Le premier groupe des porteurs de drapeau berbère, placés sous mandat de dépôt, bouclera bientôt les quatre mois de détention préventive. Une ordonnance délivrée par le juge d’instruction à l’encontre de prévenus qui ne sont pas encore jugés et l’affaire dans laquelle ils sont poursuivis est en cours d’instruction. Bien que cette ordonnance est renouvelable, une détention provisoire en Algérie ne peut pas durer plus de quatre mois et ne peut être renouvelée qu’une seule fois, en cas de circonstances exceptionnelles. Les avocats de défense prévoient les jugements avant le 23 octobre. Ces derniers ont constamment décrié le placement en détention préventive des manifestants arrêtés pour port du drapeau berbère ou détenus d’opinions. Le premier groupe a été placé sous mandat de dépôt le 23 juin. Ils ont été arrêtés pour port du drapeau berbère et poursuivis pour atteinte à l’unité nationale. Un acte prévu et puni dans l’article 79 du code pénal, qui concerne en principe des actes graves comme l’espionnage ou le terrorisme et non l’exhibition d’un étendard identitaire.
Hier, le juge d’instruction près le tribunal de Sidi M’hamed a auditionné dans le fond deux prévenus arrêtés pour avoir exhibé l’étendard berbère. Le magistrat instructif a la prérogative de prononcer un «non lieu», renvoyer l’affaire devant le tribunal correctionnel et de prononcer une «liberté provisoire ».
Pour M. Seddik Mouhous, selon les procédures du code pénal, la détention préventive est conçue pour être une mesure « d’exception », mais elle tend à devenir « la règle ». Ce dernier fait état d’un « recul et d’une régression» en matière du respect des droits de l’Homme, des libertés collectives et individuelles. «On a fourni toute les preuves et arguments et que les prévenus présentent toutes les garanties pour ne pas fuir la justice et qu’ils pourront être maintenus en dehors de la prison. Le maximum serait la mise sous contrôle judiciaire. Mais la chambre d’accusation a rejeté notre demande et les a gardés sous mandat de dépôt », souligne l’avocat, qui rappelle qu’avant le 21 juin, le drapeau berbère a été déployé dans tous le territoire national sans que cela ne pose problème. «L’emblème berbère est un référent identitaire et non un drapeau séparatiste. Et le déployer ne peut être considéré comme une infraction», ajoute l’avocat. Dans les tribunaux de Annaba, de Mostaganem et même de Chlef, l’instruction a été vite bouclée et le procès accéléré, sans que cela ne soit le cas à Alger, où 41 prévenus arrêtés pour leurs engagements dans le mouvement en cours.
Concernant les deux militants de RAJ, Ahcene Kadi et Karim Boutata, arrêtés jeudi à Alger, par des agents civils et conduits vers la brigade de Bab-Edjdid, le juge d’instruction du tribunal de Sidi M’hamed les a placés sous mandat de dépôt. Ils sont poursuivis pour « incitation à l’atteinte, à l’intégrité territoriale par diffusion de vidéos sur Facebook et port de pancartes et slogans attentatoires à l’unité nationale ».
La mobilisation contre les arrestations arbitraires des manifestants et militants politiques se poursuit. Des dizaines de personnes se sont rassemblées, hier, devant le tribunal de Sidi M’hamed à Alger, pour exiger la libération immédiate et sans conditions des détenus d’opinions. «Libérez les otages (détenus d’opinion)», «libérez la justice», «pas de chantage avec les otages», ont scandé les manifestants et familles de détenus venus exprimer leur soutien aux jeunes arrêtés. Les protestataires ont également entonné des chants hostiles au chef d’état-major de l’Armée. «Remplissez les formulaires aux Emirats », en allusion à leur refus catégorique d’aller vers la présidentielle le 12 décembre prochain. M. K.