Par Mohamed TOUATI
Il est indéniable que plus le pays tardera à sortir de l’imbroglio politique dans lequel il a plongé depuis la démission de l’ex-président de la République, moins il aura d’atouts pour surmonter la féroce crise financière qu’il traverse.
L’état des finances est préoccupant. Une situation sur laquelle est venue se greffer une conjoncture politique qui est loin d’être rassurante. Une nasse dans laquelle est pris le pays. Il est indéniable que plus il tardera à sortir de l’imbroglio politique dans lequel il a plongé depuis la démission de l’ex-président de la République, moins il aura d’atouts pour surmonter la féroce crise financière qu’il traverse. Il est en effet impératif que l’Algérie se dote d’un président de la République qui désignera un gouvernement à qui incombera la charge de mener les réformes nécessaires qui lui permettront de sortir de la dépendance aux exportations d’hydrocarbures en général, de pétrole en particulier, et promouvoir les secteurs susceptibles de créer des richesses. L’agriculture, le tourisme, l’industrie automobile, l’agroalimentaire…Le temps nous est compté. La course contre la montre doit être engagée.
Les derniers chiffres livrés par la Banque d’Algérie font état d’une dégringolade des réserves de changes sous la barre des 80 milliards de dollars. Elles ont subi une contraction vertigineuse, de l’ordre de 17,45 milliards de dollars pour se situer à 79,88 milliards de dollars à fin décembre 2018, contre 97,33 milliards de dollars à fin 2017. Au rythme où va la détérioration de ce bas de laine il ne devrait plus y avoir un cent d’ici trois années, soit en 2022. De 110,2 milliards de dollars en 2007 elles sont passées à 194 milliards de dollars en 2013 avant de fondre de plus de 100 milliards de dollars. L’Algérie se retrouve encore une fois face à ses démons. Une situation qui découle directement de son addiction à son pétrole. Son économie en dépend et au moindre effondrement des cours de l’or noir, sa fragilité est mise en exergue. Sans autre apport de devises d’autres secteurs hors hydrocarbures, sa fragilité est étalée au grand jour. Les caisses se vident, se vident au point de mettre en péril les équilibres financiers du pays.
Un scénario qui est en train de se jouer actuellement. Le salut n’est dû qu’au recours excessif du financement conventionnel qui, fort heureusement, n’a pas provoqué d’hyperinflation comme l’ont prédit de nombreux spécialistes. Cette option sur laquelle se sont penchés les pouvoirs publics ne peut s’étaler dans le temps sans produire d’effets pervers qui ont pu, il faut le reconnaître, être contenus jusqu’à l’heure actuelle. Un choix qui lui a évité de recourir à un endettement extérieur qui hélas, pointe à nouveau son bout du nez. Ce qui risque de faire table rase de l’orientation d’une politique financière qui a pourtant donné ses fruits depuis plus d’une décennie. Dès 2006, en effet, l’Algérie, avait décidé d’éponger sa dette extérieure par une politique de remboursement par anticipation. Ce qui a eu pour effet de consolider sa position financière extérieure. La seconde mesure a consisté en la création d’un Fonds de régulation des recettes qui avait atteint l’équivalent de 70 milliards de dollars à fin 2014. Une épargne qui a permis de financer la totalité des déficits de 2014 et de 2015 et en partie ceux de 2016. La chute des revenus pétroliers lui a été fatale.
L’Algérie a dû remettre les pieds sur terre. L’effondrement des prix du pétrole, la facture salée des importations, ont amputé les réserves de changes de plus de 114 milliards de dollars en l’espace de cinq années. Une dégringolade des prix du pétrole signifierait qu’il va falloir puiser encore plus dans ce bas de laine constitué grâce aux niveaux record qu’ils avaient atteint par le passé. Plus de 147 dollars en juillet 2008. Et ce n’est pas l’unique désagrément que pourrait subir l’économie nationale déjà minée par une facture des exportations qui reste astronomique malgré l’interdiction d’achat de nombreux produits. Le déficit commercial qui s’est sensiblement réduit grâce au rebond qu’a connu le baril ne pourrait être complètement résorbé alors que le recours au financement non conventionnel qui, en principe, devrait être, selon la Banque d’Algérie, moins sollicité à partir du début de l’année 2019, risque d’être plus accentué. Le pire des scénarios pour le pays qui est à la croisée des chemins.