Chine-Etats-Unis : Dialogue au sommet

Chine-Etats-Unis : Dialogue au sommet

La seconde rencontre entre la première et la deuxième puissance mondiale conforte une tradition initiée sous l’Ère Bush à travers les forums de 2004 (questions stratégiques) et 2006 (aspects économiques).

Baptisé par son successeur, Barack Obama, «dialogue stratégique et économique». le sommet sino-américain prend une dimension particulière.

A Pékin, la présence de la délégation américaine, forte de 200 personnes, atteste de l’intérêt accordé à cette démarche. Pour la Secrétaire d’Etat, Hillary Clinton, il s’agit, en l’occurrence, du « groupe le plus important des officiels du gouvernement à s’être déplacé à une rencontre où que ce soit dans le monde. »

Les défis ne manquent pas de pertinence dans l’évaluation de la relation bilatérale et l’appréciation de la gouvernance mondiale.

C’est que les divergences ont fortement pesé sur le cours des événements envenimés par la décision de vente d’armes à l’Ile sécessionniste de Taiwan (6,4 milliards de dollars), provoquant la suspension de tout échange bilatéral militaire, et la visite, en février dernier, du dalaï-lama à Washington. Les sujets qui fachent se sont accumulés et approfondis avec les récriminations américaines, motivées par « l’affaire Google » jugée comme une entrave chinoise aux activités US.

Le cas du yuan, trônant sur le Trésor américain, fait office de la « première priorité », selon le coordinateur pour les affaires chinoises au Trésor, David Loevinger. L’état des lieux ne prête pas à l’optimisme béat.

Face au géant asiatique qui se réveille de sa longue torpeur, redevenu compétitif dans le commerce mondial et sûr d’une position prédominante grâce au dynamisme de ses exportations qui lui ont permis de disposer des premières réserves mondiales (2.447 milliards de dollars dont plus de 895 investis en bons de trésor américain), la concurrence inquiète la superpuissance désarçonnée par son premier créancier et tenue désormais de travailler au rééquilibrage du « modèle de développement » chinois que Washington veut davantage auto-centré et porté par le yuan plus fort suspecté d’être « manipulé » par la Chine.

Tout ne semble pas être pour le mieux entre l’empire qui doute et son principal rival irrité par les réticences américaines à exporter les produits de haute technologie, mû par un « profond sentiment de méfiance» et plus que jamais décidé de conduire des réformes «au rythme de son taux de change» et «sans calendrier» pré-établi.

La dimension économique et commerciale a toute son importance, soulignée d’ailleurs par Hillary Clinton à l’ouverture du sommet, dans la refondation de la relation stratégique qui peine à trouver ses marques dans un environnement en ébullition constante et le contexte de la crise financière dévastatrice.

Les enjeux régionaux, liés à la crise nucléaire iranienne, développent une différence d’appréciation sur le traitement approprié, privilégiant la méthode des sanctions pour la partie américaine et la voie du dialogue soutenue par la Chine réaffirmant que les discussions au conseil de sécurité ne signifient pas la fin des efforts diplomatiques.

Mais, aux portes de la Chine, le risque d’embrasement de la péninsule coréenne sur le sentier de guerre ne laisse pas indifférent.

Outre les facteurs de déstabilisation et d’escalades encourues, les répercussions sur le marché financier, laminé par la crise internationale, se font sentir dans le mouvement de panique de plus en plus accentué par les turbulences en zone euro jugée « à risques ». Sous les bruits de bottes, les places financières se sont repliées à Tokyo (-3,6%), Sydney (-2,96%), Séoul (-2,75%), Hong Kong (-2,79%), Shanghai (61,9%), alors que le won nord-coréen connaît son plus bas niveau depuis 10 ans face au yen japonais.

Dans ce cas d’espèce, Pékin, marquant ses distances avec les adeptes de la méthode musclée, appelle à plus de retenue dans la gestion du conflit pour garantir la stabilité voulue cruciale par les deux grandes puissances. Face aux enjeux « géo-politiques » et aux exigences de la coopération économique, la relation bilatérale stratégique a encore bien de chemin à faire dans un monde unipolaire et source de tensions multiformes.

Larbi Chaabouni