Datte algérienne : Deglet Nour veut se relancer à l’export

Datte algérienne : Deglet Nour veut se relancer à l’export

Durant le premier semestre 2019, notre pays a exporté 27 000 tonnes, d’une valeur de 45 millions de dollars, en hausse de 70% par rapport à la même période de 2018.

L’Algérie dispose de tous les atouts qui lui permettent de devenir un acteur mondial de la datte. De par sa production en nette progression et les exportations qui ont enregistré un accroissement considérable de plus de 250% en volume ces cinq dernières années, notre pays est en mesure de s’offrir la place de leader sur le marché international. L’Algérie produit plus d’un million de tonnes de dattes annuellement. Les exportations sont passées de 21 000 tonnes à 52 000 tonnes entre 2013 et 2018 soit une progression de 250%.

Avec une moyenne des prix estimée à 1 430 dollars/tonne, la valeur des exportations a connu une hausse de 200%. Durant le premier semestre 2019, (avant le mois de Ramadhan) notre pays a exporté pour  27 000 tonnes, d’une valeur de 45 millions de dollars, en hausse de 70% par rapport à la même période de 2018.

Cependant, l’Algérie n’exporte pas une datte de qualité. Presque la totalité des quantités exportées sont de qualité inférieure. La variété “Deglet Nour”, reconnue de qualité supérieure, n’est exportée qu’en quantités infimes. La raison principale à l’origine de ce fait est que les responsables de cette filière n’ont pas pu construire un marché de niches pour cette variété. Car, il s’agit d’une datte molle et très fragile dont la maîtrise de la chaîne du froid reste impérative.

Ce qui rend la “Deglet Nour” un produit difficile à transporter. Et par conséquent, la chaîne logistique ne peut être maîtrisée. En termes plus clairs, entre le moment de la collecte et la mise en container réfrigéré, cela dure environ un mois. Pour obtenir un container réfrigéré auprès d’une compagnie maritime, cela prend un mois, faute de disponibilité de ce type d’équipement.

Il faut également savoir dénicher des niches de marchés d’autant plus qu’il existe des clients qui peuvent payer des dattes de très bonne qualité (“Deglet Nour”) jusqu’à 12 euros. Elle est classée de très grande valeur dans les pays gros consommateurs tels que ceux du Golfe. Mais la fragilité de sa conservation et la difficulté de son transport font que ce produit reste moins valorisé.

L’autre raison est que sur le marché local, l’on enregistre une forte demande en dépit de son prix, 700 DA/kg, un tarif très rémunérateur pour le producteur qui préfère la vendre localement au lieu de la commercialiser ailleurs pour un prix de 12 euros/kg. Il faut noter que la première destination de la datte algérienne est la France. Trois principaux importateurs de l’Hexagone accaparent la moitié des quantités de dattes algériennes exportées. Celles-ci font de la France un pays exportateur de dattes.

Elles sont transformées légèrement puis réexportées. “Le problème de la datte algérienne du Grand Sud a trait au taux élevé de son infestation”, déplore Ali Bey Nasri, président de l’Association nationale des exportateurs algériens (Anexal). Cette problématique semble ne pas être prise en charge convenablement par les responsables du secteur.

Ce n’est pas le cas de la Tunisie qui a mieux organisé sa filière. Elle est classée premier exportateur au monde avec, au tableau, des recettes de 250 millions de dollars/an alors que sa production, évaluée à 250 000 tonnes, ne représente que le quart de la production algérienne.

Ce pays “a mis en place une politique de diversification pour éviter le marché français et aller vers de nouveaux marchés notamment ceux d’Amérique latine et d’Asie”, explique M. Nasri. En Algérie, ils achètent carrément des palmeraies des meilleures dattes de Tolga. Ils sont équipés de stations de conditionnement modernes et performantes et procèdent à la mise en conformité du produit pour l’exporter dans les conditions exigées et les normes requises en la matière par les pays demandeurs. Les Tunisiens ont également développé un réseau commercial à l’international qui leur facilite le déroulement de ces opérations d’exportation.

L’Algérie, premier concurrent de la Tunisie
Par ailleurs, une étude effectuée par des Tunisiens a conclu que la datte algérienne représentera une “menace” pour la Tunisie et l’Algérie deviendra à moyen terme le premier exportateur mondial. D’où la nécessité, suggère Ali Bey Nasri, d’organiser des assises nationales afin de déterminer une stratégie spécifique à cette filière. Cela passe par un diagnostic et la mise en place de conditions de conservation idoines pour ce produit. L’on note seulement 1% des quantités exportées qui sont aux normes internationales.

C’est-à-dire qui respectent la chaîne de sécurité alimentaire, notamment le système HACCP (une méthode de maîtrise de la sécurité sanitaire des denrées alimentaires), Iso 22 000, IFS, BRC… L’absence de tous ces standards internationaux font que la datte algérienne est peu présente dans les grandes chaînes de distribution.

L’autre contrainte à laquelle fait face la filière concerne la spéculation imposée par certains individus dotés de moyens financiers et matériels qui accaparent la production au Sud. Ils achètent la datte à 100 DA et la stockent dans les chambres froides pour la ressortir avant le mois de Ramadhan et la vendre sept fois plus cher. Ce type de comportement freine les initiatives à l’exportation.

Et la taille critique de production constitue un paramètre important pour satisfaire la demande étrangère de la datte, voire de tous les produits agricoles. Or, les capacités de production de notre pays demeurent faibles pour répondre aux besoins des pays étrangers.

D’où, l’absence de la datte algérienne dans les chaînes de distribution outre-mer. Face à cette situation, “il est urgent de réunir tous les acteurs du marché dont les producteurs, les collecteurs, les distributeurs, les exportateurs autour d’une table afin d’organiser la filière, élaborer une stratégie à l’export, corriger les dysfonctionnements et partir avec force à la conquête des marchés étrangers tels que ceux d’Amérique latine, de Turquie, de Malaisie, d’Indonésie, de Chine…”, propose M. Nasri. L’Algérie a exporté en 2018, 22 000 tonnes vers la France, la Russie (5 000 t), le Maroc (2 000 t). Elle reste absente, toutefois, dans des pays comme la Malaisie, l’Indonésie, la Turquie, la Chine…
Badreddine KHRIS