Aussi naïves soient-elles, beaucoup de questions sur notre réalité sociale d’aujourd’hui en Algérie devraient être sérieusement posées pour comprendre le mouvement de celle-ci, sa dynamique et ses aspirations futures.
En première ligne, on trouve le recul de l’âge du mariage chez les jeunes (30 ans pour les filles, 35 pour les garçons). Pourquoi nos jeunes ne se marient-ils pas aussi tôt comme avant? Pourquoi y a-t-il de plus en plus de filles qui préfèrent parfois l’attente lassante du célibat et ses aléas (le regard désapprobateur et misogyne de la société) à l’engagement dans l’aventure du mariage? S’agit-il d’une peur de l’avenir, d’un changement d’époque et de mentalité, de modernisme, désir d’autonomie et d’émancipation du cadre familial, perte symbolique du sens du «patriarcat traditionnel» chez la couche juvénile, etc.?
Ou, seulement, de considérations purement matérielles comme le prétendent beaucoup d’entre eux (les jeunes), c’est-à-dire, chômage et manque d’insertion professionnelle, dégradation du pouvoir d’achat des ménages, coût élevé des frais de noces, incompatibilité entre ce qui est espéré et la précarité sociale, inaccessibilité de la dot pour les plus modestes, crise de logement, et aussi le grand investissement financier que nécessite par la suite l’entretien du foyer et l’éducation des enfants? Et puis, cela ne pourrait-il pas se répercuter négativement sur la cohésion sociale (déviation, dissolution des mœurs, prostitution, etc.) dans un climat caractérisé par la culture de tabous ?
A vrai dire, au croisement des raisons précédemment citées et qui sont, pour la plupart, fondées, se profile une réalité difficilement saisissable : le rapport tendu entre la tradition et la modernité dans le couple d’abord, puis le cercle familial et, enfin, la société. Quel modèle veut-on imprimer à notre petite famille : oriental, occidental, traditionnel, conservateur ou simplement un mélange contre-nature de genres? Cette difficulté à décider au départ du choix de «mode de vie» à mener en couple justifie, le plus souvent, le nombre croissant des divorces et des ruptures de ces dernières années! Mais au-delà de ce triste tableau, le regard se dirige aussi vers le statut de la femme dans le microcosme social.
Celle-ci a-t-elle vraiment la place qu’elle mérite? A-t-elle acquis tous ses droits ou, au contraire, reste-t-elle à la traîne comme toujours ? Si je pose cette question, c’est parce que nombre de mes compatriotes «mâles» se sont inquiétés de la portée des dernières réformes favorables, de leur point de vue, aux femmes! Et pour forcer encore la caricature, certains d’entre eux n’ont pas hésité à monter des vidéos sur les réseaux sociaux pour les critiquer et signaler une injustice à leur encontre. Qu’en est-il réellement ? Sans doute, une telle confusion, fausse bien sûre, si elle est entretenue légèrement de la sorte, peut provoquer cet enfermement social dans le stéréotype qui fait de la femme la concurrente potentielle de l’homme et non son égale? Sachant bien que les digues de la morale ne vont pas céder de sitôt. D’une part parce que les lois n’accompagnent pas généralement l’évolution des mœurs de la société.
D’autre part, le patriarcat a réduit à une peau de chagrin les velléités de renouveau dans le sens de la modernisation! Autrement dit, ce n’est pas la famille qui sécrète ses références mais les autorités qui la poussent à en adopter d’autres. Or, en principe, celles-ci ont pour mission de l’amener par le biais des moyens dont elles disposent à s’ouvrir, s’accepter, progresser et se moderniser.