Benjamin Stora : « La France pose un regard d’immobilisme absolu sur l’Algérie »

Benjamin Stora : « La France pose un regard d’immobilisme absolu sur l’Algérie »

Dans un entretien accordé au quotidien Français « La Croix », l’historien et spécialiste de l’Algérie, Benjamin Stora, est revenu sur le mouvement populaire et la situation politique actuelle en Algérie.

Questionné sur le Hirak, l’historien français a indiqué que le mouvement populaire « constitue un moment de rupture. Pour la première fois depuis l’indépendance de l’Algérie, un président en exercice est contraint de quitter le pouvoir par un mouvement populaire. »

« Il était inimaginable, au vu de leur prestige et de la peur qu’ils inspiraient, que de tels puissants personnages finissent un jour derrière les barreaux. Toufik était si craint qu’on ne prononçait même pas son nom », a-t-il souligné.

Pour Benjamin Stora, « la France pose un regard d’immobilisme absolu sur l’Algérie ».

« De sorte que lorsque la révolution éclate le 22 février on n’y croit pas. Or le mouvement était d’une extraordinaire profondeur, nourri par un mouvement social, chronique, depuis des années. Pour paraphraser la situation française, il y a eu convergence des luttes. Des millions de personnes sont sorties dans la rue, et continuent à le faire, et le président a été chassé », a expliqué l’historien.

Interrogé sur la volonté des nouveaux dirigeants du pays, Tebboune et le premier-ministre Djerad, d’initier un changement, Benjamin Stora a expliqué qu’ « On ne peut pas se lancer dans le jeu des pronostics. À l’intérieur du sérail, de l’armée, il y a aussi des tensions. Bien malin celui qui pourrait dire ce sont toujours les mêmes hommes, rien n’a changé. Il y a un an, on était persuadé que tout continuerait à l’identique. »

« Mais il est vrai que, si aucun contre-pouvoir s’organise, le risque de déboucher sur un système à l’égyptienne, avec une armée pleinement aux commandes, arguant de la menace aux frontières avec la Libye, le Mali et le Niger, ne peut être exclu », a-t-il ajouté.