L’expert en énergie, Saïd Beghoul, prédit que, lors de la réunion d’avril 2019, l’Opep pourrait probablement baisser encore plus sa production dans le but de ramener les cours à environ 70 dollars le baril.
Le président de l’Opep, l’Émirati Souhail Mohamed Al-Mazraoui, s’exprimant à l’occasion d’une réunion du conseil ministériel de l’organisation des pays arabes exportateurs de pétrole (Opaep) tenue hier au Koweït, a indiqué que si la baisse de production de 1,2 millions de barils par jour décidée début décembre dernier par l’Opep et ses alliés s’avérait insuffisante, les pays Opep et leurs partenaires vont se réunir en conférence extraordinaire et feront ce qu’ils estimeront nécessaire pour rééquilibrer le marché.
Il ne donne, toutefois, pas de date pour cette éventuelle rencontre. Présent également à la réunion du conseil ministériel de l’Opaep, le ministre de l’Énergie, Mustapha Guitouni, a déclaré qu’il restait confiant dans les fondamentaux du marché pétrolier, suite à la dernière décision prise par l’Opep et ses alliés. Il a ajouté que les effets de cette mesure vont être positifs sur le marché.
Selon Guitouni, la production de l’Opep sera nettement inférieure comparativement au niveau de production d’octobre 2018, car 21 des 24 pays Opep vont réduire volontairement leur production à partir de janvier prochain, alors que certains pays vont diminuer de manière plus importante la leur à cause du déclin naturel des gisements. Saïd Beghoul, expert en énergie, a, dans une déclaration qu’il nous a faite, estimé que tant que l’Opep ne porte pas la réduction de l’offre pétrolière à au moins 1,5 à 2 millions de barils par jour, les prix de l’or noir risquent de se retrouver bloqués autour de
60 dollars le baril. Et, de prédire que, lors de la réunion d’avril 2019, l’Opep pourrait probablement baisser encore plus sa production dans le but de ramener les cours du brut à environ 70 dollars le baril. Que se passe-t-il sur les marchés ? Dans l’instantané du moment, les prix chutent à des niveaux dangereusement bas.
En effet, les cours sont restés moroses vendredi dernier, poursuivant leur dégringolade sur fond de craintes persistantes de surproduction. Ainsi, le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en février a cédé 53 cents pour finir à 53,82 dollars sur l’Intercontinental Exchange (ICE) de Londres, son plus bas niveau depuis septembre 2017. Il a perdu
10,7% sur l’ensemble de la semaine. Sur le New York Mercantile Exchange (Nymex), le baril de WTI pour la même échéance a perdu 29 cents pour terminer à 45,59 dollars, un niveau plus vu depuis juillet 2017.
Il a plongé de 11,4% sur la semaine. Le marché étant surapprovisionné, la diminution opérée par l’Opep et ses partenaires étant insuffisante, il y a de fortes chances que cette tendance à la baisse se poursuive, les mois à venir, a relevé Saïd Beghoul. Jeudi dernier, l’organisation pétrolière a signalé qu’elle détaillerait l’ampleur des réductions (quotas) que chacun des pays devra mettre en place, alors que seul le chiffre global a jusqu’à présent été diffusé. Saïd Beghoul en fait une lecture plus globale, expliquant que la réduction de l’Opep (1,2 million barils par jour) a fait réagir le marché.
Ce dernier a, en fait, réagi par anticipation au lendemain de la réunion de l’Opep et de ses alliés, tenue les 6 et 7 décembre derniers à Vienne. L’expert rappelle que les prix ont gagné environ 2 dollars mais qu’il ne faut pas oublier qu’au jour d’aujourd’hui, le volume à retirer du marché, c’est à dire 1,2 million de barils par jour, est encore sur le marché, comme un surplus jusqu’au 1er janvier 2019, date à laquelle sera mis en œuvre l’accord de baisse de production en question. Aussi, cette réduction reste-t-elle inférieure au surplus qui se situerait entre 1,5 et 2 millions de barils par jour. Donc, a-t-il poursuivi, la réduction de l’Opep, qui ne représente que
1% de la demande mondiale, est “insuffisante”. Pour lui, le fait que les prix sont en chute actuellement est une réaction anticipée du marché à la situation à venir de 2019. L’expert explique également que l’offre pétrolière peut gonfler, car, il y a des sources d’approvisionnement qui ont la main lourde sur le marché.
Il dira ainsi que l’Arabie saoudite et la Russie en sont actuellement à des niveaux de production record, voulant engranger plus de revenus avant la réduction de l’offre prévue le 1er janvier 2019. En plus, a-t-il ajouté, la Russie annonce que sa réduction (230 000 barils par jour) décidée dans le cadre de l’accord de baisse de production, cité plus haut, sera faite graduellement et pas d’un seul coup.
Quant à la réduction de l’Arabie (322 000 b/j) elle est inférieure à l’augmentation opérée par le royaume en juin-juillet suite à la pression de Trump.
Il ne faut par ailleurs pas oublier la production des États-Unis
(11,7 millions de barils par jour), comme le rappelle Beghoul. Les Américains visent, a-t-il indiqué, les 12 millions de barils par jour en 2019, ce qui va gonfler les stocks et donc peser sur les prix. En outre, a-t-il dit, le grand gisement Buzzar, au Royaume-Uni, a redémarré sa production de 150 000 b/j après la réparation d’un pipe dont l’endommagement a conduit à la fermeture temporaire du gisement.
Youcef Salami