Ce contrôle portera sur les logements et les véhicules qui constituent un marché juteux des opérations de fraude et de blanchiment d’argent.
Zoom sur la fortune! Les biens mobiliers et immobiliers seront répertoriés à la lettre. L’Etat compte recenser tous les acquis des citoyens et des sociétés. Ce contrôle portera sur les logements et les véhicules qui constituent un marché juteux dans les opérations de fraude et de blanchiment d’argent. Désormais, l’Etat sera informé sur toutes les acquisitions des citoyens et des entreprises. Les pouvoirs publics semblent avoir trouvé le moyen pour démanteler le secret sur la fortune des citoyens considérée comme territoire inaccessible.
Les sociétés et les compagnies d’assurances ou de réassurances seront tenues de transmettre, chaque trimestre, un inventaire détaillé sur leurs clients à l’administration fiscale. En termes plus clairs, l’Etat veut asseoir une police d’assurance pour mieux maîtriser le patrimoine immobilier et mobilier des citoyens. C’est là, l’une des importantes dispositions fiscales contenues dans le projet de loi de finances 2011.
Cette mesure s’inscrit dans le cadre de la lutte contre la fraude et la corruption. Le gouvernement, qui fait de la lutte contre la corruption son cheval de bataille, diversifie ses outils de travail.
Il prévoit, dans ce projet, l’instauration de l’obligation de transmission, par les sociétés et compagnies d’assurances et de réassurances ou tout intervenant en la matière, d’un état des polices d’assurances contractées par les personnes physiques, les personnes morales et les entités administratives au titre de leurs véhicules ou du patrimoine immobilier.
L’article 52 du Code de procédures fiscales stipule que «les sociétés ou compagnies d’assurances ou de réassurances, les courtiers en assurance ainsi que tout organisme exerçant habituellement des activités d’assurances de véhicules ou immobilières, sont tenus d’adresser trimestriellement à l’administration fiscale, un état spécial des polices d’assurances souscrites auprès de leurs agences, par les personnes physiques, les personnes morales et par les entités administratives». Rien n’échappera à l’oeil de l’Etat. A travers cette mesure, l’Etat disposera d’un fichier fiscal détaillé sur les biens que possèdent chaque personne et chaque société.
Ces derniers n’auront plus à esquiver le Fisc ni même à falsifier leur identité. Indépendamment de leur volonté, les citoyens et les entreprises verront toute leur fortune dévoilée au Fisc. L’administration fiscale promet de jouer au gendarme.
Elle exhorte les entreprises à transmettre, sur support informatique ou par voie électronique, toutes les données et dans un délai de 20 jours du mois suivant le trimestre. En cas de non-respect de cette disposition, les sociétés seront exposées à une amende fiscale. L’état spécial des polices doit comporter, comme le précise l’article 52 bis, la désignation, le numéro d’identification fiscale et l’adresse de l’assureur ainsi que les renseignements précis concernant le véhicule ou le bien immobilier.
«Ces mesures, indique le projet de loi, ont pour objectif de renforcer les moyens de lutte contre les formes de fraudes fiscales et financières permettant ainsi à l’administration fiscale d’assurer le suivi des mouvements de capitaux et de détecter leur utilisation à travers l’acquisition de biens immobiliers et de véhicules automobiles.»
Sachant que le marché de l’immobilier et de l’automobile connaît beaucoup de trafic et de transactions douteuses, l’Etat met le doigt sur la plaie.
Cette disposition signe la fin du laisser-aller et va stopper les dépassements enregistrés dans le secteur de l’habitat. Il n’y aura plus de possibilité d’acquérir plusieurs logements.
Les arnaqueurs qui ont acquis plusieurs logements dans le cadre du programme social ou promotionnel ne peuvent plus en tirer profit. Il faut reconnaître qu’en l’absence d’un fichier national, des opportunistes ont bénéficié de deux à trois logements lancés dans le cadre social qu’ils revendent à des prix exorbitants.
Cette mesure vient compléter l’arsenal de lois de lutte contre la corruption. Vu que ce phénomène a pris des proportions alarmantes menaçant même la stabilité des institutions, le chef de l’Etat a donné de larges pouvoirs à la Cour des comptes pour contrôler les deniers publics.
Il y a lieu de rappeler que le gouvernement avait tenté d’imposer aux responsables politiques et aux élus la déclaration de patrimoine. En vain. Cette disposition est restée lettre morte.
Nadia BENAKLI