Bouteflika-Moubarak : L’accolade fair-play

Bouteflika-Moubarak : L’accolade fair-play

On ne s’attendait pas à un réchauffement des rela tions politiques algérofrançaises à l’occasion du sommet Afrique-France de Nice. Pas plus qu’on ne s’attendait à une «réconciliation algéro-égyptienne ».

Le dernier mot est revenu au réalisme politique. Hosni Moubarek co-présidait le sommet Afrique-France aux côtés du président français Nicolas Sarkozy. Les divergences de l’Algérie avec la France et l’Egypte n’ont pas empêché que le Président Bouteflika assiste à ce sommet et dise son mot sur la situation sur le Continent et les voies et moyens de traiter ses problèmes.

Réalisme politique oblige. En même temps, cette participation au plus haut niveau de l’Etat algérien relativise la gravité des divergences avec Paris et Le Caire. Les présidents Bouteflika et Moubarek se sont brièvement rencontrés, lors d’une séance plénière du sommet de Nice. Ils ont eu une chaleureuse accolade immortalisée par quelques cliquetis d’appareils photo de téléphone portable.

Cette rencontre fraternelle a été marquée par une chaleureuse accolade qui témoigne, selon le journal Al Ahram, de «l’importance des relations entre deux grands pays arabes». Ils ont eu un échange d’amabilités et le Président Bouteflika a exprimé sa satisfaction de voir son homologue rétabli après l’opération chirurgicale qu’il a subie récemment en Allemagne, selon Echaab, le journal du parti égyptien du Travail.

Tout comme le chef de l’Etat a eu un échange d’amabilités et de politesses naturelles avec son homologue français, il en est vraisemblablement resté à ce même niveau avec Hosni Moubarek. Les accolades ou embrassades en sont restées au stade protocolaire. L’Algérie officielle, ainsi que la vox populi, n’a pas digéré les graves incidents qui ont éclaté en novembre dernier à l’occasion du match au Caire entre les équipes de football des deux pays.

Les officiels égyptiens s’étaient abstenus d’intervenir pour empêcher que cela ne dégénère. Mais cela avait notamment débouché sur une campagne médiatique haineuse anti-algérienne, le drapeau algérien avait été brûlé et des étudiants algériens contraints à rentrer au pays en catastrophe.

Il est vrai aussi que ces incidents uniques dans l’histoire des relations bilatérales ont provoqué un effet boomerang en Algérie où quelques centaines d’Egyptiens ont préféré regagner leur pays.

Les relations diplomatiques en ont pris un coup avec le rappel des ambassadeurs pour consultation. Depuis, les choses semblent s’être calmées mais sans vraiment retrouver le lustre d’antan. Et pour cause, l’Egypte se braque à présent sur l’Algérie et le Qatar au sujet du fonctionnement de la Ligue arabe. Ces deux pays voudraient que le secrétariat général devienne tournant, par pays membre, et qu’en tout cas il ne revienne pas au pays hôte, l’Egypte.

La question va sérieusement se poser en mai 2011 lorsqu’il faudra remplacer Amr Moussa. Et dès maintenant, les membres de la Ligue arabe se concertent pour préparer cette succession. Il y a une autre succession qui préoccupe le président égyptien, la sienne, celle de la présidence de la République. Et elle est relativement en rapport avec la «crise algérienne».

L’élimination du Mondial 2010 de l’équipe des Pharaons a été très mal vécue par la famille Moubarek. Gamal, fils de Hosni Moubarak, comptait s’en servir pour conquérir les «masses populaires égyptiennes» et briguer la succession de son père, nous raconte un Cairote proche des sphères du pouvoir.

Sa candidature pour une succession dynastique à la manière syrienne est à présent compromise. On parle de celle du chef des renseignements qui gère aussi le dossier israélo-palestinien, Amr Souleiman, un fidèle des Moubarek.

De leur côté, les Frères musulmans pourraient soutenir une candidature de l’ancien président de l’AIEA, l’Agence internationale de surveillance atomique, Mohammed El-Baradei. De retour depuis quelques mois en Egypte, il avait posé l’abolition de l’état d’urgence comme condition à sa candidature à la présidentielle de 2011.

L’état d’urgence vient d’être reconduit, et il vient d’annoncer qu’il est disposé à briguer les suffrages des Egyptiens. La profession de foi d’El-Baradei est proposée à la signature sur elbaradeï2011.com et une pétition l’appelle à se porter candidat sur taghyeer.net.

70.000 copains d’El-Baradei se sont regroupés sur Facebook. Quand on met bout à bout ces données sur les prochaines présidentielles égyptiennes en 2011, on peut comprendre que la qualité des relations avec l’Algérie ne soit pas la priorité de Hosni Moubarek.

Oualid Ammar