Des militants s’attendent à des mesures d’apaisement : L’appareil judiciaire accélère les poursuites

Des militants s’attendent à des mesures d’apaisement : L’appareil judiciaire accélère les poursuites

Les deux militants du mouvement associatif RAJ seront présentés, aujourd’hui, devant le procureur de la République près le tribunal de Sidi M’hamed à Alger pour des faits qui ne sont pas encore connus. Il s’agit en l’occurrence de Ahcene Kadi et Karim Boutata, arrêtés jeudi à Alger, par des agents civils et conduits vers la brigade de Bab Edjdid. A Constantine, les jeunes Amazigh Semmani et Ameziane Tenfiche seront présentés, mercredi prochain, devant le tribunal correctionnel de Constantine. Ils sont poursuivis pour « atteinte à l’unité nationale » et exhibition du drapeau amazigh. Un acte énoncé dans l’article 79 du code pénal qui concerne en principe des actes graves comme l’espionnage ou le terrorisme et non l’exhibition d’un étendard identitaire.

Depuis plusieurs semaines, des activistes sont arrêtés pour leur « engagement politique » et des citoyens lambda pour avoir pris part aux marches hebdomadaires des vendredis. Selon des témoins oculaires, une vingtaine de manifestants ont été embarqués dans la capitale lors du 32e acte de mobilisation populaire, alors que le chef de l’Etat, Abdelkader Bensalah, a promis d’appliquer des mesures d’apaisement consistant principalement dans le départ du gouvernement Bedoui, la libération des détenus d’opinions, ainsi que la levée du «blocus policier» sur Alger, et la fin de la répression contre les manifestants.

Ces arrestations sont qualifiées par la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’Homme « d’atteinte grave aux libertés démocratiques et à l’exercice de l’action politique ».
Après leurs interpellations, les prévenus présentés devant le Procureur ou le juge d’instruction sont placés de prime à bord en détention préventive. C’est pour ces raisons que les avocats dénoncent constamment, depuis la multiplication des arrestations, l’ordonnance de « détention préventive » prononcée
« systématiquement » à laquelle recourent souvent les juges d’instruction et les procureurs, sachant que dans le code de procédure pénale, cette mesure est une « exception, mais qui tend à devenir la règle », dénoncent les robes noires.

Récemment, le militant des droits de l’Homme, Salah Eddine Sidhoum, a indiqué que 92 personnes sont poursuivies en justice en raison de leur engagement politique en faveur du Hirak, dont une quarantaine attend une date de leur procès, sachant que nombre d’entre eux n’ont pas encore été entendus dans le fonds. Ce dernier ajoute également que les chefs d’inculpations varient entre « atteinte aux corps constitués, atteinte à l’unité nationale et atteinte au moral de l’Armée, attroupement ou incitation à l’attroupement». Les avocats mettent en avant « l’illégalité » des poursuites engagées contre des manifestants pacifistes et dénoncent avec fermeté « un appareil judiciaire fonctionnant aux injonctions ».

Pour eux, il suffit de constater les différents verdicts prononcés à l’encontre des porteurs de drapeau berbère. Pour une infraction « fictive », les tribunaux de Batna, Mostaganem et Annaba ont acquitté les manifestants arrêtés pour délit de déploiement de l’étendard berbère, alors que celui d’Alger ne fait que prolonger le séjour carcéral d’une quarantaine de prévenus, arrêtés pour même délit.