Lors de ce 25e Maghreb des livres qui s’est tenu du 8 au 10 février, plusieurs auteurs étaient présents à cette édition, à l’instar d’Amin Zaoui ou encore Tassadit Yassine, qui ont profité de cette occasion pour s’exprimer sur la place de la littérature algérienne.
Les vastes espaces de l’Hôtel de Ville de Paris ont accueilli du 8 au 10 février 2019 un grand nombre d’écrivains, éditeurs, conférenciers, journalistes et visiteurs venus découvrir les nouveautés de la deuxième édition du Maghreb-Orient des livres (et la 25e du Maghreb des livres). Les littératures syrienne, palestinienne, libanaise, égyptienne, algérienne, tunisienne, marocaine, etc. ont donné lieu à des échanges entre auteurs, conférenciers, journalistes et public. L’engouement est visible devant des milliers d’ouvrages exposés où le livre algérien se taille la part du lion. C’est dans cette ambiance livresque que nous avons sollicité quelques auteurs pour donner leur avis sur la littérature algérienne.
Pour Farida Belkacem (sœur de l’ancien patron de presse Kamel Belkacem), ingénieure agronome et écrivaine, “la littérature algérienne se fraie un chemin parmi les grands. Des écrivains sont en train de porter la littérature algérienne aux sommets de la littérature mondiale, comme Yasmina Khadra, Boualem Sansal, Kamal Daoud… Cette littérature permet aussi à la femme de s’exprimer de plus en plus depuis Assia Djebar jusqu’à Rabia Djelti, Ahlem Mostaghenemi, Maïssa Bey et d’autres. Sur la question de la langue, si la littérature arabophone est plus prolifique, celle d’expression française a cependant un avenir en Algérie, car beaucoup de jeunes apprennent cette langue qui est considérée comme un moyen d’ouverture sur le monde”.
Sur cette question, le romancier Boualem Sansal estime que “la littérature algérienne est en train d’exploser, que ce soit en Algérie ou à l’international, en France, en Allemagne, en Norvège… Il y a un processus nouveau qui voit des jeunes gens et jeunes filles de 20 ans qui écrivent. Cette littérature perce et gagne ses galons. Elle a évolué sur tous les plans : qualité, thématiques, management de la chose parce qu’une carrière littéraire, ça se travaille. Partout, j’entends dire que la littérature algérienne évolue bien, réussit et se vend très bien”.
Quant à la chercheuse et écrivaine Tassadit Yacine, elle considère que “la littérature algérienne évolue, prend un autre visage, car il y a plus de liberté d’expression qu’il y a une dizaine d’années par exemple. De plus en plus d’auteurs s’expriment librement par rapport au religieux, aux femmes, aux langues et c’est positif, car avant, les choses étaient non dites ou feutrées. La thématique a évolué. Pour les écrivains des années 1950, le combat était contre la colonisation ; aujourd’hui, ils écrivent sur leur temps et sont plus directs.
En plus des littératures arabophone et francophone, celle d’expression amazighe est en train d’émerger et il faut attendre que ça se décante pour apprécier”. Selon Amin Zaoui, “si la poésie recule un peu, le roman avance, cela signifie que les narrateurs, les producteurs de textes, essaient de témoigner et investissent le champ social pour en exprimer les évolutions et les bouleversements. La forme arabophone de cette littérature a connu aussi une évolution significative à partir des années 2000 et la thématique essentielle tourne autour de la tragédie de la décennie noire. Elle est aussi caractérisée par l’arrivée de beaucoup d’écrivaines.
Quant à la littérature d’expression amazighe, elle est sortie du folklore, du conte, de la poésie pour investir les thématiques sociétales”. Enfin, l’universitaire, présidente de la CICLM (Coordination internationale des chercheurs sur les littératures maghrébines), Jeanne F. Vernier, nous a indiqué que “la littérature algérienne émerge de façon remarquable ces dernières années et aborde des sujets qui étaient tabous, il y a peu de temps, comme les évolutions sociétales, la sexualité, ou encore les revendications liées à la liberté en général. C’est une littérature très vivante qui mérite d’être découverte par le public”.
A. B.