Dans un entretien accordé à nos confrères de l’APS, Mohamed Meziane, président-directeur général de Sonatrach, a avancé que la compagnie qu’il dirige est disposée à céder «jusqu’à 49%» de participations dans les périmètres des hydrocarbures où elle opère.
On peut céder, si c’est nécessaire pour notre stratégie, jusqu’à 49% de participations dans les blocs pétroliers proposées à la «cession d’intérêt» dans le cadre du deuxième appel d’offres national et international pour l’exploration des hydrocarbures, a-t-il détaillé.
La proportion de 49% est permise dans la nouvelle législation pétrolière en vigueur aujourd’hui
Il a également estimé que Sonatrach est en mesure de «maintenir son plan d’investissement national» axé sur le développement des gisements découverts, des capacités de transport et du raffinage au vu du niveau actuel des prix de pétrole et du cash flow dont disposent le groupe et les banques algériennes.
Quatre périmètres seulement sur les seize proposés à l’attribution ont été octroyés dans le cadre du premier appel d’offres international pour l’exploitation des hydrocarbures : cette situation est survenue dans le sillage de la crise économique mondiale qui a suscité les «craintes» chez les investisseurs, a expliqué le P-DG de Sonatrach dans cet entretien.
Et d’ajouter que «des discussions sont menées avec des compagnies opérant en Algérie et [que] celles-ci ont fait des suggestions liées au 2ème avis d’appel d’offres.
Selon Mohamed Meziane, les suggestions formulées par ces compagnies ont porté sur les «procédures» et les «critères» facilitant leur participation, et elles n’ont remis en cause ni la loi ni la réglementation en vigueur sur les hydrocarbures notamment en matière de fiscalité.
Le patron de Sonatrach s’est dit «optimiste» quant aux résultats du 2ème appel d’offres au regard du nombre «important» des compagnies qui participent aux data room et des «signes de reprise» économique mondiale qui «inciteraient » les sociétés à manifester plus d’intérêt pour les hydrocarbures.
Sonatrach projette d’ici à 2015, une production de «120 000 barils/jour» à partir des gisements qu’il développe à l’international.
C’est son P-DG qui l’a annoncé dans cet entretien. Elle prévoit aussi de tirer «150 millions de dollars par an» de ses investissements dans les services d’engineering et de construction consentis par ses filiales à l’étranger.
Pour Mohamed Meziane, la conjoncture économique mondiale actuelle a, certes, engendré une «baisse» de la demande d’énergie, mais ce n’est pas pour autant que nous allons «ralentir» notre cadence d’investissement en général et à l’international en particulier.
C’est, a-t-il expliqué, en période de crise que les «bonnes opportunités se présentent». Et c’est, a-til ajouté, en ce moment que certaines compagnies internationales, disposant de capacités propres de financement, «saisissent » les opportunités d’affaires favorables pour renforcer leur portefeuille et position sur le marché.
Le P-DG de Sonatrach a souligné que notre vision globale sur le développement à l’international «poursuivra l’objectif d’un déploiement pragmatique» de nos activités extérieures, qui prendra en considération le facteur du risque et les retombées économiques de projets.
Le groupe que dirige Mohamed Meziane est présent dans un ensemble de pays. Il l’est en Egypte, dans un projet en partenariat avec le norvégien Statoil, au Pérou dans le grand gisement de Camisea, en Libye, au Niger, en Tunisie, au Mali avec l’italien ENI et en Mauritanie avec le français Total.
Poussant ses ambitions plus loin, la compagnie nationale des hydrocarbures veut opérer au Venezuela et en Colombie.
Sonatrach a d’ailleurs relancé les négociations sur sa participation dans deux projets de GNL au Venezuela et a, en outre, manifesté son intérêt pour développer des gisements dans la riche région pétrolifère d’Orénoque, toujours selon son P-DG.
Au départ, la Sonatrach avait soumis une offre à la compagnie vénézuélienne PDVSA sur deux projets de GNL, mais les conditions d’attribution étant «draconiennes», elle n’a pu répondre à ces critères, a révélé Mohamed Meziane qui explique que les conditions exigées par la partie vénézuélienne ont porté notamment sur «le taux de participation» de Sonatrach dans ces deux projets gaziers, «les délais de réalisation» et le «niveau de financement».
Et d’ajouter que la participation qui nous a été proposée dans ces projets avait été fixée à «10%», avec un niveau de financement important et des conditions financières «un peu sévères».
Selon lui, les retombées et les avantages de ces projets «ne semblaient pas être très économiques» pour Sonatrach.
Cependant, poursuit-il, le groupe pétrolier algérien a relancé récemment la question de «sa participation au développement» de ces deux projets.
«Nous avons, a-t-il noté, reposé la question de notre participation dans ces projets, nous sommes en train de les étudier».
Pour ce qui se rapporte aux gisements pétrolifères dans la région d’Orénoque, Mohamed Meziane a rappelé que son groupe, activant dans l’extraction des bruts légers seulement, «ne dispose ni de la technicité ni de l’expérience lui permettant l’extraction des bruts lourds».
«D’où la nécessité de s’associer à d’autres partenaires dans pareils projets», a-t-il dit.
Et d’insister : «Nous sommes intéressés par l’investissement dans cette région. Notre approche stratégique pour le développement à l’international repose sur le partenariat afin de partager les risques et la technologie».
Le groupe Sonatrach est également intéressé par l’investissement en «Colombie et au Moyen-Orient, notamment en Irak», où des potentiels d’investissement existent, selon M. Meziane qui indique que la compagnie nationale des hydrocarbures cherche le cadre de son intervention dans ces pays.
En Afrique, Sonatrach est en train d’oeuvrer pour concrétiser le mégaprojet du gazoduc «TSGP» devant relier le Nigeria au continent européen.
Une rencontre entre les trois compagnies initiatrices du projet (Sonatrach, NNPC et Sonideb) a eu lieu récemment à Niamey (Niger) pour préparer les autres phases du projet.
La rencontre a porté notamment sur la participation du groupe algérien à l’amont de ce projet ainsi que sur les conditions du choix des nouveaux partenaires et les règles de commercialisation du gaz.
Les relations entre Sonatrach et l’UE ont été également abordées dans cet entretien.
Le P-DG de la compagnie nationale des hydrocarbures a d’abord souligné que l’Algérie est appelée à «conforter» sa place dans les années à venir sur le marché international des engrais du fait de la hausse de la demande mondiale des engrais, notamment des engrais azotés.
«Le risque existe toujours, a-t-il reconnu, mais «la demande en engrais n’est pas seulement une demande européenne, il y a une demande croissante dans d’autres régions du monde, en Amérique et en Asie».
A une question sur l’impact de la baisse des cours du brut sur le prix du gaz, Mohamed Meziane a indiqué que l’indexation des prix du gaz algérien varie selon les contrats gaziers signés avec les clients.
Le prix du gaz est indexé soit au pétrole, soit aux produits concurrents comme l’électricité, le charbon, le fioul, le gasoil, pour lui permettre de «pénétrer sur des segments» de marché où le pétrole est dominant, a-t-il dit.
Au chapitre des négociations en cours entre l’Algérie et l’UE pour la conclusion de l’accord stratégique énergétique, le premier responsable de Sonatrach a tenu à préciser que cette question est traitée au niveau du ministère de l’Energie et des Mines.
Toutefois, il a souligné qu’un pareil accord «met sur la table beaucoup de conditions et nécessite beaucoup d’analyses et d’efforts où chaque partie cherche à défendre ses intérêts».
Youcef Salami