A son corps défendant, la jeune démocratie tunisienne a aligné de rudes épreuves, entre attentats terroristes épisodiques et menées sournoises de fondamentalistes et d’autres parties, mais s’en est à chaque fois sortie, comme l’illustre la toute dernière en date, avec le décès du président Béji Caïd Essebsi, dans la matinée de jeudi, jour de la Fête de la République.
Eplorées mais dignes, les institutions tunisiennes ont surmonté leur douleur pour se conformer strictement à la Constitution et introniser Mohamed Ennaceur, le président de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), autrement dit le Parlement, afin d’assurer l’intérim à la présidence de la République tunisienne, quelques heures après le décès de Caïd Essebsi, après avoir prêté serment devant le bureau de l’ARP en raison de l’impossibilité de convoquer une plénière.
Ennaceur succède, pour une durée de 45 à 90 jours, à Caïd Essebsi qui a succombé, à l’âge de 92 ans, à des ennuis de santé qui lui ont valu trois séjours à l’hôpital militaire de Tunis depuis le 27 juin dernier. Il en sortira quelques jours après la première hospitalisation pour signer, le 1er juillet, la convocation du corps électoral appelé à élire le nouveau président de la République tunisienne lors du scrutin initialement prévu le 17 novembre prochain.
Un projet qui, malheureusement pour nos voisins de l’Est, ne connaîtra pas son processus prévu puisque la succession à feu Caïd Essebsi, élu en 2014, trois ans après la chute de Ben Ali, interviendra plus tôt.
En effet, le délai imparti par la Constitution à l’intérim d’Ennaceur ne prévoit pas plus de 90 jours, donc des élections devront avoir lieu avant le 17 novembre. Ainsi, il a été décidé que l’élection présidentielle soit avancée au 15 septembre 2019, a annoncé Hasna Ben Slimane, la porte-parole de l’Instance supérieure indépendante pour les élections (ISIE), citée par l’agence tunisienne TAP, jeudi à la suite d’une réunion du conseil de l’ISIE qui, en conséquence également, a décidé d’ouvrir les candidatures à la présidentielle à partir du 2 août 2019. Ainsi, le calendrier devant aboutir à doter la Tunisie d’un nouveau président de la République s’en retrouve totalement chamboulé, tel que l’illustre la réduction de la durée de la campagne électorale qui passe de 21 à 12 jours, à compter du 2 septembre afin de se conformer, donc, aux délais fixés par la Constitution.
C’est donc à une nouvelle étape que doit faire face la démocratie tunisienne qui, à travers son défunt président, depuis l’annonce officielle du décès de ce dernier, a empilé les hommages du monde entier et verra même l’ONU consacrer une session spéciale de l’Assemblée générale, jeudi prochain, afin de rendre hommage à Béji Caïd Essebsi, cet homme de cette bonne vieille école qui a marqué son pays singulièrement à deux périodes charnières de son histoire, l’après-indépendance et, celle plus proche de nous, la délicate période post-révolution de 2011 qui le verra de nouveau s’impliquer dans la vie politique, après une éclipse datant de 1994. Sa réapparition, le regretté Béji Caïd Essebsi la signera en se faisant nommer Premier ministre en février 2011 en remplacement de Mohamed Ghannouchi jusqu’en décembre de la même année, suite à l’élection de l’Assemblée constituante, pour ensuite décider avec quelques compagnons de s’opposer à Ennahdha en créant Nidaa Tounes, un parti destiné à rassembler l’opposition aux islamistes.
Azedine Maktour