L’Arabie saoudite, premier exportateur mondial de brut, a été frappée au cœur, réduisant sa production pétrolière de près de la moitié. Le marché pétrolier a été comme secoué par un violent séisme.
Les cours ont fortement grimpé ; le baril de Brent, pétrole de référence pour l’Algérie, s’échange désormais à plus de 68 dollars, alors qu’il s’échangeait autour de 60 dollars, peu avant les attaques des Houthis ayant pris pour cible les installations pétrolières saoudiennes. Le royaume wahhabite devrait pouvoir rétablir au moins un tiers de la production perdue, mais cela reste insuffisant à même de rassurer un marché qui valse désormais au rythme des pires inquiétudes quant à l’approvisionnement mondial en brut. Car, même si les Saoudiens venaient à remettre en marche une partie des installations pétrolières endommagées, les risques que ces attaques se rééditent mettent le marché en perpétuelle perspective de rupture de l’approvisionnement, ou du moins une partie. Ce n’est pas la première fois que l’Arabie saoudite est visées par de telles attaques. Alors que Ryad est depuis 2015 à la tête d’une coalition armée intervenant au Yémen contre les rebelles Houthis, l’infrastructure énergétique du royaume a déjà été visée dans un passé récent, notamment en mai et en août. Cependant, les attaques de samedi dernier contre l’usine d’Abqaiq et le gisement de Khurais, dans l’est, sont d’une autre envergure : elles ont entraîné une chute de moitié de la production saoudienne, à hauteur de 5,7 millions de barils par jour, soit environ 6% de l’approvisionnement mondial.
Un coup dur pour le royaume. Les dégâts sont immenses, ce qui a fait grimper les cours de 10%, hier lundi, jour de l’ouverture hebdomadaire des marchés. Ces attaques ont été suivies par un violent accrochage entre les Etats-Unis et l’Iran ; les Américains tenant Téhéran pour responsable des attaques de samedi. En tout cas, les analystes et les observateurs du marché pétrolier redoutent que les Saoudiens mettent du temps pour pouvoir retrouver la pleine capacité de production, quand bien même le royaume dispose d’importants stocks en brut.
L’Arabie saoudite a déclaré samedi qu’elle fournirait une mise à jour sous 48 heures sur les attaques, et tous les regards restent tournés sur une communication officielle qui pourrait rassurer les marchés. Lundi, la télévision saoudienne Al-Arabiya a indiqué qu’Aramco était prêt à redémarrer les opérations à Khurais, qui traite 1,5 million de barils par jour. Poids lourd de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), l’Arabie saoudite pompe 9,9 millions de barils par jour, soit près de 10% de la demande mondiale, dont sept millions de barils par jour sont destinés à l’exportation. Le royaume dispose également d’une capacité inutilisée d’environ deux millions de barils par jour qu’il peut utiliser en période de crise.
Si les conséquences de ces attaques sur le marché ne s’étaient pas faites attendre, l’impact géopolitique n’est pas non plus anodin, puisque dès potron-minet Américains et Iraniens se livraient à des accusations, faisant grimper d’un cran les tensions géopolitiques dans la région. En effet, le secrétaire d’Etat américain Mike Pompeo a directement mis en cause l’Iran dans les attaques ayant pris pour cible les installations pétrolières saoudiennes. Les Américains sont allés jusqu’à dire leur disposition à riposter aux attaques de drones. La République islamique a catégoriquement démenti. Téhéran a jugé ces accusations d’insensées et d’incompréhensibles, par la voix du porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Abbas Moussavi, qui a laissé entendre qu’elles avaient pour but de justifier des actions futures contre l’Iran. L’escalade verbale des responsables des deux pays ont fait sortir les grandes puissances de leur silence, appelant à la retenue et à la désescalade.
La Russie a appelé, hier, la communauté internationale à ne pas tirer de conclusions hâtives après l’attaque de drones contre des installations
pétrolières saoudiennes revendiquée par le mouvement yéménite Ansarullah (Houthis) et pour laquelle Washington accuse l’Iran. La Chine a exhorté, à son tour, l’Iran et les Etats-Unis à la retenue suite aux accusations de Washington tenant Téhéran pour responsable d’une attaque de drones contre des installations pétrolières saoudiennes, ont rapporté dimanche des médias locaux. L’Union européenne a pour sa part appelé à la plus grande retenue après les accusations portées par Washington contre Téhéran à la suite d’une attaque de drones contre des installations pétrolières saoudiennes revendiquée par des rebelles yéménites. C’est dire que l’incident dont étaient victimes les installations pétrolières saoudiennes pourrait se transformer en conflit, d’autant plus que le différend opposant les Etats-Unis à l’Iran date déjà de plusieurs mois et ne fait que s’envenimer après que l’Iran ait annoncé la remise en marche de son programme nucléaire suite à la sortie des Etats-Unis de l’accord nucléaire.