POLITIQUE – « Moucharaka ». C’est le nom du projet lancé en début de semaine par le Collectif pour la promotion des droits des personnes en situation de handicap au Maroc. Une initiative qui a pour but de mettre en lumière l’absence de personnes en situation de handicap dans la politique ou encore les difficultés rencontrées par les individus handicapés à aller voter en raison d’un manque d’aménagements adéquats.
Pour Karim Cherkaoui, membre du bureau exécutif du collectif interrogé par le HuffPost Maroc, cette initiative s’inscrit « dans la continuité d’un ensemble de projets concernant l’accessibilité à la vie politique pour toutes les personnes atteintes de handicaps physiques ou mentaux ».
Le collectif prend à cet effet la Constitution de 2011 comme point de départ. « La Constitution affirme que tous les Marocains peuvent jouir de tous leurs droits en ce qui concerne leur participation à la politique », rappelle Karim Cherkaoui.
Des observateurs pour les élections législatives
Mais exercer son droit de citoyen peut s’avérer compliqué pour beaucoup de personnes handicapées au Maroc. Certains établissements accueillant les bureaux de vote lors des élections ne proposent pas les aménagements nécessaires pour faciliter l’accès aux handicapés.
Le collectif évaluera ainsi environ 1.000 bureaux de vote dans tout le pays grâce à 275 observateurs lors des prochaines élections au mois d’octobre afin de se rendre compte de l’ampleur du phénomène. « Les observateurs vont voir s’ils sont bien aménagés pour que chacun puisse exercer son droit d’électeur en toute indépendance », indique Cherkaoui.
Ces installations destinées aux handicapés peuvent être par exemple une passerelle pour les personnes en fauteuil roulant ou des fiches de vote en braille pour les non-voyants. Le collectif avait mené une expérience similaire en 2015 dans la région de Rabat. Et les résultats étaient loin d’être positifs. « Sur les 206 établissements et bureaux de vote observés, 75% des établissements n’étaient pas accessibles aux handicapés, et ce chiffre était de 53% pour les bureaux de vote », déplore le militant associatif.
La plupart des établissements utilisés pour accueillir les électeurs étant des écoles, ces données mettent également en lumière le problème que subissent au quotidien les écoliers marocains en situation de handicap. « Nous avons interpellé le gouvernement après cette étude mais personne ne nous a écoutés », déplore notre interlocuteur.
Pour mettre en place une politique destinée à améliorer le quotidien des handicapés au royaume, les formations politiques sont au premier rang. Il est donc important pour le collectif que des personnes handicapées puissent faire entendre leurs voix. « Il ne faut pas oublier que les partis sont les premiers à pouvoir encourager cette participation », explique Karim Cherkaoui.
La représentativité des handicapés lors de ces élections ou dans le débat public sera également suivie par le collectif. « Nous allons observer la participation des handicapés dans les débats politiques et médiatiques », annonce Karim Cherkaoui, un suivi qui permettra à l’association de voir l’importance accordée à la parole des handicapés dans la sphère publique.
Le handicap au Maroc en chiffres
Selon l’enquête nationale sur le handicap réalisée en juin 2014 par le ministère de la Solidarité, de la femme, de la famille et du développement social, 6,8% des Marocains, soit près de 2,3 millions de personnes, ont déclaré avoir des incapacités à divers types et degrés, sur une population totale de référence de 33,3 millions de personnes.
D’après l’enquête, 50,2% des personnes en situation de handicap souffrent de déficiences motrices, 25,1% de déficiences mentales et 23,8% de déficiences visuelles. Le taux de prévalence du handicap était de 6,99% en milieu rural contre 6,66% en milieu urbain. Il a atteint 6,8% chez les femmes et 6,7% chez les hommes.