Farid Messaoud
Un nouveau rapport de l’Institut Montaigne estime les besoins de financement du développement en Afrique à plus de 600 milliards de dollars par an.
Des pays d’Afrique s’efforcent de concrétiser les Objectifs de développement durable (ODD). Que signifie le terme ODD ? Il s’agit de dix-sept objectifs établis par les Etats membres des Nations-unies et qui sont rassemblés dans l’Agenda 2030. Cet agenda a été adopté par l’ONU en septembre 2015 après deux ans de négociations incluant les gouvernements comme la société civile. L’initiative englobe des objectifs généraux comme éradiquer la pauvreté, protéger la planète et garantir la prospérité pour tous. Ces objectifs sont-ils encore atteignables ? Ces Etats ont de gros besoins financiers et risque, de ce fait, de rater le coche. Un nouveau rapport de l’Institut Montaigne estime les besoins de financement du développement en Afrique à plus de 600 milliards de dollars par an. Mais tout le monde sait qu’il existe un gap entre les besoins en matière de développement et la capacité des pays d’Afrique de répondre à ces besoins.
Dans ce registre d’ailleurs, le rapport de ce think-tank explique que les Etats africains mobilisent encore insuffisamment leurs ressources domestiques. Cela, y est-il ajouté, pèse non seulement sur la capacité des Etats à financer des services publics efficients, mais aussi sur l’attractivité de l’économie. Et, la situation n’est pas près de changer dans des économies africaines, centrées en grande partie sur les matières premières, insuffisamment compétitives et peu génératrices de valeur ajoutée localement. Que doit-on faire alors ? Le think-tank recommande de s’appuyer sur les ODD pour faire du partenariat UE-Afrique un espace de réciprocité et d’équilibre mondiales, tout en développant l’intégration régionale. L’Europe et l’Afrique doivent, a-t-il ajouté, travailler ensemble pour un partenariat «fort et renouvelé », d’autant que les deux continents sont liés par de « multiples enjeux et intérêts communs ». Et de poursuivre : l’Europe et l’Afrique forment une communauté de destin dans un contexte en « perpétuelle évolution.
Les deux entités doivent travailler ensemble sur la diplomatie, le multilatéralisme et l’influence internationale, sur l’économie, le développement et les finances, sur la sécurité et la défense et sur le changement climatique et la mobilité humaine. Parmi les priorités d’un partenariat et une croissance économique « mutuellement bénéfiques », l’Institut Montaigne cite l’environnement des affaires, l’insécurité juridique et la corruption qui nuisent, selon lui, à l’attractivité des pays africains pour les entreprises européennes comme africaines, tandis que les besoins en infrastructures sont considérables. Il faut dire que la corruption ronge plusieurs pays d’Afrique et leur fait perdre du terrain dans les classements établis par certaines ONG. Si un pays est mal classé, cela affecte l’attractivité. Toutefois, des pays font l’effort de lutter contre ce phénomène. Des pays où les indices de corruption d’agents publics ou privés sont suffisamment probants et connus pour que les enquêtes soient menées à terme.
Dans le volet de l’industrialisation et l’insertion dans l’économie mondiale, l’Afrique ne représente aujourd’hui que 2 % des chaînes de valeur. Cela doit changer et le think-tank propose des pistes de réflexion, estimant ainsi qu’il y a nécessité de « repenser le paradigme » du partenariat UE-Afrique, partager une vision commune du partenariat. Concernant l’intégration régionale, l’Institut Montaigne relève que le commerce intra-africain représente « moins de 18 % » des échanges du continent, soulignant que le succès récent de l’entrée en vigueur de la Zone de libre-échange continentale (ZLEC) ne doit pas « masquer » les défis futurs de l’intégration régionale africaine. Par ailleurs, il note que la formation professionnelle est « marginalisée » au sein des financements européens destinés à l’éducation et inadaptée aux besoins des entreprises et des économies du continent africain, qui devra accueillir 30 millions de jeunes sur son marché du travail chaque année.
Si l’Union européenne engage des moyens importants et mobilise une palette d’outils étendue, son action souffre tout à la fois d’un manque de visibilité, de lisibilité et d’efficacité. Afin de maximiser son impact, il convient pour l’Europe de favoriser l’assistance technique à l’appui budgétaire, d’orienter ses actions vers le secteur privé européen et africain – PME en tête -, et de mesurer la contribution en termes d’effet de levier généré plutôt que de montants engagés, explique le rapport, suggérant un financement mixte par des ressources publiques et des tiers privés qui doit prendre de l’ampleur.