Le constructeur français Peugeot partagera la réalisation de son projet en Algérie avec trois partenaires algériens, PMO Constantine, Condor et un grand importateur de médicaments.
La règle 51/49 imposée par le gouvernement algérien se décline dans le projet Peugeot à travers le partage des 51% de son capital global entre trois partenaires nationaux, un public et deux privés. Il s’agit en effet de l’entreprise publique PMO Constantine (Production de machines-outils, d’organes et de pièces), du groupe privé Condor spécialisé dans l’électroménager et d’un importateur de médicaments de Tlemcen. Détenteur en évidence de 49% du capital, le constructeur automobile français semble avoir choisi de partager son déploiement en Algérie avec deux promoteurs privés pour éviter certainement de ne pas bousculer «son schéma» de partenariat qu’il a édifié à travers le monde avec des opérateurs étrangers privés mais pas avec des Etats. L’on apprend ainsi que c’est la première fois qu’il accepte de s’associer avec l’Etat algérien en tant qu’actionnaire de l’entreprise publique PMO Constantine. Ce qui doit être sûr, c’est qu’avant de donner son aval à «cette association nationale», le groupe français a dû s’assurer de la solidité financière et des garanties de solvabilité de ses membres auprès des établissements financiers et bancaires.
Le constructeur automobile Peugeot sera probablement voisin à son concurrent Renault Algérie puisque sur les cinq sites proposés pour son implantation, le choix aurait été porté sur un, situé à peine à une dizaine de kilomètres des ateliers d’assemblage de la Symbol, qui se trouvent, pour rappel, à Oued Tlelat, dans la wilaya d’Oran. Ce choix n’aura rien de fortuit quand on sait que l’Algérie veut faire de cette partie de l’Oranie une zone réservée exclusivement à l’industrie automobile avec tout ce que cela suppose comme installations de PME nationales et étrangères productrices de pièces détachées et de tout ce dont aura besoin ce nouveau secteur d’activités. L’on pense d’ailleurs que des constructeurs automobiles chinois et italiens cherchent à monter eux aussi leurs usines en Algérie. Une délégation d’hommes d’affaires chinois pourrait venir à Alger ce mois de novembre ou décembre prochain pour s’imprégner «des modalités» nationales de partenariat dans ce domaine.
LES TROIS PHASES DU PROJET
Il semble que c’est dans l’optique de lancer et développer ce créneau que le gouvernement algérien a demandé à Peugeot de faire installer sur le même site de l’implantation de son usine quelques-unes de ses sociétés de fabrication de pièces détachées automobiles. Il est attendu qu’il ramène avec lui quatre sous-traitants qui en produiront, pour un premier temps, pour les besoins de la consommation locale et «progressivement» pour l’étranger. Lors de sa mission à Paris en octobre dernier, le ministre de l’Industrie et des Mines a déclaré en effet qu’une assiette de 25 hectares a été dégagée du côté d’Arzew pour les besoins de la sous-traitance.
Le projet de construction automobile tel que négocié entre les partenaires, se projettera, selon des sources qui lui sont proches, sur trois phases, une première -2017-2019- qui devra voir l’installation de l’usine et de ses sous-traitants avec un début de production de véhicules, une seconde -2019-2021- avec une augmentation de la cadence de production de véhicules et de pièces détachées et enfin une troisième qui va au-delà de 2021 «à partir de laquelle l’Algérie s’attend à ce que le taux d’intégration (de pièces produites localement) dans le véhicule Peugeot aura atteint près de 50% ». Il est alors annoncé que «le premier véhicule Peugeot-Algérie sortira en 2017, ceci si le pacte des actionnaires sera effectivement signé en janvier prochain». En bout de chaîne, il est prévu, nous précise-t-on, «à moyen terme une production de 50.000 véhicules pour en atteindre 75.000 deux ans après». Mais il est précisé que les capacités installées seront pour une production de 100.000 véhicules. «Ce qui ne signifie pas que ce chiffre sera atteint parce que les véritables chiffres seront fixés en fonction du marché local mais aussi étranger pour lequel l’on compte exporter près de 10% de la fabrication Peugeot locale», assure-t-on. L’Algérie pense par ce projet réussir à attirer les marchés de la région MENA (Afrique/Moyen-Orient) même si les usines françaises au Maroc pourront fortement contrecarrer ses visées et objectifs en la matière puisqu’elles tablent sur les mêmes marchés avec des taux de production de véhicules bien plus élevés (plus de 90.000 en 2019).
«PLUS ON INTEGRE, PLUS ON DEVIENT COMPETITIF»
Le constructeur français prévoit de fabriquer sur le site oranais le Pick-up, la C Elysée, la 301 et la 208. Mais pour l’heure, il semble tanguer entre les deux pays pour choisir qui des deux pourrait satisfaire ses visions de déploiement à travers la région MENA tout en sachant qu’il a déjà opté depuis longtemps de faire de l’Afrique du Sud et de l’Iran des pays pivots pour la production et la commercialisation de son label. L’Iran fabrique et commercialise la Peugeot 406 depuis plusieurs années déjà. Ce qui n’empêche pas les partenaires algériens de prétendre que «plus on intègre, plus on devient compétitif, plus on exporte.»
En tout état de cause, l’Algérie se targue avant toute chose de «monter» des partenariats sur la base d’un capital mixte par l’imposition de la règle 51/49. «Le Maroc, lui, accepte que des usines étrangères soient érigées chez lui en zones offshore (sans imposition d’aucune taxe) et avec un capital 100% étranger,» nous disent des spécialistes.
Le projet Peugeot-Algérie est exempt de taxes pendant 5 ans, «des avantages reconduits au cas où le partenaire étranger décide de son extension ou d’autres investissements importants,» est-il noté.
Mercredi dernier, les associés se sont rencontrés à Alger pour continuer à ficeler le projet. Ils se reverront certainement d’autres fois avant de signer le pacte des actionnaires. Il est dit qu’ «ils comptent le faire en janvier prochain au cours de la visite de Manuel Valls à Alger à l’occasion de la réunion du comité intergouvernemental de haut niveau qu’il présidera avec son homologue, Abdelmalek Sellal ». Reste qu’il est des actionnaires qui préfèrent ne pas forcer les choses et prendre le temps de négocier le moindre détail pour que la gestation du projet puisse arriver «normalement» à son terme.