Après avoir usé de toutes les voies de recours depuis de longues années sans aucun résultat, les quatre cadres supérieurs de l’hôpital Zighoud-Youcef de Ténès, dans la wilaya de Chlef, ont décidé d’aller jusqu’au bout de leur revendication.
Face à la sourde oreille et au mutisme des autorités locales et nationales qui ont été, pourtant, maintes fois informées de leur épineux problème, les quatre cadres de l’État, puisque tous sortis de l’École nationale d’administration (ENA), tous accusés de détournement, incarcérés et blanchis, ne trouvent pas mieux, aujourd’hui, pour se faire entendre, que d’envisager de saisir les organisations internationales quelle que soit leur nature, et également la presse étrangère.
Pour Mohamed Azzeddine, le représentant du collectif, qui raconte avec regret, amertume et désolation, document à l’appui, l’arbitraire dont lui et ses collègues sont victimes, la situation sociale dans laquelle ils se trouvent est grave et dangereuse. “Le calvaire dans lequel nous nous trouvons a commencé en 2002 à la suite d’une simple lettre anonyme adressée à notre encontre. Celle-ci a fait basculer non seulement notre carrière professionnelle, mais aussi la vie de chacun de nous alors que nous travaillions honnêtement au sein de l’hôpital Zighoud-Youcef à Ténès. La lettre en question contenait des informations erronées relatives à un détournement de fonds. Moi, en ma qualité de chef de service, le directeur général, le directeur et le directeur adjoint avons été donc injustement traduits devant la justice avant d’être placés sous mandat de dépôt par le magistrat instructeur près le tribunal de Ténès”, raconte Mohamed Azzeddine. Celui-ci précise, également, dans le même contexte, que l’incarcération provisoire a duré cinq mois. Selon lui, la détention en question a été requise à leur encontre sans dépôt d’une plainte de la part de l’administration de tutelle, “ce qui n’est pas du tout en conformité avec la loi”.
Le parcours du combattant
Notre interlocuteur, qui s’interroge sans cesse sur le silence énigmatique et inquiétant des responsables concernés — ministère de tutelle, Premier ministère, administrations locales et nationales, entre autres — , bien qu’assaillis régulièrement par nombre de requêtes et correspondances dont ils sont destinataires de la part des quatre victimes qui mènent, depuis plus de 10 ans, un combat pénible et interminable, retrace, pour la énième fois, le fil des événements. Selon lui, le traitement, dont les quatre cadres font l’objet de la part des structures administratives de l’État, est injuste. “On nous a salis arbitrairement sans aucune preuve ni témoins. Nous sommes, aujourd’hui, injustement privés de nos droits les plus élémentaires après avoir été suspendus de nos postes respectifs par notre tutelle, et poursuivis ensuite en justice.
Notre combat a duré plus de 10 ans avant d’être, enfin, innocentés au moyen d’une décision de justice émanant de la Cour suprême le 29 septembre 2012. Cette innocence n’est autre que le fruit de notre sérieux, de la véracité de nos déclarations faites un peu partout et aussi de la bonne foi professionnelle de chacun de nous dans cet hôpital. Mais bien que nous ayons été victimes d’une action judiciaire entachée d’irrégularités et d’une machination parfaitement orchestrée contre nous, aucune réparation de l’important préjudice que nous subissons atrocement à tous les niveaux ne nous est accordée à ce jour”, se lamente encore le représentant des quatre cadres dont le dossier est indignement traité par des instances administratives du pays.
Mohamed Azzeddine ajoute, également, toujours dans le même cadre, que suite à cette interruption de leur carrière professionnelle entre 2002 et 2011, le collectif se retrouve amputé de plusieurs années de cotisation à la Cnas “et ce, malgré notre acquittement et la réintégration dans nos postes avec régularisation de notre situation administrative et financière. Malheureusement, l’administration compétente n’a procédé, à ce jour, à aucune régularisation en notre faveur. Face à cette situation, nous nous retrouvons avec une retraite d’un agent de bureau ! Non-paiement des salaires lorsque nous étions suspendus de nos fonctions et non-paiement également des cotisations à la Cnas. Pourtant, c’est notre administration qui est à l’origine de la monumentale erreur commise. Ajouter à cela, le refus catégorique du contrôleur financier de Ténès d’apposer son visa afin que nous puissions être régularisés conformément à l’article 174 de l’ordonnance n°06-03 du 16 juillet 2006 relative à la Fonction publique”.
Le collectif des quatre protagonistes a également annoncé qu’il vient de saisir officiellement, cette fois-ci, une instance militaire du pays comme dernier recours “sur laquelle nous comptons beaucoup afin que notre épineux problème soit définitivement pris en charge. Le cas échéant, nous nous trouvons dans l’obligation d’internationaliser notre affaire”.
Solidarité citoyenne et associative
Notre interlocuteur, qui regrette que les autorités administratives locales et nationales compétentes n’osent toujours pas bouger le petit doigt afin de rétablir les concernés dans leur droit, reconnaît, en revanche, que certains militants de ce pays n’arrêtent toujours pas d’afficher leur solidarité indéfectible envers lui et ses collègues. Il s’agit, entre autres, d’après lui, “de la Ligue pour la défense des droits de l’Homme (Laddh) qui suit avec un intérêt particulier l’évolution de notre situation. C’est aussi le cas du Syndicat national autonome des personnels de l’administration publique (Snapap) qui dénonce une violation caractérisée des lois du pays et qui interpelle les autorités nationales pour intervenir et sauver ainsi les quatre pères de famille avant qu’il ne soit trop tard. Pour sa part, l’Organisation nationale pour la paix et les droits de l’Homme a réitéré, dans un communiqué rendu public, son soutien compatissant à notre cause et insiste avec fermeté sur le mystérieux silence de notre administration qui n’accorde aucun intérêt à notre cas avant de rappeler, aussi, que cela est contraire aux principes fondamentaux du Bureau international du travail (BIT) avec lequel notre pays est lié au moyen de plusieurs conventions. Le FFS ainsi que plusieurs personnalités et autres associations locales et même nationales ont également exprimé leur solidarité avec nous, tout en exigeant des pouvoirs publics de trouver les solutions escomptées que nous attendions depuis plus de 10 ans”.