Après l’agression et l’impossibilité d’israël de détruire le mouvement islamiste : Le hamas s’est posé en acteur politique incontournable

Après l’agression et l’impossibilité d’israël de détruire le mouvement islamiste : Le hamas s’est posé en acteur politique incontournable

Israël a beau clamer avoir infligé au Hamas ses «plus durs coups depuis sa création», après avoir tué plusieurs de ses chefs militaires, les experts rappellent qu’à chaque guerre, le Hamas sort plus fort et mieux armé.

Israël refuse catégoriquement de se plier aux exigences du Hamas et la levée du blocus de Ghaza semble loin, mais avec la guerre qu’il a menée le mouvement palestinien a engrangé des gains politiques solides, selon les experts. Dès l’annonce du cessez-le-feu le 26 août, les chefs du Hamas ont célébré la «victoire» sous les vivats d’une foule de Ghazaouis, ravis d’en finir avec 50 jours d’un pilonnage qui a tué 2.143 Palestiniens, blessé 11.000 et déplacé quasiment un demi-million de personnes, soit le quart de la population.

Ils invoquaient la perspective d’ouvertures sur le monde dans la petite enclave, s’attirant les louanges de la rue. Mais la réouverture du port et de l’aéroport de Ghaza est encore suspendue à de futurs pourparlers qui ont peu de chance d’aboutir, selon les experts, alors que les deux points de passage vers Israël sont ouverts au compte-gouttes et sous étroite surveillance.

Les responsables israéliens, eux, se targuent de n’avoir rien cédé au Hamas qui contrôle Ghaza. Toutefois, pour les experts, le mouvement islamiste, après avoir connu l’isolement politique et l’étranglement économique, est devenu un interlocuteur qu’il n’est plus possible de négliger. Lorsque l’armée égyptienne a destitué en juillet 2013 le président Mohamed Morsi, sa confrérie des Frères musulmans, et ses ramifications à l’étranger, dont le Hamas, ont subi un véritable revers. Mais en s’imposant à la table des négociations de cessez-le-feu en Egypte et en dictant les exigences des Palestiniens, le Hamas a renforcé sa position nationale, internationale et même auprès d’Israël. Il a «coupé court à sa diabolisation», notamment menée par les Egyptiens, note Walid Moudalal, politologue de Ghaza. Depuis la réconciliation en avril avec l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) du président Mahmoud Abbas, le Hamas était revenu au premier plan du jeu politique palestinien.

Et avec sa guerre de 50 jours contre Israël (8 juillet-26 août), «le Hamas est désormais un acteur clé et plus aucune décision politique, sécuritaire ou nationale ne peut être prise sans lui», affirme Hani Habib, un expert de la politique à Ghaza. Au plan international, il a imposé «au monde l’idée que la solution politique est la seule possible en montrant sa force de frappe contre Israël», assure M.Moudalal. Selon Moukhaïmer Abou Saada, politologue ghazaoui, le Hamas a tiré «environ 5.000 roquettes» durant le conflit «soit la moitié de son arsenal».

Ces faits d’armes ont aussi amélioré ses relations avec les alliés iranien et libanais du Hezbollah, avec lesquels il est en désaccord sur le conflit syrien. De quoi retrouver non seulement des armes, mais aussi des fonds pour payer ses plus de 40.000 fonctionnaires privés de salaires depuis des mois. «Le simple fait de ne pas avoir été défait représente une victoire symbolique, compte-tenu de la disproportion écrasante du rapport de forces», note Karim Bitar, un spécialiste du Moyen-Orient.

En infligeant à l’armée israélienne ses plus lourdes pertes depuis 2006 – 66 soldats tués -, en forçant des milliers d’Israéliens à quitter leurs maisons et en tirant, jusqu’à la dernière minute, des roquettes jusqu’à Tel-Aviv, «le Hamas a gagné en popularité au niveau régional, international et en Palestine», affirme M.Moudalal. Toutefois, note Abaher el-Saka, de l’Université de Bir Zeit en Cisjordanie, la popularité du Hamas à Gaza est suspendue à «l’amélioration des conditions de vie, via notamment le retour de l’électricité, l’ouverture des points de passage».

«Si Israël ne joue pas le jeu, mécontentement envers le Hamas va grimper», prévient-il. Pour le politologue ghazaoui Alaa Abou Taha, c’est toutefois là que pourrait être le principal acquis de cette guerre: le Hamas est parvenu à «convaincre le monde de la nécessité de la levée du blocus».