Le père de Mohamed Merah a mis sa menace à exécution lundi en déposant une plainte à Paris pour « meurtre avec circonstances aggravantes » visant implicitement la hiérarchie de la police française qui a ordonné l’assaut contre le « tueur au scooter ».
« C’est une plainte contre X pour meurtre avec circonstances aggravantes visant dans les faits des gens ayant donné des ordres à la tête de la police nationale » lors de l’assaut le 22 mars à Toulouse, a déclaré Me Isabelle Coutant-Peyre, qui assiste l’avocate algérienne du père de Mohamed Merah, Me Zahia Mokhtari.
Le père du « tueur au scooter », Mohamed Benalel Merah, avait annoncé fin mars son intention de porter plainte.
« Nous attendons de la justice française ni plus ni moins que de dissiper le flou qui entoure cette affaire », a déclaré Me Mokhtari. « Nous n’avons pas déposé cette plainte sans avoir de preuves. Nous avons des preuves que vous allez découvrir bientôt ».
Début avril déjà, elle avait dit détenir des preuves de « la liquidation » de Mohamed Merah par le Raid (unité d’élite de la police française), évoquant deux vidéos identiques de 20 minutes chacune, probablement filmées par Merah lui-même. Selon son entourage, Mohamed Merah aurait envoyé ces vidéos à l’aide de son iPhone à son père.
Me Coutant-Peyre a précisé lundi que ces vidéos seraient « mises à disposition des autorités quand elles en feront la requête ». Entre les 11 et 19 mars, Mohamed Merah, 23 ans, a froidement assassiné sept personnes: trois soldats parachutistes, trois écoliers et un enseignant juifs à Montauban et Toulouse. Il avait été tué le 22 mars lors de l’intervention des policiers du Raid dans son appartement à Toulouse, après 32 heures de siège.
« Vous avez 300-400 personnes surarmées et un type tout seul enfermé dans son appartement. Rien que ça suffit pour se poser des questions », a estimé lundi Me Coutant-Peyre.
Le patron du Raid, Amaury de Hauteclocque, avait cependant affirmé à l’AFP que ses hommes avaient « donné sa chance jusqu’au bout » à Mohamed Merah. « Si un assaut a été lancé, c’est par Merah », avait-il dit à l’AFP au lendemain de la mort du tueur, alors que le plan qu’il avait « validé, était un plan de reprise des lieux en sécurité pour s’assurer de M. Merah en vie ».
Assiégé par la police à partir du petit matin du mercredi 21 mars, Mohamed Merah avait rompu les négociations en soirée. « Il m’a dit +je suis un moudjahidine, je veux mourir les armes à la main, vous allez m’abattre et je suis très fier, très honoré de lutter contre le Raid, je vais essayer d'(en) tuer le plus possible+ », avait indiqué M. de Hauteclocque.
Selon lui, Mohamed Merah avait réorganisé son appartement « comme un terrain de guerre, avec obstruction de toutes les issues avec des meubles ». Retranché dans la salle de bain, il sera finalement abattu en montant « à l’assaut du Raid », selon M. de Hauteclocque.
Fin mars, Nicolas Sarkozy, alors président de la République, s’était déclaré « indigné » face à la volonté du père de Mohamed Merah de porter plainte. « Ces mises en cause de notre pays sont indécentes, elles sont indignes et elles ne resteront pas sans conséquence », avait-il déclaré.
Le ministre de l’Intérieur Manuel Valls a chargé la Direction générale de la police nationale (DGPN) et la Direction centrale du Renseignement intérieur (DCRI) d’une « étude très complète sur ce qui a dysfonctionné » dans l’affaire Merah car « nous sommes face à un échec: l’Etat n’a pas su ou pas pu protéger des Français ».