Retard de diagnostic de six mois à une année, indisponibilité des anticorps pour les examens anatomopathologiques, panne des scanners… aléas de la prise en charge des lymphomes.
“Le lymphome est un cancer qui guérit.” C’est sous cette optique qu’une conférence a été organisée, hier, à Alger, pour marquer la journée internationale de cette forme de cancer. Le slogan perd, toutefois, de son sens en Algérie.
Près de 40% des patients décèdent des suites de la maladie, à cause, essentiellement, du retard important accusé dans l’établissement du diagnostic et, accessoirement, du manque de lits d’hospitalisation dans les services d’hématologie, dans les grandes villes comme à l’intérieur du pays. Ces contraintes qui entravent la prise en charge sont évoquées avec une certaine amertume par la présidente de la Société algérienne d’hématologie, le professeur Oukid, et la coordinatrice nationale du Groupe d’évaluation du lymphome (Geal), le professeur Nadia Boudjerra. Il existe plus de 40 types différents de ce cancer hématologique qui affectent 4% de la population nationale, principalement des sujets jeunes. Les lymphomes hodgkiniens et non hodgkiniens sont les formes les plus fréquentes en Algérie, malheureusement parmi les plus agressifs aussi, c’est-à-dire à évolution rapide (plus de
1 000 nouveaux cas sont enregistrés chaque année). Et c’est justement là où le bât blesse. Les praticiens sont unanimes. Le lymphome est un cancer curable, pour peu qu’il soit diagnostiqué à un stade précoce. Les patients arrivent, néanmoins, en première consultation en hématologie, alors que la maladie a progressé au stade 3 ou 4, soit à l’état métastatique pratiquement. Le patient lui-même ne s’inquiète pas vraiment de l’apparition d’un petit ganglion indolore. Il ne pense voir un médecin que quand le nodule augmente de volume. Commence alors une longue errance d’un médecin spécialiste à un autre. “L’exploration prend du temps aussi et elle est onéreuse”, souligne le Pr Boudjerra. “Nous avons des difficultés pour la biopsie scano-guidée et l’anapath”, poursuit sa consœur, le Pr Oukid. De nombreux services d’anatomie pathologique ne disposent pas d’anticorps. Ils ne peuvent donc confirmer le cancer. Le prélèvement est ballotté entre deux à trois laboratoires avant d’être analysé dans les normes requises. Les scanners sont souvent en panne dans les hôpitaux. “Tous les patients ne peuvent pas assumer les prix pratiqués par le privé”, relève-t-elle. Le cas est confirmé après un véritable parcours du combattant. Apparaît alors le problème de disponibilité des places d’hospitalisation. “Nous manquons de lits pour hospitaliser tous les patients. La priorité est donnée aux personnes atteintes de leucémie aigüe. Par défaut, on prend en charge nos malades en hôpital de jour”, explique la chef de service d’hématologie au CHU Beni-Messous. Est-ce efficace ? La question reste sans réponse. La seule éclaircie dans ce tableau sombre est la disponibilité des traitements, y compris l’immunothérapie.
Souhila H.