoir remis de l’argent aux trois filles de Abdelkrim Gheraïeb. Le businessman a fourni aux enquêteurs des détails très précis, notamment des numéros de comptes bancaires ouverts par les filles Gheraïeb à Genève. Selon certaines sources, les concernées ont été entendues en qualité de témoins par le juge d’instruction de la 9e chambre du Pôle criminel spécialisé du tribunal d’Alger. Dans cet imbroglio, Sid Ahmed Addou s’en sort plutôt bien malgré les multiples charges retenues contre lui. Placé en détention préventive le 7 octobre 2009, il a finalement été remis en liberté le 11 novembre 2010 sur ordonnance du magistrat instructeur suite à un appel introduit par le parquet.

Certains cercles laissent même entendre qu’une puissante zaouïa de l’ouest aurait pesé de tout son poids auprès des «plus hautes autorités» du pays pour intercéder en faveur de Sid Ahmed Addou. Dès lors, se pose une question essentielle : un membre important de l’Organe de lutte contre la corruption peut-il supporter une telle proximité avec l’un des scandales les plus importants depuis l’indépendance du pays ? L’ancien diplomate et ancien président de l’Amicale des Algériens en Europe s’est mis de fait dans une position délicate.

Toutes ses activités au sein de l’Organe, si celui-ci venait à se saisir d’un dossier comme celui de l’autoroute Est- Ouest, seraient entachées de «suspicion légitime », pour paraphraser le langage des avocats. M. Gheraïeb qui a, il y a quelques années, échoué à devenir président de l’Assemblée nationale, a été mis dans une situation plus qu’inconfortable par le président Bouteflika qui, en voulant forcer les choses, et par extension, place l’organe de prévention et de lutte contre la corruption dans un environnement de doute sur ses véritables objectifs, et ceci dès sa naissance.

T. H.