Ouvert, samedi dernier, au théâtre Azzedine-Medjoubi, le colloque international “Jugurtha affronte Rome”, organisé à l’initiative du Haut-Commissariat à l’amazighité, en collaboration avec les ministères de la Culture et de l’Enseignement supérieur et la wilaya d’Annaba, a été clôturé, avant-hier, par l’annonce de plusieurs décisions prises.
Deux classes d’enseignement de tamazight seront ouvertes pour l’année scolaire 2016/2017 dans deux écoles primaires, respectivement à Oued-Kouba et à la Caroube, dans le cadre de la promotion de tamazight, corpus linguistique millénaire et partie intégrante de l’identité nationale. À cela, il faut ajouter l’introduction de la langue amazighe dans le programme de l’université de Sidi-Amar d’Annaba, qui est intervenue après la signature d’une convention de coopération pédagogique entre l’université Badji-Mokhtar d’Annaba et le SG du Haut-Commissariat à l’amazighité.
L’entrée en vigueur de cette convention sera progressive et débutera également à partir de l’année 2016/2017. Étalée sur trois jours, cette manifestation scientifique s’est articulée autour de six axes thématiques, à savoir lecture de l’ouvrage : La guerre de Jugurtha, “Jugurtha : un repère dans la résistance et la quête identitaire”, “L’image de Jugurtha dans la littérature universelle”, “Les cités numides et la guerre”, “Les guerres de Jugurtha” et “La guerre et l’économie”. La tenue de ce colloque avait pour objectif “d’évoquer le passé et rendre perceptibles des pans inconnus de notre histoire”, a tenu à préciser Si El-Hachemi Assad.
Les 26 conférences programmées pour la circonstance et animées par des universitaires algériens et étrangers conviés à ce colloque, ont permis, à travers un large panorama thématique, de présenter les différentes sociétés qui se sont succédé en Afrique du Nord et de faire découvrir au large public le Maghreb romanisé, à travers ses héros ayant mené une résistance acharnée contre l’occupant. L’une des premières constatations de ce colloque est l’impossibilité d’évoquer Jugurtha sans revenir à Salluste. Ce dernier, un gouverneur romain, est l’auteur du seul ouvrage référence à l’aguelid amazigh, La guerre de Jugurtha. Une référence loin de faire l’unanimité. Plusieurs intervenants ont évoqué sa subjectivité dans ses écrits.
Le Dr Saïd Dahmani, historien, a été l’un des plus virulents, en affirmant que “Salluste est le summum de la corruption” tout en ajoutant que le texte du Romain est “sale”. Il n’omettra pas de rappeler le manque de documents permettant de connaître ce qui s’est passé à l’époque (2e siècle avant J.-C.), en rappelant que c’est toujours les vainqueurs qui écrivent l’histoire. Cette occasion de revisiter l’histoire de la Numidie a permis également à plusieurs conférenciers d’aborder des “angles” différents de l’affrontement de Rome et de la Numidie et ce qui se passait dans le pourtour méditerranéen. Le Pr Virgikio Enamorado Martinez (de l’université de Malaga, Espagne) s’est ainsi penché sur la présence des Amazighs à l’époque de Jugurtha. Le roi numide s’y était distingué militairement.
Pour le Pr Martinez il n’y a pas de doute “les Berbères de l’époque de Jugurtha sont les mêmes qui sont venus en Espagne à l’époque médiévale”. Une chose est unanime, de nombreux participants à ce colloque international ont soutenu dans leurs communications que “le parcours du roi berbère avait alimenté suffisamment la littérature et la mémoire collective des populations de l’Afrique du Nord”. Enfin, rappelant la feuille de route de la promotion de tamazight, M. Si El-Hachemi Assad est revenu sur le récent atelier de traduction vers tamazight des trois documents fondamentaux de l’État algérien (la Constitution de 2016, la Déclaration du 1er Novembre 1954 et la Plate-forme du Congrès de la Soummam du 20 Août 1956). Comme il a indiqué qu’une session de formation en collaboration avec le secteur de la justice est programmée pour septembre prochain.