A l’heure où l’investissement public décroît de 20,1% au titre des arbitrages budgétaires conclus dans l’avant-projet de loi de finances 2020, le privé, bien qu’il soit incapable en l’état actuel des choses de remplacer l’investissement budgétaire, tente tant bien que mal de reprendre du poil de la bête.
Conscient de la gravité de la situation économique dans laquelle se débat le pays, le patronat se met en ordre de bataille, tantôt pour alerter sur une incertitude politique peu propice à l’investissement, tantôt sur la persistance des problèmes qui ont fait de l’entreprise ce qu’elle est aujourd’hui. C’est le cas du FCE qui, après des années passées dans le giron du pouvoir, du temps d’Ali Haddad, revient sur le devant de la scène pour défendre les intérêts de l’économie et des chefs d’entreprise. Son université d’été, tenue, hier à Alger, se veut une tentative de se reprendre après l’organisation ait été assommée, il faut le dire, par l’emprisonnement de son ancien président, Ali Haddad, présumé impliqué dans des affaires de corruption.
Le FCE tente de faire peau neuve et de changer sa façon d’être. Les autres organisations patronales qui, jadis, n’hésitaient aucunement d’assumer leur rôle de partenaire social, s’éternisent dans un silence assourdissant alors que la situation économique requiert la mobilisation de toutes les forces du monde du travail. Exception faite du FCE qui tente de se refaire une virginité au lendemain de sa gestion par Ali Haddad, les autres organisations patronales siégeant dans la tripartite, à savoir la CNPA, la CAP, la CIPA et la CGEA, sont comme dans une posture d’observateurs passifs. Certes, la vague d’arrestations qui a affecté la communauté d’affaires algérienne a fini par jeter du discrédit quant au rôle et à l’utilité des organisations patronales, mais les prochains mois connaîtraient des situations difficiles où les rencontres tripartites se révèleront nécessaires pour fédérer le patronat, les représentants des travailleurs et le prochain exécutif autour d’objectifs et de défis communs. Ils ne seront pas des moindres. Les trois partenaires auront des équations pour le moins complexes et sensibles à résoudre, dont l’absorption des milliers de nouveaux arrivés sur le marché de l’emploi, l’adaptation des cursus universitaires aux besoins des entreprises, l’employabilité des diplômés des universités et des centres de formation, le financement de l’investissement au temps de la crise et du tarissement des ressources conventionnelles, les accords commerciaux internationaux et leur impact sur l’Algérie, l’inévitable réforme du secteur bancaire et financier, refonte du système fiscal… autant de problématiques qui s’offrent d’ores et déjà au gouvernement et à ses partenaires sociaux traditionnels. Cependant, au vu de la situation dans laquelle se débattent les organisations patronales, l’on se demande si celles-ci sont en mesure désormais de faire équipes avec les prochains gouvernements post-révolution, d’autant plus qu’il s’agira de s’investir plus qu’avant dans la légitimité, tant chez les prochains gouvernements que chez ses partenaires sociaux. Il va sans dire que le premier mot d’ordre serait celui de remettre le train de l’investissement en marche afin de créer une croissance suffisante pour absorber le chômage et les tensions sociales. Il sera ensuite nécessaire de créer un second contrat social en redonnant à la notion du travail ses lettres de noblesse. Pour le patronat algérien, le défi essentiel et urgent à relever serait celui de retravailler son image suffisamment écornée par les derniers évènements qui se sont soldés par l’emprisonnement de bon nombre de chefs d’entreprises.