Le mercredi 8 juin 2022, en conséquence de la volte-face de Madrid sur la question du Sahara occidental pour soutenir le plan marocain, l’Algérie a décidé de rompre le « traité d’amitié, de bon voisinage et de coopération » qui la liait avec l’Espagne depuis 2002. Cela a entraîné, notamment, le gel des opérations bancaires entre les deux pays, donc la suspension du commerce extérieur.
Brouille avec l’Algérie, une facture économique salée pour l’Espagne
Depuis, les échanges économiques entre l’Espagne et l’Algérie ont été durement affectés et six mois après l’adoption de ces mesures de représailles, le manque à gagner pour les entreprises ibériques se chiffre en centaines de millions d’euros. Seul se poursuit l’approvisionnement en gaz, mais avec une révision des prix à la hausse, comme l’a annoncé Sonatrach le 6 octobre dernier lors de la conclusion du contrat avec son client espagnol, Naturgy.
Entre juin et juillet 2022, un mois seulement après la rupture du traité d’amitié, les exportations de l’Espagne vers l’Algérie ont chuté à 94 millions d’euros, contre 329 millions au cours de la même période en 2021. Un manque à gagner pour l’économie ibérique qui s’élève donc à 235 millions d’euros (statistiques du ministère espagnol du Tourisme, de l’Industrie et du Commerce).
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Quatre mois plus tard, le montant des pertes a doublé pour atteindre la somme de 487 millions d’euros (chiffres officiels). En effet, le ministère espagnol du Commerce a indiqué qu’entre juin et septembre 2022, les exportations vers l’Algérie ont à peine atteint 138 millions d’euros, alors que sur la même période en 2021, celles-ci ont plafonné à 625 millions d’euros.
Touchées de plein fouet, les entreprises espagnoles attendent une solution
Aujourd’hui, six mois après la décision de l’Algérie de rompre le traité d’amitié et de coopération avec l’Espagne, les exportations sont bloquées, les investissements gelés, les projets paralysés et les échanges économiques entre les deux pays restent au point mort. Devant cette situation inédite et complexe, les entreprises espagnoles payent un lourd tribut.
Julio Lebrero, patron d’Aecomhel, une PME de fabrication d’engins de travaux publics dont la quasi-totalité de l’activité se réalise Algérie, déclare à l’AFP que depuis juin, son entreprise ne peut ni exporter ni importer. « Toutes les opérations sont en stand-by, se désole-t-il. Cela fait six mois que nous n’avons pas facturé un seul euro ». Il faut savoir toutefois que la crise affecte également certaines PME algériennes qui dépendent des matières premières et des pièces de rechange importées d’Espagne.
BTP, céramique, textile… dans de nombreux secteurs, « tout est à l’arrêt », signifie à l’AFP le président du Cercle de commerce et d’industrie algéro-espagnol (CCIAE), Djamel Eddine Bouabdallah. Pour contourner le gel des opérations bancaires depuis et vers l’Algérie, « certains groupes espagnols font transiter leurs marchandises via des pays tiers ». Cette opération très onéreuse n’est, cependant, à la portée que des grandes entreprises.
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Devant cet imbroglio qui tarde à se résoudre, les chefs d’entreprise espagnols se découragent. « On a demandé de l’aide aux autorités, mais sans obtenir de réponse », déplore une porte-parole de l’Anffecc, une association de fabricants de céramique, secteur très dépendant du marché algérien. Julio Lebrero dénonce : « Le gouvernement nous a complètement abandonnés ». Quant à M. Tapia, il espère une « solution rapide », car « la situation actuelle, juge-t-il, n’est bonne pour personne. »