La police allemande a arrêté un contact tunisien d’Anis Amri, l’auteur présumé de l’attentat au camion-bélier à Berlin dont le scénario de fuite s’est précisé mercredi, malgré de nombreuses zones d’ombre.
Tué vendredi à Milan par des policiers italiens après trois jours de cavale, Anis Amri « avait sauvegardé dans son téléphone mobile » le numéro d’un compatriote de 40 ans, dont le parquet fédéral allemand a annoncé mercredi l’interpellation.
« Les investigations laissent penser » que cet homme « pourrait être lié à l’attentat », indique dans un court communiqué le parquet fédéral, compétent en matière de terrorisme.
Restant prudent, le parquet souligne qu’ »il reste à établir si ces soupçons (initiaux) sont confirmés par l’enquête », et se donne 24 heures pour demander ou non le placement en détention provisoire du suspect.
Une perquisition a par ailleurs eu lieu au domicile du ressortissant tunisien et dans son commerce, alors que la police allemande concentre ses efforts sur la recherche d’éventuels complices d’Anis Amri.
Près de 10 jours après l’attentat revendiqué par l’organisation Etat islamique, les enquêteurs cherchent à comprendre comment l’assaillant présumé a pu fuir au nez et à la barbe des polices du pays et d’Europe.
– En car aux Pays-Bas –
Le scénario de ses trois jours de cavale s’est précisé mercredi : le Tunisien de 24 ans a transité en car par les Pays-Bas avant de passer par la France pour arriver en Italie.
« Nous pensons qu’il a été à Nimègue, très vraisemblablement mercredi dernier », a déclaré à l’AFP Wim de Bruin, porte-parole du parquet national néerlandais, évoquant du matériel vidéo.
Le jeune homme « aurait voyagé dans la nuit du 21 au 22 décembre par car de la gare routière de Nimègue », près de la frontière avec l’Allemagne, « jusqu’à la gare ferroviaire de Lyon-Part-Dieu », dans le sud-est de la France, a précisé une source française proche de l’enquête.
Anis Amri a ensuite été repéré par les caméras de vidéosurveillance le 22 décembre à Lyon-Part-Dieu. Puis, il a gagné par train Chambéry et enfin Milan, dans le nord de l’Italie, où il été tué dans la nuit du 22 au 23 décembre lors d’un contrôle policier de routine, après plus de trois jours de chasse à l’homme.
Des billets de train pour un trajet Lyon-Chambéry-Milan via Turin, réglés en liquide, ont été retrouvés sur lui ainsi que des cartes SIM qu’il aurait reçues à Nimègue, a précisé le parquet néerlandais, ajoutant poursuivre les vérifications.
L’enquête doit encore éclaircir de nombreux points, à commencer par l’existence d’un éventuel réseau de soutien dans la préparation de l’attaque au camion volé et la fuite du jeune Tunisien.
– Réseau de soutien ? –
Anis Amri a envoyé messages vocaux et photos à des « amis islamistes » jusqu’à 10 minutes avant de fondre sur le marché de Noël, affirme le magazine allemand Focus en citant des « sources de sécurité », sans plus de précision sur le contenu des messages et leurs destinataires.
Aucune information n’a pour l’heure fuité sur le parcours d’Amri en Allemagne après l’attaque, ni sur la façon dont il s’est volatilisé des lieux de l’attentat, une place très touristique du centre-ouest de Berlin.
Citant des « sources gouvernementales », plusieurs médias allemands ont affirmé mercredi soir que le camion avait été stoppé par un système de freinage automatique réagissant aux chocs, mettant fin à sa course mortelle après 70 à 80 mètres.
Dans ces premières heures cruciales pour l’enquête, les forces de l’ordre s’étaient concentrées sur un Pakistanais interpellé à deux kilomètres des lieux du crime mais mis ensuite hors de cause.
Trois proches d’Amri, dont son neveu, ont par ailleurs été interpellés vendredi en Tunisie, mais aucune information sur leur implication dans l’attaque ou la fuite n’a été communiquée.
Enfin, à la demande de la chancelière Angela Merkel, un examen des dysfonctionnements devrait permettre de comprendre comment la justice allemande a levé en septembre la surveillance d’Anis Amri, dont la dangerosité était connue depuis six mois.
La Tunisie a par ailleurs été vivement critiquée en Allemagne pour avoir refusé cet été l’expulsion d’Amri après le rejet de sa demande d’asile par les autorités allemandes. Tunis a mis des mois à reconnaître sa nationalité tunisienne.