Par Yazid Yahiaoui
Cher est le mouton de l’Aïd. Cette réflexion est dans toutes les bouches, ces derniers jours à Bouira. Plus encore quand on fait une virée du côté de certains des 33 points de vente autorisés et répartis à travers les communes de la wilaya. Les bêtes sont là exposées et proposées à la vente mais point d’acheteurs ou très peu.
Jeudi, les cadres de la DSA, à leur tête l’inspectrice vétérinaire, étaient au niveau des deux points de vente autorisés dans la ville de Bouira et situés du côté du quartier 140 logements. Sa mission, donner des conseils et autres démarches à suivre et à adopter lors de l’abattage du mouton de l’Aïd et sa dépouille, dans le cadre d’une caravane de sensibilisation sur le kyste hydatique. Alors qu’elle s’approchait d’un groupe de pères de famille venus dans le but d’acheter un mouton de l’Aïd, ceux-ci n’avaient pas bronché, tellement ahuris par les prix affichés.
Anecdotique, certes, mais la réalité est là : le mouton de l’Aïd devient de plus en plus inaccessible aux petites bourses et même aux bourses moyennes tant les prix des moutons ne cessent de flamber alors que les salaires sont restés immuables pendant des années.
Karim, un père de famille, la quarantaine largement entamée, était là au niveau de ce point de vente depuis plus d’une demi-heure mais hésitait à prendre une décision quant à l’achat d’un mouton. «Je n’arrive plus à me décider. Je suis vraiment très déçu par les prix qui sont vraiment exorbitants pour les moutons valables, comme on dit. Il faut plus de 4 millions de centimes pour en acquérir un qui vaille la peine et cette somme, je ne l’ai pas», dira-t-il avec tristesse et angoisse. «En tout cas, je suis obligé d’acheter puisque je n’ai jamais raté le sacrifice de l’Aïd et ce n’est pas aujourd’hui que je vais le faire. Mais, je dois temporiser un peu pour voir comment faire» dira-t-il. Quant aux cadres de la DSA qui tentaient de lui expliquer les risques liés au kyste hydatique, Karim n’en avait cure ; il devait d’abord aller loin des lieux pour mettre de l’ordre dans ses idées…
Cela étant, au niveau de ce point de vente où des centaines de moutons sont proposés avec des prix qui oscillent entre 32 000 et 60 000 dinars, d’autres acheteurs sont là. Ceux-là semblent être au courant des augmentations et auraient mis le paquet pour se procurer une bête de sacrifice avec toutes ses caractéristiques voulues comme les fameuses cornes, très prisées chez la majorité des musulmans et parfois même, la couleur du mouton qui devait avoir une partie de la toison, marron ou noire.
A ceux-là, les inspectrices vétérinaire commentent les risques du kyste hydatique, ces poches d’eau que l’on retrouve au niveau des poumons du mouton et que l’on doit absolument enterrer dans un trou profond en y mettant si possible de la chaux, afin d’éviter toute remontée en surface des microbes qui peuvent contaminer un chien par exemple qui sera un facteur de contamination pour l’homme.
De même pour les règles d’hygiène à suivre lors de l’abattage de la bête et de sa dépouille, et surtout le régime diététique que l’on doit adopter au mouton la veille pour que sa panse soit vide avec moins de germes après son abattage ; éviter de passer d’une carcasse à une autre avec les mains pleines de sang et de salissures de la première bête, puisque les microbes et les bactéries se transmettent facilement à travers les mains sales ; mettre le mouton éviscéré rapidement dans un coin frais ou carrément dans un réfrigérateur pour éviter toute décomposition de la viande.
Car, comme le souligne l’inspectrice, Noura Oulebsir, «il faut savoir que le corps vivant possède une immunité permanente qui lui évite une décomposition et des attaques par les microbes et les bactéries qui sont des milliards au niveau des intestins. Mais une fois la bête morte, le voile de l’immunité que possèdent les cellules, n’existe plus et les bactéries ne trouvent aucune barrière pour passer dans tout le corps de la bête morte. Aussi, et pour éviter cela, il faut rapidement éviscérer la bête en ne laissant surtout pas la partie du rectum proche de la queue du mouton, et si possible, mettre la carcasse à l’abri de la chaleur, dans un coin très frais ou carrément dans le réfrigérateur». Toutes ces mesures doivent être suivies, selon l’inspectrice vétérinaire, pour éviter le verdissement de la viande constaté chez certains moutons.
Pour revenir au prix des moutons, même au niveau des autres marchés de la wilaya, comme celui de M’chédallah ou encore de Bechloul, les prix sont relativement élevés, surtout pour les moutons d’une année et plus qui sont cédés à partir de 42 000 dinars.
Des prix excessifs que beaucoup de pères de famille, surtout ceux qui ne renoncent pas au sacrifice, contournent en optant pour l’achat collectif d’un veau, valable pour sept personnes et qui est plus économique puisque généralement la part de chacun ne dépasse pas les 30 000 dinars, et avec une trentaine pour ne pas dire plus de kilos de viande.
Y. Y.