20 ans après, le souvenir d’un printemps des plus noirs de l’histoire de l’Algérie nous revient. Le devoir de la mémoire nous interpelle, encore une fois, à évoquer la mémoire de ces jeunes ayant laissé la vie à fleurs d’âge.
Le 18 avril 2001, un jeune lycéen Guermah Massinnissa, alors âgé de 18 ans fût grièvement blessé par une rafale de kalachnikov dans les locaux de la gendarmerie de Béni-Douala, dans la wilaya de Tizi Ouzou. Il avait ensuite succombé à ses blessures. Une étincelle qui a donné naissance à une colère inouïe, et visiblement longtemps étouffée.
Le 20 avril de la même année, et alors que l’ensemble des habitants de la Kabylie et d’autres régions du pays s’apprêtaient à célébrer le 21e anniversaire du Printemps berbère d’avril 1980, le lâche assassinat du jeune de 18 ans a donné naissance à des manifestations se sont déclenchées un peu partout dans la région.
Le climat devint alors vite très tendu laissant place à de violentes émeutes et affrontements, qui avaient duré plusieurs jours, avec les forces de l’ordre qui avaient fait recours à des tirs à balles réelles laissant 127 autres victimes parmi les jeunes issus de différentes régions.
Les 127 jeunes assassinés lors des manifestations qui ont suivi l’assassinat du jeune lycéen Guermah Massinissa, le 18 avril 2001 à l’intérieur de la brigade de gendarmerie de Beni Douala, n’ont désormais que leurs parents, alliés et concitoyens les plus proches pour les commémorer ou encore les pleurer.
L’on se souviendra pour toujours de cette scène à Azazga, où le jeune Kamel Irchen avait été atteint de plusieurs balles alors qu’il tentait de secourir un ami. Il avait ensuite transcrit avec son propre sang sur un mur le mot « LIBERTE » en lettres capitales ! L’endroit, comme beaucoup d’autres, est devenu un lieu de pèlerinage et de recueillement.
20 ans après, et au moment où l’on s’y attendait à un élan de solidarité et de compassion, voilà que les partisans autoproclamés de la division reviennent avec « des cours d’histoire » dénués de tout fondement historique, dans une énième tentative de provocation à l’encontre des héritiers d’un printemps censé être celui du changement et de la concrétisation d’une l’Algérie plurielle.
Une commémoration qui intervient donc sans surprise aucune, sur fond de proliférations enragées des pseudos représentant du peuple qui ne cessent de déverser leur haine sur les habitants de cette région martyre, précisément à la veille de l’anniversaire de l’assassinat du premier martyr du printemps noir.
2001, l’odyssée d’un printemps oublié
20 avril 2001. Les drapeaux noirs et le brouillard du deuil cachaient déjà le bleu du ciel dans les petites allées des villages kabyles. 20 avril 2001. Déjà des jeunes morts, assassinés. Déjà de l’espoir tué. En 2001, déjà l’odeur des bombes lacrymogènes se mêlait aux parfums de la liberté, et aux réminiscences du sang.
2001, le 20 avril. On se bat ou bien on pleure ? On ne le savait pas. Mais on était loin de se douter qu’un jour on allait oublier. Oublier les pleurs des mères dont les fils ont été tués, les sanglots des sœurs dont les frères ont été mutilés, les cris des femmes, devenues veuves, au nom de la liberté.
Avril, le 20, 2001. L’histoire qui se répète. L’histoire d’un espace qui ne trouve pas son temps, et d’un temps qui a aujourd’hui 20 ans. 20 ans comme les martyres de ce printemps-là, un printemps pas comme les autres. Un printemps noir, qui restera au fond des âmes, qui aspire les espoirs, comme un trou noir.
Noir oui, mais pas à cause des 128 jeunes tombés sous les balles assassines, ceux-là sont devenus des étoiles, ils brillent dans la nuit pour que nul n’oublie que le printemps ne sera jamais vert grâce à la couleur des uniformes de leurs assassins. Si le printemps berbère de 2001 est noir, c’est bien en hommage à la couleur des larmes des mères et des veuves éplorées.
Un printemps noir. Quelle idée ! C’est insensé ! Exactement comme le fait qu’un jeune de 17 ans soit tué dans les locaux de la gendarmerie nationale, à deux pas de chez lui, de son lycée, de sa mère, par une rafale de kalachnikov. Insensé comme un jeune qui est sur le point de rendre l’âme, et de ses mains ensanglantées, écrit en rouge indélébile LIBERTÉ.
N’oublions jamais nos martyrs. N’oublions jamais leurs sacrifices. Rendons hommage à leur mémoire et poursuivons leur combat.
Par Amine Ait et Abdelaziz Merzouk et Chérif Laïb