La scène politico-médiatique s’emballe et les faux débats s’installent. C’est ainsi que se résume actuellement le champ politique algérien. Il a fallu que 19 personnalités, qui étaient dans un passé proche, rappelons-le, parmi les plus proches du président, lui demandent une audience pour que l’entourage de Bouteflika prenne d’assaut et charge les initiateurs de cette demande d’audience.
Mais que va changer une audience accordée ou non à Louisa Hanoune et les autres dans la situation globale du pays? Certainement rien, sauf à reconstituer les rapports de force au sein du régime.
Il faut dire que ni la démarche des 19 ni celle de mise à la retraite des généraux les plus puissants ne visent à rompre avec le statu quo autoritaire devenu intenable pour l’avenir de l’Algérie. Le relookage de la demande de l’application de l’article 88 en utilisant des personnes proches du président et connues pour leur loyauté envers le régime n’épargnera pas au pays une catastrophe annoncée. Alors chers décideurs, pouvez-vous faire l’économie du nombre des victimes et des dégâts pour notre pays qui s’effondre ?
Nous n’avons pas besoin de transition démocratique, ni d’élections transparentes pour le moment. Même une révision constitutionnelle performante ne règlera pas les profonds malheurs du pays.
L’Algérie et les Algériens ont besoin de se mettre d’accord sur un certain nombre de questions fondamentales pour l’avenir de la nation. Que faire de notre système éducatif ? Comment régler l’épineuse question des libertés ? Comment remettre le peuple au travail ? Comment utilisons-nous les richesses du pays ? Comment mettre en place une stabilité institutionnelle, politique, sociale, économique et culturelle? Comment impulser une dynamique sociétale collective dans le sens de la construction d’une puissance régionale au sens propre du terme ? Autant de questions que pose n’importe quel citoyen algérien amoureux de son pays.
Messieurs les décideurs, vous avez fait de l’Algérie votre république et quand vous n’êtes pas d’accord entre vous sur le partage du pouvoir et par conséquent de la rente, vous orchestrez des actions politiques avec vos serviteurs sans prendre en considération l’avis du peuple, qui s’éloigne de plus en plus de vous. Vous avez pris en otage notre Etat, vos querelles portent un préjudice incalculable à notre chère nation. Vous mettez notre Etat en danger.
Par contre, vous en foutez pas mal de la démocratie. Etant un système de gouvernance transparent et impliquant directement le peuple, les Algériens n’ont vécu sous une démocratie que quelques mois. Et encore, dès les premiers résultats des élections vous les avez taxés de société profondément islamiste.
Chers gardiens du temple, le vécu démocratique est le seul remède à une situation de décomposition politique, sociale et culturelle dangereuse pour l’avenir de notre chère patrie. Ce vécu ne peut être réalisé qu’en rencontrant la démocratie en tant que culture, puis en tant que système de gouvernance avant d’arriver à la phase de l’expérience propre de l’Algérie en la matière. C’est en prenant conscience du poids historique de l’Algérie, de vos responsabilités et vos devoirs, que nous puissions ensemble construire cette Algérie moderne, démocratique et émergente où le peuple est le seul souverain. Il faut se rendre compte quand même du temps qui passe, des occasions ratées, des souffrances de tout un peuple.
Faut-il rappeler que l’Afrique du Sud n’a pu se libérer de l’apartheid qu’en impliquant les décideurs en place à leur tête le 7ème et dernier président blanc de ce pays, Frederik Willem de Klerk. Ses pratiques à la tête d’un Etat raciste qui a oppressé et persécuté les sud-africains dont la couleur de leur peau est différente de sienne, ne l’ont pas empêché de se rétracter et d’amorcer les réformes nécessaires pour un pays qui est devenu une puissance mondiale aujourd’hui. Mieux encore, il a reçu le prix Nobel de la paix avec Nelson Mandela en 1993.
Alors, chers décideurs faisons ensemble la rencontre de la démocratie et libérez-vous de vos peurs. Nous voulons voir la démocratie et non le président.