Par Stanislas TOUCHOT
«Monstrueux». «Légendaire». «Martien». La presse européenne s’est inclinée hier devant Cristiano Ronaldo, auteur d’un fantastique triplé contre l’Atlético de Madrid et qui a qualifié la Juventus Turin pour les quarts de finale de la Ligue des champions, son épreuve, sa maison. «La Juventus m’a pris pour ça, pour l’aider», a résumé le Portugais après le match. Trois fois rien, juste un petit coup de mains: deux buts de la tête et un penalty imparable à cinq minutes du terme pour renverser l’équipe de Diego Simeone, victorieuse 2-0 à l’aller et réputée la plus coriace défensivement du continent. De fait, la Juventus l’a bien pris pour ça.
Le club turinois n’a pas offert plus de 100 millions d’euros au Real Madrid et plus de 30 millions de salaire annuel au Portugais pour le voir marquer 20 buts en championnat contre Sassuolo ou Empoli. Avant mardi, Ronaldo n’avait marqué qu’une seule fois en Ligue des champions cette saison et un échec aurait été aussi le sien, surtout le sien. Mais à 34 ans, le temps n’a pas de prise sur lui, rien ne l’affecte, pas même l’enquête ouverte après une accusation de viol aux Etats-Unis en 2009, ce qu’il a toujours nié. Lui qui a soulevé cinq fois la C1 n’était pas venu non plus pour sortir dès les 8e de finale, ce qui ne lui est plus arrivé depuis 2009 et sa première saison au Real. Et avec le triplé de mardi, le huitième de sa carrière en Ligue des champions, son bilan est plus conforme à ses standards.
Le voilà désormais auteur de 124 buts en 160 matches dans la principale compétition européenne de clubs, 16 de plus que Lionel Messi et… six de plus que l’Atlético dans toute son histoire. «Il a gagné cinq Ligues des champions, il peut encore en gagner. Il a démontré ce soir qu’il était le n°1, tout simplement», a lâché admiratif son équipier Blaise Matuidi après le match. Au-delà de la performance d’un soir, le Portugais a aussi redonné un sens à la saison de la Juventus, déjà virtuellement championne d’Italie et qui ne peut pas se contenter de compter ses scudetti. Alors qu’il court depuis 1996 après la Ligue des champions, au fil de cinq défaites de suite en finale, le club turinois est forcément plus convaincu que jamais d’avoir fait le bon choix l’été dernier.
En C1, Ronaldo est chez lui et sa présence est une assurance. Le Real Madrid, éliminé par l’Ajax Amsterdam, a découvert le poids de son absence et les possibles futurs adversaires de la «Vieille Dame» sont sur leurs gardes. «La Juventus a joué deux finales et les a perdues. Alors ils sont allés chercher Cristiano. Il a toute la pression sur les épaules et il marque trois buts contre l’Atlético. Voilà le genre de gars et d’équipes qu’on peut affronter au prochain tour», a ainsi déclaré Pep Guardiola après la qualification de son Manchester City mardi. Au plan économique, le triplé de mardi est aussi une forme de retour sur investissement.
Car Ronaldo coûte cher. Son transfert et ses salaires pèsent sur le bilan, logiquement annoncé dans le rouge pour 2019 après déjà une perte de 19 millions d’euros en 2018. Marketing, billetterie, sponsoring: l’arrivée de la superstar portugaise a pourtant déjà contribué à la hausse du chiffre d’affaires du club turinois. Mais CR7 n’est là que depuis huit mois, la machine à créer des revenus ne tourne pas encore à plein régime et, pour l’instant, le Portugais coûte plus qu’il ne rapporte. Avec cette qualification, le club bianconero fait tout de même une belle opération : selon les estimations de la presse italienne, son parcours européen lui rapportera au moins 105 millions d’euros, contre environ 90 millions la saison dernière.
Et à la Bourse de Milan, l’action Juventus a ouvert en hausse de plus de 23% mercredi ! Le Portugais est toujours affamé de victoires. Alors qu’il avait laissé de côté sa sélection en début de saison, il a d’ailleurs laissé entendre qu’il allait bientôt retrouver le Portugal. «Pour les prochains matches, j’espère apporter ma contribution à la sélection. Cela me manque aussi, j’y suis chez moi», a-t-il dit dans une interview au diffuseur Dazn. C’est qu’après la Ligue des champions, il y a une Ligue des nations à gagner, au Portugal qui plus est. Et Ronaldo veut tout.
(Source AFP)