Derrière les poignées de main, où en est vraiment le tandem France-Algérie ?

Derrière les poignées de main, où en est vraiment le tandem France-Algérie ?

Après des mois d’une brouille diplomatique profonde, marquée par des tensions visibles et des rancunes historiques, Paris et Alger ont officiellement repris langue. Mais si les caméras ont capté les poignées de main, les discussions réelles, elles, se sont déroulées loin des micros. Ce retour au dialogue, enveloppé de discrétion, soulève donc plus de questions qu’il n’apporte de réponses.

La visite du ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, à Alger aurait pu marquer un tournant décisif dans les relations franco-algériennes. Mais à défaut de révélations concrètes, c’est le silence qui a occupé le devant de la scène.

Officiellement, les deux pays s’engagent à relancer une coopération « dans tous les secteurs », mais l’absence de détails tangibles et l’évitement systématique des sujets sensibles suscitent scepticisme et interrogation, autant en France qu’en Algérie.

Relations Algérie – France : entre main tendue, silence et questions qui fâchent

Récemment, après une longue entrevue de deux heures et demie avec le président Abdelmadjid Tebboune et le ministre des Affaires étrangères Ahmed Attaf, Jean-Noël Barrot a évoqué une volonté commune de « tourner la page ». Pourtant, aucun communiqué précis, aucun accord détaillé, aucune mesure annoncée. Le discours est resté vague, presque évasif.

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Pourquoi tant de discrétion ? D’après certaines sources diplomatiques françaises, il s’agirait d’une tactique visant à ne pas offrir de prises aux discours extrémistes de part et d’autre. Une manière aussi de protéger les fragiles avancées, alors même que les désaccords sur des sujets clefs (immigration, sécurité, mémoire historique) sont loin d’être réglés.

Sansal, OQTF… Des dossiers sensibles soigneusement évités

Les observateurs n’ont pas manqué de remarquer les sujets absents des discussions publiques, notamment :

  • Le cas de Boualem Sansal, écrivain franco-algérien condamné à cinq ans de prison pour des propos jugés attentatoires à l’intégrité du territoire.
  • La question des ressortissants algériens expulsables, que la France souhaite voir rapatriés selon l’accord de 1994.
  • Les dossiers sécuritaires et judiciaires, cruciaux dans le partenariat bilatéral.
  • L’absence de retour de l’ambassadeur d’Algérie à Paris, toujours en suspens.

Autant de points de friction que les deux parties ont préféré reléguer hors de la lumière.

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Bruno Retailleau : « Ce que j’attends, ce sont des résultats »

« Très bien, la diplomatie reprend », a déclaré Bruno Retailleau, figure de la droite française, avant d’ajouter : « Ce que j’attends, ce sont des résultats ». Une phrase qui illustre bien l’ambivalence de la situation actuelle. Car si le dialogue semble reprendre, les contentieux profonds ne sont pas résolus. Loin s’en faut.

Même son de cloche du côté de Bruno Fuchs, président de la commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale française : « On est aujourd’hui dans un début de retour à la normale », dit-il, mais ajoute que des gestes concrets, comme la libération de Boualem Sansal, seraient les véritables signes d’une normalisation assumée.

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En somme, la visite du chef de la diplomatie française en Algérie marque un retour au dialogue entre Alger et Paris. Mais derrière les discours convenus, les désaccords profonds restent nombreux.