Commerce de détail: Calculs d’épicerie

Commerce de détail: Calculs d’épicerie

Le secteur de la vente au détail a énormément progressé en Algérie en l’espace de 30 ans, mais il reste dominé par le petit commerce et de proximité.

Toutes catégories confondues, il existe 825 116 détaillants en Algérie et environ 3 000 surfaces commerciales, 340 supermarchés et 52 hypermarchés. Ramenés à la taille de la population qui est aujourd’hui estimée à plus de 40 millions d’âmes, ces chiffres traduisent un certain équilibre entre l’offre et la demande. Et, hormis les moments des grandes ruées, le consommateur arrive à s’approvisionner correctement tout au long de l’année. Par région, c’est la capitale qui est la mieux achalandée avec 93 100 unités pour environ 3 millions d’habitants.

Elle est suivie par les wilayas de Sétif (40 900 pour 1 489 979 habitants), Oran (37 500 pour 1 454 078) puis Tizi Ouzou (30 200 pour 1 127 607). La wilaya de Ghardaïa, connue pourtant pour le dynamisme de ses commerçants et peuplée de 363 598 âmes n’en possède pour sa part que 8000. D’autre part, 89 375 grossistes fournissent la filière en se ravitaillant eux-mêmes chez 47 230 importateurs ou chez les centaines de milliers d’entreprises industrielles ou agricoles locales. Le commerce, particulièrement celui de l’alimentation, continue d’être monopolisé par les petites boutiques et les épiceries. Les grandes surfaces se multiplient certes depuis une dizaine d’années, mais leur nombre demeure insuffisant.

Elles commencent néanmoins à faire partie des moeurs des consommateurs et font oublier par le foisonnement des marques qu’elles exposent l’austérité des anciens magasins de l’Etat, les fameux Souk El Fellah. Leur progression est en grande partie freinée par une rareté d’un autre genre; celle du foncier. Et puisque «no parking no business» comme l’affirme un adage du marketing, ce type d’activité qui nécessite de vastes aires de stationnement peine à se développer rapidement. Le petit commerce de proximité a donc de beaux jours devant lui contrairement à la tendance observée dans les pays industrialisés. Tant mieux pour les statistiques du chômage qui exploseraient si les échoppes venaient à fermer au profit des grandes chaînes de distribution.

Tant mieux aussi pour les petits producteurs qui ne seront pas ainsi écrasés par le rouleau compresseurs des gigantesques labels. Tant mieux enfin pour les rapports humains que le marchand de quartier permet de maintenir vivaces et chaleureux contrairement aux comportements standardisés créés par les centres commerciaux. Toutefois, le négoce individuel renferme lui aussi un vice rédhibitoire. Lors des grands rushs de consommation comme à l’occasion des fêtes de l’Aïd, le marché est complètement perturbé pendant plusieurs jours par la fermeture des petits commerces. Les boulangeries et les restaurants, dont la main-d’oeuvre est en majorité issue des villes de l’intérieur, sont les plus touchées. L’autre tare qui affecte cette activité concerne la fiabilité des prix et des produits ainsi que l’hygiène dans certains débits.

Les fraudes y sont nombreuses et les contrôles pas assez fréquents. Parfois, lorsqu’une équipe d’inspecteurs investit un secteur, les détaillants baissent le rideau de peur d’être sanctionnés. En tout état de cause, l’Algérien est nettement mieux servi qu’il y a juste une trentaine d’années. On est effectivement loin des années 1980 où les pénuries étaient fréquentes et les marques de produits très peu diversifiées. A l’époque, on pouvait patienter des heures dans des queues interminables pour acquérir un seul article: une plaquette d’oeufs, par exemple, une brassée de pain, un bidon d’huile ou une boîte de tomate concentrée. D’ailleurs, les ménages ont hérité de cette période une psychose de la rareté et à la moindre rumeur de rupture de stock, les consommateurs se précipitent sur les magasins pour constituer des réserves.

L’Algérie n’est pas encore atteinte du consumérisme outrancier. Cela est en grande partie dû à la difficulté d’accéder au crédit de consommation qui encourage les bénéficiaires à vivre au-dessus de leurs revenus. En Tunisie par exemple, l’endettement des ménages a atteint 20 milliards de dinars tunisiens et étouffe la classe moyenne dont les membres éprouvent de grandes difficultés pour rembourser les emprunts. En Algérie, on compte plutôt sur la solidarité familiale et sociale en générale pour sortir des mauvaises passes et celle-ci n’offre pas suffisamment de fonds pour financer des folies.