Commerce algéro-chinois: L’introduction du yuan réduit le risque de change

Commerce algéro-chinois: L’introduction du yuan réduit le risque de change

L’introduction de la monnaie chinoise, le yuan, dans le règlement des factures des importations algériennes en provenance de Chine devrait se traduire par une réduction du risque de change pour les importateurs nationaux, a indiqué à l’APS un responsable d’une institution bancaire.

La Banque d’Algérie avait adressé, en novembre dernier, une note aux banques dans laquelle elle les avise que les règlements des importations en provenance de Chine doivent, désormais, être réglées exclusivement en yuans.

Auparavant, les importateurs algériens étaient contraints de régler leurs factures en dollars, tandis que leurs fournisseurs chinois leur fixent le prix en yuan, ce qui encourait à la fois un double risque de change pour la partie algérienne: l’un entre les deux monnaies américaine et chinoise et l’autre entre le dollar et le dinar algérien.

Désormais, avec la nouvelle mesure de la Banque d’Algérie, l’importateur algérien auprès du fournisseur chinois fait face à un seul risque de change qui est celui entre le dinar et le yuan.

Cependant, cela n’aura pas un grand effet sur la facture globale des importations algériennes puisque celles provenant de la Chine ne représentent que 14% du total des achats à l’extérieur, explique la même source bancaire.

Questionné quant aux raisons ayant abouti à la décision de la Banque centrale d’intégrer le yuan dans les règlements commerciaux, le même source l’attribue au fait que la Chine est devenue le premier fournisseur de l’Algérie, et ce, depuis 2013.

En 2014, le pays s’est approvisionné auprès de la Chine pour un montant de 8 milliards de dollars sur une facture globale de 58 milliards de dollars.

Mais un autre responsable bancaire précise que « si la Chine était notre premier fournisseur commercial et que c’était un petit pays, nous n’aurions pas pris cette décision ».

La Chine, explicite-t-il, « devient un acteur majeur dans le commerce mondial, tandis que sa monnaie est au quatrième rang dans les devises utilisées au niveau planétaire. Ce pays veut donc promouvoir l’utilisation de sa monnaie à travers le monde puisque ses échanges commerciaux sont importants ».

Il précise aussi que la décision de la Banque d’Algérie est « le résultat de négociations bilatérales » entre les deux pays, n’ayant pas de lien avec la décision prise, en novembre dernier, par le FMI qui a intégré le yuan dans le panier de devises composant son unité de compte que sont les Droits de Tirage Spéciaux (DTS).

==Avantage à court terme, risque à long terme==

Du côté des experts, certains pensent que cette décision a un avantage commercial certain à moyen terme mais qui pourrait constituer un risque à moyen et long termes, vu la vulnérabilité de l’économie chinoise qui, malgré sa croissance, fait l’objet d’inquiétudes.

« Je trouve que cette décision est excellente du fait de l’importance des échanges commerciaux entre l’Algérie et la Chine. Donc, au lieu de passer par le dollar, les importateurs algériens peuvent, dorénavant, convertir leurs dinars en yuans pour régler leurs factures, ce qui réduira fortement leur risque de change », explique à l’APS l’économiste, Mohamed-Chérif Belmihoub.

Selon lui, cette mesure a certainement un avantage commercial pour les importateurs qui vont profiter de la dépréciation actuelle du yuan face au dollar, et gagner ainsi un différentiel qui pourrait aller jusqu’à 15% sur les prix d’importation.

De surcroît, confirme-t-il, étant donné que la monnaie chinoise n’est pas une monnaie de réserve internationale comme le dollar ou l’euro, elle subit donc moins de fluctuations par rapport à ces devises fortes, ce qui rend le risque de change dinar-yuan très réduit.

Autrement dit, même si le risque de change existe toujours pour un importateur algérien qui ne règle pas sa facture au moment de la négociation du prix (l’équivalent de ce prix en dinars pourrait changer entre le moment de négociation et celui du règlement), ce risque devient moins important quand la devise du règlement est le yuan et dont le taux de change est moins fluctuant.

Cependant, cet avantage pourrait se transformer en risque à moyen et long termes, prévient cet expert qui préconise de ne pas constituer d’importantes réserves en cette monnaie par la Banque d’Algérie puisqu’elle pourrait se déprécier à tout moment.

« Le yuan est une monnaie de transaction internationale mais elle n’est pas encore une monnaie de réserve. Donc, il ne faut pas en détenir par grandes quantités », préconise-t-il.

Selon M. Belmihoub, « même si elle enregistre une croissance, l’économie chinoise reste toujours vulnérable et les opérateurs économiques du monde n’ont pas encore confiance en cette économie et en sa monnaie » en expliquant que la valeur d’une monnaie relève d’une question de confiance auprès des milieux d’affaires du monde.

« Aujourd’hui, les opérateurs n’ont pas grande confiance en l’économie chinoise parce que sa croissance était tirée par la croissance de l’économie mondiale alors que celle-ci est en récession actuellement », relève-t-il.

Il ajoute, toutefois, qu’en détenant les plus importantes réserves de change au monde, avec plus de 3.650 milliards de dollars, la Chine a les capacités de protéger sa monnaie en cas où elle se déprécie à des niveaux très bas.

Par Fatima BOUHACI