Un rapport sénatorial rendu public mercredi 5 février recommande au gouvernement de réévaluer l’accord de coopération migratoire signé entre la France et l’Algérie en 1968. Cette proposition, perçue comme une « provocation » par les sénateurs socialistes, s’inscrit dans un contexte de tensions accrues entre Paris et Alger.
Vers une remise en cause de l’accord migratoire franco-algérien de 1968 ?
La mission d’information, initiée au printemps 2024 par la Chambre haute pour analyser les accords migratoires internationaux, a abouti à des conclusions contrastées. Son rapport préconise d’ouvrir une nouvelle phase de négociations avec l’Algérie afin de rééquilibrer les modalités particulières régissant l’admission et la circulation des ressortissants algériens sur le territoire français. Si ces discussions échouent, le Sénat recommande de « tirer les conséquences d’un éventuel échec (des négociations) en mettant fin à l’application de l’accord ».
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Le débat, hautement sensible, s’inscrit dans un contexte diplomatique déjà fragile entre les deux pays. « Nous devons sortir de l’immobilisme. L’histoire complexe et douloureuse entre nos deux pays ne peut pas justifier un régime dérogatoire en faveur de l’immigration algérienne », a déclaré Olivier Bitz, sénateur du parti Horizons et corapporteur de la mission avec Muriel Jourda (Les Républicains). Ce point de vue, partagé par une large majorité des sénateurs de droite et du centre, a conduit à l’adoption du rapport par la commission des Lois.
Réforme nécessaire ou provocation inutile : la France partagée
Toutefois, cette proposition a provoqué une vive réaction à gauche. Corinne Narassiguin, représentante socialiste au sein de la mission d’information et initialement corédactrice du rapport, a pris ses distances. « Remettre en cause cet accord est une provocation inutile. Cela ne bénéficie ni à la France ni à l’Algérie et envoie un message préoccupant aux Algériens et Franco-Algériens vivant en France », a-t-elle déclaré, exprimant ainsi son opposition à toute révision radicale de l’accord.
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L’accord du 27 décembre 1968 octroie aux citoyens algériens un statut migratoire spécifique, leur permettant notamment une entrée facilitée en France et un accès simplifié à un titre de séjour de dix ans. Sa remise en question relance un débat de longue date sur les relations franco-algériennes et la politique migratoire française.
Cette recommandation sénatoriale fait écho aux récentes déclarations du ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, qui s’est montré critique envers le gouvernement algérien. Estimant que cet accord est « dépassé » et qu’il a « faussé les flux migratoires », il souhaite rouvrir le dossier afin d’adapter la coopération migratoire aux enjeux contemporains.
Reste à savoir si l’exécutif suivra ces préconisations, au risque d’aggraver les tensions diplomatiques avec Alger, ou s’il optera pour une approche plus mesurée afin de préserver l’équilibre des relations bilatérales.
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