Commune de Bourouba: Une municipalité en quête d’avenir

Commune de Bourouba:  Une municipalité en quête d’avenir

Bourouba compte 80.000 habitants, mais souffre d’un déficit chronique d’équipements et d’infrastructures. Elle se bat aujourd’hui pour changer son image et se développer.

L’entrée du chef-lieu de Bourouba a quelque chose d’exotique. De part et d’autre, du boulevard central, deux rangées d’Archontophoenix, des palmiers venus du Queensland australien, donnent un air de mangrove à l’artère descendante.

Un peu plus bas, le nouveau siège de la commune, encore en construction, fait face à de beaux jardins fleuris et mis en valeur par des parois en granito. La rue est bien carrelée et propre, même si quelques sachets de chips et de sirop glacé jetés par les enfants s’y baladent au gré des brises.

Un peu plus loin, cependant, sous un préau en tuile, quelques bacs à ordures d’un beau vert clair à l’origine regorgent de sacs poubelles et d’immondices. Vraisemblable-ment, l’auvent devait abriter un fleuriste. Il sert maintenant de dépotoir pestilentiel dans lequel les gens lancent de loin leurs rebuts puisque les bennes à certaines heures sont inaccessibles.

Le centre de la cité La Montagne est assez agréable et convivial. Plusieurs cafés et commerces l’animent. Mais là-aussi une autre décharge trône sur le trottoir.

Le ramassage des ordures et le nettoyage des rues est visiblement le premier problème de la commune. La situation s’est particulièrement aggravée à la veille de l’Aïd El Adha où le foin et les détritus jonchent partout le sol. «Les gens ont une mauvaise image d’eux-mêmes puisqu’ils ont subi depuis toujours le dédain des autorités, dit un vieil habitant du quartier. Ils désespèrent de voir leur situation s’arranger. Alors ils se laissent aller.»

Il existe toutefois des exceptions. Dans la portion centrale des vieux bâtiments de la cité La Montagne, les riverains ont transformé, avec l’aide de l’APC, leur quartier en havre d’organisation et de propreté. Ici, même les enfants tiennent un balai à la main pour enlever les déchets et espèrent qu’une contagion positive gagne tous les quartiers.

«C’est à peine imaginable, mais avant la région était d’une propreté impeccable, raconte Mohamed. Nous étions entourés d’amandiers, de néfliers, de vignobles, de vergers, sans parler de la forêt de la Prise d’eau. Le ramassage des ordures se faisait à dos d’ânes comme à la Casbah.»

D’ailleurs, le découpage des cités imite le modèle de la Casbah avec des ruelles piétonnes, des jardinets intérieurs et des maisons basses en terrasse. La cité ouvrière des Eucalyptus édifiée durant la même période est pour sa part composée de barres de cinq étages. Elle a été prolongée, dans les années 1980, par les HLM de l’Egeco et ainsi, pratiquement, tous les espaces arborés ou agricoles du secteur ont disparu.

Ces cités d’urgence ont été créées par l’administration coloniale, au début des années 1950, pour vider les campagnes de leur population et priver ainsi l’ALN de ses soutiens, estime Aziz, un vieux passionné de l’histoire de La Montagne. «Les déportés venaient pour la plupart de la Wilaya 3 historique et on voit bien qu’il s’agissait d’un calcul politique.»

Depuis, Bourouba qui est située à quelques kilomètres du Centre d’Alger a évolué dans la douleur et l’anarchie. Et à voir l’urbanisme de Boubsila, de Dussolier, de PLM et de la zone des écuries, on se croirait dans la banlieue de Karachi ou de Rio. Les bidonvilles qui se sont greffés, dans les années 1990, à ce tissu vieillissant l’ont davantage dégradé. Certes; toutes les maisons ont été surélevées de plusieurs niveaux et quelques-unes ont l’aspect de belles villas, mais il se dégage de l’ensemble une impression de désordre.

C’est pourquoi le maire s’est lancé dans une opération d’embellissement et d’aménagement des espaces pour conjurer la poisse qui frappe sa commune.

Bourouba possède un stade et un vieux club sportif, le JSHD qui joue en troisième division. «Mais avec 7 millions de dinars par an de subvention que voulez-vous faire» s’emporte Kheir Ketfi, un doyen du tennis et de la cité La Montagne. «Et puis nous attendons toujours la construction d’une autre tribune pour augmenter la capacité du stade», ajoute-t-il.

C’est à la forêt de la Prise d’eau, précise-t-il, que le drapeau algérien a été imaginé par Mohamed Bouras, le fondateur des Scouts musulmans dont le groupe El A’mal (le Travail) de la Montagne est, selon lui, l’une des premières sections.

Une information que confirme Aziz, l’historien amateur. Bien que l’on perçoive une dynamique vers le changement, la municipalité souffre d’un manque notable d’infrastructures. Hormis les écoles, les collèges, un centre de formation professionnelle, une maison de jeunes, une grande salle de sports, très peu d’établissements d’épanouissement social et culturel ont élu domicile à Bourouba. Même la ligne de bus qui portait le numéro 17 a été supprimée dans les années 1980, ce qui a davantage enclavé cette commune.