PARIS – L’historien Benjamin Stora a affirmé jeudi, que la reconnaissance de la responsabilité de l’Etat français dans l’assassinant, en juin 1957, du militant algérien Maurice Audin, « laissera une trace ineffaçable ».
La présidence française a indiqué jeudi dans un communiqué, que le président Emmanuel Macron va reconnaître que Maurice Audin est « mort sous la torture du fait du système institué alors en Algérie par la France ».
L’Elysée a ajouté que le chef d’Etat français remettra une déclaration à la veuve de Maurice Audin et annoncera « l’ouverture des archives sur le sujet des disparus civils et militaires, français et algériens ».
Benjamin Stora n’a pas écarté, dans une tribune publiée par Le Monde, que cette déclaration « fera pousser des cris, dans la droite extrême, de ceux qui diront qu’il s’agit là de +repentance+, et qu’il ne faut pas évoquer la face d’ombre du passé français », ajoutant que pour « l’immense masse » de ceux qui ont vécu le temps de la colonisation, « elle laissera une trace ineffaçable ».
Pour l’historien, cette déclaration du président Macron « n’est pas un verdict définitif à propos de la guerre d’Algérie. Elle dit des faits, déjà établis par les historiens, maintient ouverte la porte des controverses citoyennes pour sortir de la rumination du passé et des blessures mémorielles, encourage les acteurs et témoins à parler de leurs souffrances ».
Pour les historiens, elle recrée, a-t-il ajouté, les outils d’un travail de mémoire « jamais clos », en soulignant aussi la nécessaire ouverture, des deux côtés de la Méditerranée, des archives de la Guerre d’Algérie ».
Pour sa part, Sylvie Thénault, historienne et directrice de recherche au CNRS, a considéré dans une tribune publié également par Le Monde que cette déclaration est une « libération » d’abord pour la veuve Josette et ses enfants.
« Que la vérité reste à établir n’empêche pas l’essentiel: Maurice Audin est mort du fait de militaires agissant dans un cadre d’exception qui, en tant que dispositif légal, implique les autorités politiques. Aussi, de l’armée à Alger, la chaîne des responsabilités remonte à Paris. La généralisation est logique, obligatoire », a-t-elle écrit.
Elle a indiqué que l’autre conséquence et non des moindres de cette généralisation possible à partir du cas de Maurice Audin, c’est que « la reconnaissance des responsabilités de l’Etat pose la question, en regard, des responsabilités individuelles dans ces tortures et disparitions ».
« En l’absence de poursuite pénale – l’amnistie de 1962 les en protège –, il resterait à chacun d’entre eux de procéder à son examen de conscience », a-t-elle souligné.