Pour le gouvernement Bedoui, qui semble s’effacer complètement de la scène, le plus dur reste à faire et sa survie, du moins politique, dépend de la maîtrise et de la conduite d’un des plus gros dossiers annuels, à savoir la préparation de la loi de finances et la codification budgétaire du prochain exercice.
Alors que la situation financière du pays donnait des sueurs froides aux précédents gouvernements, l’actuel Exécutif, qui manque de la légitimité nécessaire à même de faire face aux défis économiques qui s’offrent au pays, aura du mal à préparer la prochaine loi de finances, d’autant plus que les arbitrages sont pour le moins complexes et douloureux. Habituellement, les ordonnateurs sont notifiés vers la fin juillet et/ou début août pour l’estimation de leurs budgets aux fins de préparer la fiche des dépenses prévues pour l’année suivante. Or, si l’impasse politique venait à perdurer au-delà de juillet, fin du délai légal accordé à l’actuel gouvernement pour préparer les élections, il serait probable que le même Exécutif serait reconduit et que lui reviendrait la mission de gérer les arbitrages budgétaires au titre du prochain exercice. La mission est hautement risquée, étant donné que la situation financière du pays est sur le fil du rasoir, ce qui nécessitera des mesures de fond et de rupture capables de ralentir la fonte de réserves de change, l’aggravation des déficits, faire repartir la croissance, rationnaliser les dépenses, lutter contre le gaspillage, faciliter l’investissement… La Banque d’Algérie a sonné l’alerte la semaine dernière quant à une situation qui vire vers le rouge vermeil ; tous les indicateurs internes et externes sont au rouge. « Les diminutions annuelles des réserves de change, liées aux déficits du solde global de la balance des paiements, traduisent l’excès de la dépense intérieure brute de l’ensemble des agents économiques sur le revenu national ; autrement dit, quasiment l’excès des importations de biens et services sur les exportations. Dans les faits, ces déséquilibres sont générés par les importants déficits des finances publiques», lit-on dans la dernière note de conjoncture de la Banque d’Algérie. Cette institution a souligné qu’il y a nécessité d’engager des « efforts d’ajustement soutenus, notamment budgétaire, pour rétablir la viabilité de la balance des paiements et limiter l’érosion des réserves officielles de change». «Ces efforts devraient s’intégrer dans un vaste programme de réformes structurelles pour améliorer le recouvrement de la fiscalité ordinaire (y compris par la rationalisation des subventions), libérer le fort potentiel de croissance de l’économie nationale et diversifier l’offre domestique et les exportations de biens et services », a précisé la Banque d’Algérie. Il va sans dire qu’une partie de ces réformes est d’ordre budgétaire, ce qui nécessite une prise en charge juridique dans le cadre d’une loi de finances. Cependant, ces réformes exigées par la conjoncture sont si complexes qu’il faudra l’adhésion de l’ensemble des contribuables pour leur fiabilité. L’exercice s’annonce plus complexe pour un gouvernement en mal de légitimité, voire rejeté par l’ensemble du peuple auquel il sera exigé les sacrifices nécessaires au rétablissement de la viabilité des finances publiques. De tradition, le volet budgétaire des lois de finances n’est pas aussi décrié que le volet fiscal qui est souvent sujet à d’interminables polémiques. En tout cas, les semaines à venir s’annoncent très dures pour l’actuel gouvernement, d’autant plus que le délai légal pour l’accomplissement de sa mission, qui se résume faut-il le rappeler à la gestion des affaires courantes et à l’organisation d’un scrutin, tire à sa fin. L’urgence est naturellement économique, mais la prise en charge de cette urgence nécessite une solution consensuelle à la crise politique que vit le pays, ce qui est loin d’être réalisable en l’état actuel des choses. La situation financière ne fait que se complexifier.n